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IMPOSITION DES MAINS


diss. I, a. 2, dico 4° ; Pesch, Præleciiones dogmaticai.vu. De pœnitentia, n. SI, que rimposilion des mains était fréquemment renouvelée au cours de la même pénitence publique et que pareille réitération du sacrement est inadmissible. Mais on suppose d’abord par là qu’il y avait eu absolution sacramentelle dès le -début de la pénitence, ce qui est pour le moins contestable — la question sera examinée à l’art. Pénitence ; voir ce qui en a déjà été dit à l’art. Absolution, 1. 1, col. 156 — ; on oublie ensuite que la question se pose uniquement pour l’imposition des mains finale, qui rendait la communion aux pénitents. C’est la seule que les documents identifient avec leur réconciliation ; les précédentes, reçues au cours de la pénitence, ne sont manifestement qu’une cérémonie liturgique. Si donc, comme on l’admet de plus en plus communément, cf. d’Alès, L’édit de Calliste, p. 439, celle-ci constituait vraiment le rite de l’absolution sacramentelle, d’j' voir la matière essentielle du sacrement n’entraînerait nullement à en admettre la réitération.

Les objections faites du point de vue historique n’atteignent donc pas la question, et il reste que les théologiens ne l’ont tout au moins pas examinée du point de vue précis où elle peut se poser.

b) L’opinion de saint Thomas. — Ce saint docteur, en tout cas, la suppose résolue. La question posée : S£im.//ieoZ., III, q.Lxxxiv, a. 4, ne vient qu’après qu’ont été déjà déterminées, a. 2 et 3, la matière et la forme du sacrement. En demandant si l’imposition des mains y est nécessaire, il n’a en vue maintenant que son administration. Il pourrait se faire que, comme il arrive pour d’autres sacrements, le prêtre, en absolvant, eût à joindre à sa parole une action accomplie sur le pénitent : Quod aliqæm actum exerceat circa pa’nitenlem (vidc.tur quod 3). Sa réponse est que, n’y ayant pas ici de matière à appliquer du dehors, l’imposition des mains n’est pas nécessaire : in sacramentis quæ perflciuntur in usu materiæ, minister habel aliquem actum corporalem exercere circa eum qui suscipit sacramentum, sicut in baptismo et conftrmatione et extrema unctione ; scd hoc sacramentum non consislit in usu alicuius maicris’. cxtcrius appositæ, sed loco materiæ se habent ea quæ sunt ex parte pœnitentis ; unde, sicut in eucimrislia sacerdos sala prolaiione verborum super materiam pcrficit sacramentum, ita etiam sola verba sacerdotis absolvenlis super psenilentem pcrftciunt absolnlionis sacramentum, ad 31’"i. Il va même plus loin. Y aurait-il lieu pour le prêtre a poser ici un acte ou un geste quelconque, il pourrait se contenter d’un signe de croix comme celui qui se fait pour l’eucharistie, ; ce serait assez pour signifier que les péchés sont remis par la vertu du sang du Christ. Mais pour lui, encore une fois, il ne croit à la nécessité ni de l’une ni de l’autre. Et, si aliquis actus corporalis essel ex parle sacerdotis nccvss((rius, non minus compcteretcrucis signatio, quæ adhibctur in eucharistia, quam manus impositio, in signum quod per sanguinem crucis Christi remittuntur pcccuta ; et tamen non est de necessitate hujus sacramenti, sicut nec de necessitale eucixarislise. Ibid.

On ne saurait cire plus clair et plus ferme sur la question du fait : pas de nécessité de l’imposition des mains. Saint Thomas ne croit même pas nécessaire d’en donner une preuve positive ; dans le corps de l’article, il ne fait qu’en suggérer la raison a priori ou de convenance : la grâce à obtenir dans ce sacrement n’est pas de telle nature qu’il y ait lieu ici à une imposition des mains. Ce rite, que saint Thomas d’ailleurs ne considère comme la matière propre d’aucun sacrement, n’a sa place que là où se doit obtenir une grande abondance de grâces, ad drsignandum aliquem copiosum gratiæ ejjectum ; or, tel n’est pas le cas du sacrement de pénitence, qui ne vise qu’à

elTacer le péché, et voilà pourquoi, pas plus qu’au baptême, il ne comporte d’imposition des mains.

Il y aurait beaucoup à dire sur ce raisonnement. Il se fonde sur une donnée dont nous avons déjà, col. 1327, sq., établi l’inexactitude : l’ordre et la confirmation ne sont pas les seuls sacrements dont l’administration ait jamais comporté une imposition des mains. Use heurte de plus à une affirmation de l’article l""’de la même question lxxxiv. Tandis qu’ici le baptême et la pénitence sont opposés à la confirmation comme ordonnés à une grâce trop peu abondante pour comporter eux aussi une imposition des mains, là, c’est à raison même de l’excellence de la grâce à obtenir que le baptême lui est associé comme exigeant à cet effet une matière appliquée du dehors. Les Salmanticenses, dans leur commentaire sur l’art. 4 de cette question, n. 5, font remarquer que les commentateurs n’ont pas vu ou ont omis de relever cette contradiction tout au moins apparente qu’eux-mêmes s’appliquent à résoudre. Mais ce n’est pas ici le lieu d’entrer dans cette discussion. Quoi qu’il en soit des raisons de convenance suggérées par saint Thomas, il est évident qu’elles concernent uniquement le fait universellement admis à son époque : dans la pensée de l’Église, l’imposition des mains n’est pas, ou du moins n’est plus, partie essentielle du sacrement de pénitence. Mais la question, nous l’avons dit, peut se poser pour le passé : ne l’a-t-elle pas été jadis et n’y a-t-il pas eu ici encore précision lente par l’Église des éléments du sacrement institué par le Christ ? L’hypothèse, nous le savons, ne s’exclut pas a priori et la connexion si étroite constatée aux premiers siècles entre ce rite et l’absolution des pénitents porterait à croire qu’effectivement on y Noyait alors ce que nous a ons appelé depuis la matière du sacrement.

c) Solution. — Voici cependant les raisons qui nous semblent devoir imposer la réponse contraire.

La pratique ancienne, quoi qu’il y paraisse au premier abord, justifie plutôt la conception moderne. 11 est vrai que l’imposition des mains fut dès l’abord le rite olliclcl de la réconciliation publique des pécheurs. Mais il n’y a pas de doute que, dès les premiers siècles, la rémission des péchés ne s’accordât aussi parfois indépendamment de l’assujettissement à ce rite. Cela résulte de l’existence et du fonctionnement de ce qu’on appelle la pénitence ou la confession prixée. Nous n’avons pas a en établir ici la réalité, la nature et l’antiquité ; voir l’art. Pénitence ; cf. aussi d’Alès, L’édit de Calliste, appendice m ; Dictionnaire apologétique de la foi catholique, art. Pénitence ; H. Brewer, Die kirchliche Privatbusse im christlichen Atterlum, dans Zeitschrijt jûr I.atholische Théologie, 1921, t. xlv, p. 1-42 ; mais quelques faits incontestables semblent indiquer que, parfois au moins, l’Église usait du pouvoir des clefs à l’égard des pécheurs en dehors du rite liturgique de l’imposition des mains. Ainsi faisait-elle d’abord pour les clercs. La règle générale, en cas de faute grave et publique de leur part, était de les réduire à la communion laïque sans néanmoins les astreindre au préalable à prendre rang parmi les pénitents : on eût considéré comme une irrégularité grave de leur imposer les mains. Leur admission néanmoins à la communion ne devait point aller sans une réelle absolution, dont il est difficile sans doute de dire si elle se traduisait autrement que par la faculté même de participer aux saints mystères, mais dont il est évident qu’elle ne saurait s’identifier avec ce qu’on appelait alors l’imposition des mains pénitentielle.

Il faut en dire autant des pécheurs que, pour un motif quelconque, un prêtre ou un évêque jugeait inopportun de soumettre au régime pénitentiel qui de droit aurait dû lui être prescrit. Saint Augustin, entre autres, parle fréquemment de ces coupables