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IMPOSITION DES MAINS


l’autre que donner le Saint-Esprit par l’imposition des mains, c’est confirmer, la première s’est attachée à ce fait comme à un point acquis et fondamental d’oiîi il faut partir pour déterminer le sens exact de la cérémonie, et la seconde s’est trouvée impuissante à expliquer qu’une absolution pénitentielle se présentât ainsi sous les traits du sacrement de confirmation. Il faut en prendre son parti, en effet : si l’imposition des mains in pœniienliam s’est toujours distinguée de l’onction spirituelle ou de l’imposition des mains in Spiritum Sanctum, comme se distinguent et s’opposent aujourd’hui, dans nos conceptions, les sacrements de pénitence et de confirmation, le problème de la réconciliation des hérétiques n’est pas susceptible d’une solution qui s’impose. Le fait de cette distinction res era toujours le point critique où les deux solutions classiques se rencontreront sans parvenir à s'écarter l’une l’autre. Seulement ce fait capital, que tout le monde admet, il est remarquable que personne ne le prouve ; et la réalité en est, de fail, pour le moins contestable. Il est facile d'établir d’une part que l’imposition des mains proprement pénitentielle était considérée aux premiers siècles comme destinée h donner le Saint-Esprit aux chrétiens que le péché en avait dépouillés, et d’autre part que les auteurs qui parlent de donner le Saint-Esprit aux convertis de l’hérésie entendent eux-mêmes par là surtout et à proprement parler le don premier qui en est fait à l'âme au moment de sa justification. Or, cette constatation une fois faite, il apparaît que les deux expressions : in pœniienliam et in Spiriliim Sanclum, ne sauraient plus s’opposer comme s’excluant l’une l’autre. Si l’on fait attention, en outre, qu’il ne faut pas, dans l’histoire des sacrements, s’attacher au seul matériel des rites accomplis pour retrouver aux époques primitives la réalité de nos divers sacrements ; que, les distinctions de rites essentiels ou secondaires et les précisions de notions qui nous sont si familières étant le résultat d’une longue élaboration liturgique et théologique, il y aurait danger manifeste d’erreur à vouloir les retrouver auparavant telles qu’elles sont devenues plus tard ; et que, par conséquent, pour identifier des rites anciens avec nos sacrements actuels, il faut avoir égard aussi ou surtout à la nature des effets qui y sont attachés, on ne croira pas que la réconciliation des hérétiques, pour avoir con porté le n.ê, e rite et la n êir.e formule que la collation du Saint-Esprit identifiée par nous avec la confirmation, doive être identifiée elle aussi avec le même sacrenent. Ce serait oublier que le Saint-Esprit se donne aux âmes en des manières et à des monients bien divers ; ce serait aussi méconnaître le principe fondamental que l’imposition des mains est avant tout une prière et que la même prière peut être ordonnée à obtenir de l’Esprit Saint des effets d’ordre tout différent.

C’est par là, croyons-nous, que doit se résoudre la controverse sur la nature propre de l’imposition des mains aux hérétiques.

a) Rôle universellement allribué au Saint-Esprit dans la rémission du péché. — L’antiquité chrétienne a fait de la présence du Saint-Esprit dans le chrétien la caractéristique propre de la justification. L’Esprit est le don incréé, qui produit, accompagne et entretient en lui le don créé de la grâce. Acquérir l'état de grâce, c’est donc recevoir en soi le Saint-Esprit et demeurer ou retomber dans l'état de péché, c’est en être privé ou le perdre. En se réconciliant avec Dieu et en recouvrant l'état de grâce, le pécheur recouvre donc le Saint-Esprit et les auteurs des premiers siècles parlent, en effet, couramment à ce propos du don du Saint-Esprit, que fait aux pénitents le prêtre qui leur impose les mains pour les absoudre. Saint Cypricn, par exemple, dans sa lettre i.vii, 4, dit du pé nitent que, s’il n’avait pas « reçu la paix, » c’est-à-dire l’absolution, il n’aurait pas reçu l’Esprit du Père, édit. Hartel, p. 653 ; saint Denys d’Alexandrie, dans sa lettre à saint Denys de Rome, reproche à Novatien, qui refusait d’accorder la réconciliation aux pénitents, de leur refuser le retour du Saint-Esprit, dans Eusèbe, H. E., VII, 8, P. G., t. XX, col. 653 ; la Didascalie des apôtres, ii, 41, 2, est formelle : Quemadmodum gentilem baptizas ac poslea recipis, ita et huic [pcccatori conversa qui fruclus pœnitenliæ ostenderil] manum impones, omnibus pro eo precanlibus, ac deinde eum introduces et participem faciès Ecclesise [àTTOxaTaaTrjCTeiç aÙTèv zlc, T7)V àp)(a[av aÙTOû vojjlyjv, Conslit.] el erit ei in loco baplismi impositio maxus ; namqw aul per imposiTiONEM manus aut per baplismum accipiunt participation em SPIRITVS SANCTI [xalyàp SiàT^ÈTnâéaECDÇ Twv Jjji.exÉpov /eipwv èSîSoTO tô TiveCfxa tô aytov, Conslit.], édit. Funk, l.i, p. 130-131 ; saint Ambroise, qui dans son De pxiiilentia, i, 2, 7-8, revendique comme un véritable jus sacerdotale ou officium sacerdotis le munus Spiritus Sancli ou le jus Spirilus Sancli [quod] in solvendis ligandisque criminibus est, trouve, ii. 3, 18, dans l’anneau remis au doigt de l’enfant prodigue, le symbole du sceau de l’Esprit rendu au pécheur au terme de sa pénitence : Del annulum in manu ejus, quod est fidei pignus et Sancli Spiritus signaculum, P. L., t. xvi, col. 500 ; saint Asterius d’Aniasée fait de même dans son interprétation de la niênie parabole de l’enfant prodigue. Avec sa robe on lui rend son anneau, et si l’une représente la grâce dont le chrétien est revêtu au baptême et qu’il recouvre par la pénitence, l’autre est le symbole du don de l’Esprit dont il avait reçu l’empreinte, comir.e d’un sceau, au moment de son adoption divine, et dont il reprend maintenant possession. Car le Saint-Esprit fait comme la colombe pour son pigeonnier délabré. Il abandonne le chrétien qui se dévoie et ne revient à lui que quand il est délicatement ramené, lorsque les ouvertures des sens, par lesquelles le péché avait auparavant libre accès, ne lui inspirent plus aucune crainte, et que l'âme convertie, comme une maison reblanchie, a retrouvé sa splendeur. » Homélie sur les deux fds d’après saint Luc, publiée d’après un manuscrit de l’Athos, par le D' Adolf Bretz, Studien und Texte zu Aslerios von Amasea, dans Texte und Untersucliungen, Leipzig, 1914, t. xl, p. 113-114. Il est utile de joindre à ce passage le résumé qu’en a tait Photius, et qui est tout ce qu’on connaissait jusqu’ici de cette homélie : AlSoTat tw àawTcp [izzà. t7)v aToXrjV xal Say-TUÀioç, aûfjiPoXov tyjç vo/jT^ç acppaylSoç toû nveûfxaTOç. 'Çlç yàp èv xy) Sià TOÛ paTiTÎCTfxaTOç TzaXiY^zvsala. xal otoXy) xal acppaylç Swpeâç nv£Û[xaTOc ; àylou, outw xal sv t-Î) Sià ttjç (iETavotaç àvayevvTiaEt. Biblictlicca, cod. 271, P. G-, t. civ, col. 213. La comparaison de la colombe est omise, mais l’idée est très exactement traduite et en termes qui montrent la persistance au ixe siècle de la doctrine du iv sur l’attribution à la pénitence sacramentelle d’une infusion du Saint-Esprit semblable à celle de la régénération baptismale.

L’auteur du commentaire sur les Épîtres de saint Paul, désigné sous le nom de VAmbrosiastre, est aussi fort clair : le Saint Esprit, qui s’est éloigné de l'âme coupable, y revient par la pénitence : Spiritus Sanctus pcrmanct in eo cui S3 infuderat, si permaneal in proposilo regenerationis ; si quominus, abscedit, ita tamen ut, si se reformaverit homo, redeat ad illum. In Eph., m, 1, P. L., t. xvii, col. 197. Saint Jérôme identifie explicitement la rémission des péchés avec une certaine collation du Saint-Esprit. Voici comme il parle de la réconciliation pénitentielle dans son Dialogue contre les lucifériens : le fait qu’il en ait mis la description dans la bouche de l’adversaire ne diminue point