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IMPOSITION DES MAINS


la portée de son témoignage ; sur la grandeur des fonctions sacerdotales, les deux interlocuteurs sont pleinement d’accord et l’orthodoxe laisse volontiers le luciférien s'étendre sur ce sujet : « Entre autres fonctions, dit donc celui-ci, le prêtre (c’est-à-dire l'évêque) a celle d’imposer les mains au laïque qui se présente à lui ; il invoque sur lui le retour du Saint-Esprit et c’est ainsi, après indiction d’une prière au peuple, que celui qui avait été livré à Satan pour la destruction de la chair et le salut de l’esprit, est réconcilié par lui à l’autel, » n. 5, P. L., t. xxui, col. 159. Il s’agit bien ici, on le voit, du ministère ordinaire de la réconciliation pénitentielle et il n’est nullement question des hérétiques. L’imposition des mains, accompagnée d’une prière pour obtenir " le retour du Saint-Esprit, » est celle qui permet au pécheur l’accès de l’autel, qui rend à ce membre de l'Église la santé compromise par ses fautes. Saint Jérôme, on le voit, met très réellement ^ous no ; yeux la cérémonie de l’absolution publique, telle qu’elle se pratiquait alors dans toutes les Églises d’Occident, et on ne saurait affirmer plus clairement qu’une collation du Saint-Esprit était attachée à la rémission des péchés. Saint Augustin enfin explique par là et pourquoi la rémission du péché se fait par la vertu du Saint-Esprit et pourquoi le refus de la pénitence s’appelle le péché contre le Saint-Esprit. La rémission des péchés a le Saint-Esprit pour auteur. Encore que cette œuvre lui soit commune avec les deux autres personnes divines, elle lui est cependant spécialement attribuée : quam remissionem cum Trinilas jaciat, proprie tamen ad Spiritum Sanctum inlclligitur pcrlincre, Serm., lxxi, 17, 28, P. L., t. xxxviii, col. 460 ; … lanquam proprium est opus Spiritus Sancti, ibid., 20, 39, col. 563 ; le Christ n’a remis le péché que dans le Saint-Esprit et il a voulu que l'Église fît de même. Ibid., 12, 19, col. 454. Or la raison de tout cela est que cette rémission consiste à nous arracher à l’esprit impur pour faire de nous des temples du Saint-Esprit. Rcmissio peccalorum, quoniam non datur nisi in Spiritu Sancto, in illa Ecclesia tantummodo dari potest, quæ habet Spiritum Sanctum. Hoc cnim fil remissions pcccatorum, ne princcps pcccati, spiritus qui in seipsum divisus est, regnet in nobis, ut eruli a potestate spiritus immundi, templum dcinceps cfjiciamur Spiritus Sancti. Ibid., 20, 33, P. L., col. 463. Celui qui nous purifie et nous accorde le pardon, le fait en s'établissant en nous pour y habiter, ut a quo mundamur accipiendo indulgentiam, ipsum accipiamus habitatorcm.

La réalité, d’ailleurs, de cette infusion du Saint-Esprit correspondant à la rémission du péché, était encore bien présente aux esprits au moyen âge. Gratien, dans son Décret, argumentant pour prouver qu’il y a rémission du péché dès avant la confession, établit la déduction suivante : Habet itaque anima sibi Deum præsentem pcr gratiam, quæ vivens peccalum suum confltetur, eamquc vila, quæ Dcus est, inhabilal, quam inhabitando uivere facit. Si autem illam inhabilal, ergo templum Spiritus Sancti fada est, ergo illuminala est, ergo a tenebris pcccatorum expiata est. De pœnitentia, dist. I, c. 35, Friedberg, p. 1166-1167. Saint Thomas, Sum. theol., III", q. lxxxiv, à l’art. 4, où il nie que l’imposition des mains soit requise pour le sacrement de pénitence, se fait cette objection : In sacramento pœnilenlix récupérai homo Spiritum Sanctum amissum. Sed Spiritus Sanclus datur per impositionem manuum… Ergo…. La réponse, ad 2 <ni, écarte la conclusion, en faisant observer que l’imposition des mains n’est pas requise pour toutes les infusions du Saint-Esprit, mais elle ne conteste aucunement le fait posé en principe que parla pénitence l’homme recauvre le Saint-Esprit : Non quælibct acccplio Spi ritus Saneti requirit manus impositionem, quia etiam in baptismo accipil homo Spiritum Sanctum nec tamen fit ibi manus impositio.

b) Le Saint-Esprit est donné aux hérétiques pour leur remettre les péchés. — Ceux-là mêmes, parmi les auteurs anciens, qui parlent d’une collation du Saint-Esprit aux convertis de l’hérésie, l’entendent surtout et à proprement parler du don premier qui en est fait à l'âme lors de sa justification. En d’autres termes, ils entendent que les hérétiques, malgré la validité de leur baptême, demeurent dépourvus de la grâce et donc du Saint-Esprit, et que le rite de leur réconciliation a pour but de le leur donner pour suppléer ainsi à l’inefficacité du sacrement de baptême reçu hors de l'Église. C’est évident pour saint Cyprien. Toute son argumentation, en elîet, se ramène à ce dilemme fondamental : ou bien, par le baptême, les hérétiques ont eu leurs péchés remis et donc ont reçu le Saint-Esprit, car il n’est de rémission des péchés qu’avec et par le Saint-Esprit, et alors quel besoin de le leur donner par l’imposition des mains ? Epist., Lxxiii, 6 ; lxxiv, 5 ; lxxv, 8, etc., ou, au contraire, comme l’indique la collation qui leur en est faite, ils ne l’ont pas reçu au baptême, et donc ils n’ont pas obtenu non plus la sanctification, la rémission des péchés, et alors, comment leur baptême peut-il être considéré comme valide, Epist., hxix, 11 ; lxxiv, 5, comme efficace ? dirions-nous, car, à la base de toute cette polémique, se trouve, nous l’avons déjà dit, l’oubli ou la méconnaissance de la distinction, précisée depuis, entre le caractère imprimé par le sacrement , et ses fruits de sanctification. Saint Cyprien raisonne comme si le pape avait admis pour les baptisés dans l’hérésie une réelle participation à ces derniers et la contradiction qu’il croit voir entre cette concession et la prescription de leur imposer les mains montre bien le sens qu’il découvre à ce rite : dans la pensée de saint Etienne, il le croit destiné à donner le Saint-Esprit comme auteur et principe de la rémission des péchés.

Aussi se tient-il pour assuré de confondre par là ses adversaires. Cette rémission des péchés, leur dit-il, les convertis de l’hérésie ont si bien conscience de ne l’avoir pas obtenue, qu’ils viennent à l'Église pour la recevoir. Illi se peccasse et propter hoc ad Ecclesiæ indulgentiam ventre jatentur. Epist., lxxui, 20. Ad fidem cl veritatem veniunt et agentes pœnitentiam remitli sibi peccata deposcunt. Ibid., 22. Cum cognoscunt baplisma nullum loris esse nec remissam pcccatorum extra Ecclesiam dari posse, avidius ad nos et promptius properanl et mimera ac dona Ecclesiæ malris implorant. Ibid., 24. Se illi in peccatis esse et niliil gratiæ liabere se ac propterea ad Ecclesiam venire fatentur. Epist., lxxv, 23. Mais vous, en acceptant leur baptême, vous leur donnez d’abord à croire qu’elle leur a été déjà accordée : Quam vanum est porro et perversum, ut, cum ipsi hæretici, repudiato et reliclo vel errore vel scelere in quo prius fueranl, agnoseanl Ecclesiæ veritatem, nos…. venientibus ac pœnitentibus dicamus eos remissionem pcccatorum consecutos esse, Epist., Lxxiii, 20, puis, en vous bornant à leur imposer les mains, vous renoncez vous-mêmes à la leur procurer : Cum se illi in peccatis esse et nihil gratiæ habere se ac propterea ad Ecclesiam venire (aleanliir, lu eis remissionem peccatorum subtrahis quæ in baptismo datur, dum dicis eos jam baptizatos et extra Ecclesiam Ecclesiæ gratiam consecutos. Epist., lxxv, 23 ; car il faut les deux sacrements pour la régénération, la sanctification et l’insertion au Christ, Epist., Lxxiii, 21 ; Lxxii, 1, etc. En sorte que la ligne de conduite adoptée par vous aboutit d’une part à jeter les hérétiques dans l’illusion sur la valeur de leur baptême, Epist., lxxi, 1 ; Lxxiii, 12, 18-19, 22 ; i.xxiv, 8 ; lxxv, 18, 23, et.