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IMPOSITION DES MAINS


l’onction conséeulive à l’imposition des mains, qu’on se demande quelle distinction il peut faire entre les deux rites. Amalaire de Metz, lui, supprime la distinction : la chrismation postbaptismale n’est qu’un dédoublement et comme une anticipation de l’onction pour le Saint-Esprit réservée à l'évcque. C’est le pape saint Silvestre qui l’en a détachée pour subvenir, autant qu’il est possible, à l’inconvénient de partir de ce monde sans avoir reçu ce baptême de l’Esprit : Si quis sine isto baplismate migraverit de sœculo, periculosum iier arripit. Hoc prævidrns Sylvester papa, quantum poluit, subvenit : et, propter absentiam episcoporum, necessilate addidit ut a presbyterv ungerentur. De ecclesiasticis officiis, i, 27, P. L., t. cv, col. 1049. C’est le Liber pontificalis (in gestis pontificalibus) qui a suggéré cette explication : il dit, dans sa 2°= édition, que le pape saint Silvestre constituit ut baptizatum liniret presbytcr chrisma levatum de aqua, propter occasionem transitus moriis, édit. Duchesne, t. i, p. 171. Nous savons qu’il n’en est rien : la chrismation postbaptismale se pratiquait régulièrement au début du iiie siècle. Mais Amalaire s’applique à prouver qu’il s’agit bien là d’une innovation : Quod si antca agebatur, superflue constitutum a sancto Sylvestre quod jam agebatur. Ibid., col. 1047. La similitude même des prières qui accompagnent les deux onctions prouve leur unité primitive et les paroles du Liber pontificalis prouveraient à elles seules que le pape, en permettant au prêtre de l’anticiper en cas de danger de mort, a voulu uniquement prévenir le risque de mourir sans l’imposition des mains : Etiam verba S. Silvestri, qui, ob remedium difflcultatis episcopum consequendi ante ixitum animæ, jussit ut liniretur neophylus a presbytero chrismatesalutis in vitam œternam, sic sonant quasi possit rt’cipi in regno calorumsine impositione nwnus episcopi. Ibid., col. 1048. Telle est l’explication libératrice : les deux onctions donnent réellement le Saint-Esprit, mais, puisqu’elles sont réductibles l’une à l’autre, il n’y a plus à discerner ce qui, dans les écrits des anciens auteurs, s’applique à la première ou à la seconde. Raban Maur reproduit cette explication et y insiste : la chrismation postbaptismale donne réellement le Saint-Esprit : Bene quidem baptismo continuatur chrismalis unctio, quia Spiritus Sanctus… per illud crisma suæ virtutis admistione sanctificat credentes. De clericorum institutione, i, 28, P. L., t. cvii, col. 313, et c’est parce que saint Paul a dit qu’on n’est pas du Christ si l’on n’a pas son Esprit, qu’il a paru nécessaire de faire cette onction dès le baptême : Ideo necessarium est, ut staiim succurrat in baptizato cum chrismatis unctionc, ut Spiritus Sancti parlicipationem accipiens aliénas a Christo non exsislat. Ibid., col. 313. Or, au témoignage du Liber pontificalis, c’est le pape saint Silvestre qui, précisément pour ce motif, et tout en réservant à l'évêque le privilège de la consignation proprement dite, prescrivit au prêtre d’oindre luimême tous ceux qu’il baptiserait.

L’explication eut de plus le grand avantage de permettre une réponse topique au reproche fait par Photius à l'Église de Rome de ne pas autoriser les prêtres à faire l’onction frontale de la confirmation et en conséquence de la réitérer aux fidèles baptisés par des prêtres grecs. Littera encyclica adarchiepiscopos, 6, P. G., t. en, col. 725. L'évêque de Paris, Eudes, le seul, semble-t-il, qui répondit à l’invitation faite par le pape Nicolas I" de réfuter ces calomnies, y opposa, avant tout, la lettre du pape saint Innocent l" et la prescription de saint Silvestre. Liber adversus Grœcos, 178-179, P. L.. t. cxxi, col. 743-744. Celle-ci en particulier, jointe aux explications d’Amalaire, qu’il reproduit, lui permet de prouver que l’onction faite par le prêtre n’est point primitive, quelle n’a que le caractère d’une précaution prise en vue du danger de mort, et

que les papes, en réservant aux évêques le droit de procéder eux-mêmes à l’onction frontale, n’ont donc fait que se conformer à la tradition première et à la pratique des apôtres. Ratramne de Corbie oppose lui aussi à Photius l’autorité de saint Silvestre : c’est lui qui, dès avant saint Innocent 1°, a prescrit que l’onction frontale serait faite par les évêques et non par les prêtres. Contra Grœcorum oppositiones, iv, 7, P. L., ibid., col. 333.

Mais ce contact avec les Grecs ne pouvait qu’ancrer davantage les esprits dans la conviction du rôle essentiel de l’onction. En permettant de constater l’importance que lui attachaient les Grecs, et l’absence chez ces derniers de l’imposition des mains proprement dite, il devait induire à considérer l’onction comme ayant été toujours et partout le rite essentiel de la tradition du Saint-Esprit.

Aussi, lorsque se précise et se fixe la notion de sacrement, y a-t-il unanimité sur la matière à assigner à celui de la confirmation. Les docteurs scolastiques ne sont pas en désaccord sur ce point. Voir Confirmation, t. iii, col. 1072-1073. Ils discutent uniquement sur la manière et le moment de l’introduction de l’onction et saint Thomas exprime la doctrine commune et officielle, lorsque dans son De articulis fidei et sacramentis Ecclesiæ il écrit : Sccundum sacramentum est confirmatio, cujus maleria est chrisma. Le concile de Florence, dans son décret pour l’union des Arméniens, pour exposer la doctrine de l'Église catholique sur ce sacrement, reprend la même formule, Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 697, et, quand les protestants contestent le caractère sacramentel de la confirmation, le concile de Trente, après avoir défini qu’il n’est pas une vaine cérémonie, mais un vrai sacrement, ajoute un canon spécial pour venger contre eux la doctrine catholique qui attribue au saint chrême la vertu d’en produire l’effet : ce n’est pas faire injure au Saint-Esprit que d’attribuer ainsi une vertu réelle au saint-chrême de la confirmation. Si quis dixerit injurios esse Spiritui Sancto eos qui sacro confirmationis chrismali virtutem aliquam iribuunt, anatliema sit. Ibid., n. 872.

Sauf qu’il n’est pas établi que l’intention voulue et reconnue de l'Église dans ces deux conciles ait été de prononcer une définition de foi proprement dite sur la vraie, constante et propre matière du sacrement, il est difficile d’imaginer qu’elle ait pu manifester plus clairement et plus persévéramment sa pensée dans son enseignement ordinaire. Sur la portée vraiment doctrinale et conciliaire du décret d’Eugène IV pour les Arméniens, voir surtout de Guibert, Le décret du concile de Florence pour les Arméniens : sa valeur doctrinale, dans le Bulletin de littérature ecclésiastique publié par l’Institut catholique de Toulouse, mars, octobre 1919, p. 81-95, 150-157, 195-215. Si l’on se rappelle, en outre, les faits d’ordre liturgique signalés ci-dessus, qui supposent tous que l’onction est seule requise et suffisante pour la validité de la confirmation, il paraîtra difficile de contester que l'Église ait cessé depuis longtemps de considérer l’imposition des mains proprement dite comme étant, même en partie, le rite propre et essentiel du sacrement de la confirmation. Il y aurait pour le faire à remonter un tel torrent de docteurs, d’autorités liturgiques, pontificales et conciliaires qu’on pourrait se demander après cela si l’on reconnaît quelque valeur à l’argument théologique tiré de la pratique et de l’enseignement ordinaire de l'Église.

4. L’onction est-elle une imposition des mains ? — Peuton et faut-il donner encore à cette onction le nom d’imposition des mains ? Ce que nous avons dit interdit, semble-t-il, de le faire au sens primitif de ce nom. Le reste est afl’aire d’appellation, et l’appellation est