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IRVINGIENS


matiqucs et la littérature, il était devenu pasteur du Caledonian Asijlum de Londres. Il y avait attiré d’abord l’attention, puis bientôt la foule, par des sermons qui roulaient sur les thèmes chers au groupe d’Albury. Il en publiait quatre, en 1823, sous le titre significatif : For ilic oracles of God. La même année, un autre recueil annonçait le grand jugement For jiidinient to corne. En 1826, paraissait Babijlon and Infidclitij foredoomed. Enfin, en 1831, il donnait une traduction avec introduction de l’ouvrage de Lacunza, sous le titre : Exposition of (lie Book o/ Révélation. IMais, ses livres n’étaient rien auprès de ses discours. Deux voyages de prédications en Ecosse, en 1828 et en 1829, avaient été, pour Irving et pour ses idées, un véritable triomphe. Tous ceux qui l’avaient entendu étaient dans l’attente d’un renouvellement des miracles de l’âge apostolique.

Or, en 1830, il se produisit, d’abord dans l’église réformée écossaise de Port Glascow, à l’embouchure de la Clyde, puis aux environs, puis au Caledoniun Asylum lui-même, une série d’événements étranges. C’étaient des visions, des prophéties et des phénomènes de glossolalic qui furent interprétés par les assistants comme des « effusions du Saint-Esprit. » Il n’en fallait pas tant pour qu’Irving et ses compagnons d’idées trouvassent là l’indice certain de la réalisation de leurs rêves. Un autre indice non moins certain fut la « persécution » qui commença, en cette même année 1830, de la part des autorités ecclésiastiques, à l’égard d’Irving. Le conseil presbytéral des églises écossaises de Londres, duquel dépendait le Ctdedonion Asijlum, trouva que les scènes auxquelles donnaient lieu les prophéties et les glossolalies n’étaient rien moins qu’édifiantes. Du reste, Irving avait heurté la théologie réformée en professant, sur l’humanité du Clirist, des théories peu compatibles avec le dogme calviniste. Le procès, commencé en 1830, prolongé par nin appel d’Irving au synode général d’Ecosse, se termina, le 2 mai 1832, par sa déposition de l’office de pasteur.

Ces incidents décidèrent Irving et ses amis à fonder une communauté indépendante. Elle prit, surtout dans les premiers temps, l’aspect d’un collège de prophètes, dans lequel se firent remarquer un avocat de Londres, Gardale, puis Baxter et Taplin. Une propagande populaire conduite par soixante jeunes gens permit de former, dans la capitale, sept gi-oupements en souvenir des sept dons du Saint-Esprit et des sept églises de l’Apocalypse. Mais l’image des temps apostoliques qui hantait ces illuminés, leur faisait considérer ces événements comme une simple préparation et comme les préliminaires d’une nouvelle Pentecôte. Elle se produisit, le 7 novembre 1832, par l’appel de John Cardalc comme « apôtre ». Ainsi se dessinait une organisation dont l’âme était précisément Cardalc. Quant à Irving lui-même, son inilucnce oratoire baissait. Du reste, sa santé était gi’avement compromise et il mourait, âgé de quarante-deux ans à peine, le 8 décembre 1834. Cette mort fut du reste le signal d’une expansion de la nouvelle Église apostolique. Le 14 juillet 1835, le « collège des Apôtres » fut complété, grâce à de nouveaux

« appels ». Les « appelés » se retirèrent à Albury, et,

pendant toute une année, se préparèrent, par l’étude des Écritures, à l’accomplissement de leur mission.

Elle débuta, au commencement de 1836, par l’envoi d’une lettre circulaire à toutes les autorités civiles et ecclésiastiques de l’univers. Puis, les « Apôtres » se partagèrent le monde. Cardalefut désigné pour l’Angleterre, Drummond pour l’Ecosse et la Suisse, Arnistrong pour l’Irlande et l’Orient chrétien, Percival pour l’Italie, King-Church, pour les Pays-Bas et le Danemark, Tudor, pour la Pologne et les Indes, Woodhouse pour l’Autriche et l’Allemagne du Sud, Cariyle, un avocat écossais, pour l’Allemagne du Nord, Dalton

pour la France, Sittwill pour l’Espagne, William Dow pour la Russie et Mackenzie pour la Scandinavie. Ils se rendirent dans leurs missions et revinrent à Albury en 1838 pour rendre compte à Cardale de l’état où chacune d’elles se trouvait. Ils repartirent. Mais, dès l’année suivante, Cardale les rappelait en raison des difficultés qui s’élevaient dans les communautés anglaises. En effet, les chefs de ces comnmnautés, qui, en souvenir de l’Apocalypse, portaient le titre d’ « Anges », appuyés par les prophètes, réclamaient une plus grande indépendance vis-à-vis de l’autorité des ti Apôtres ». La querelle fut apaisée et l’affaire s’arrangea ; mais ce débat fut cause que l’un des apôtres, Mackenzie, se démit de sa charge. Quant au succès de la mission, il avait été très divers. Dans les pays de langue romane, le résultat était à peu près nul. En Allemagne, au contraire, Woodhouse et Cariyle avaient fait des adeptes parmi lesquels un rédacteur connu de la Gazette de la Croix, Wagner, et surtout le professeur de théologie de l’université de Marbourg, Hermann Thiersch.

Mais de nouvelles difficultés attendaient le « Collège des Apôtres ». Les prophètes avaient successivement fixé les dates du second avènement du Christ à juillet 1835, puis à Noël 1838, puis à 1842, puis à 1845, puis à 1855. Malgi’é le :, déceptions plusieurs fois éprouvées, on espérait toujours que la venue en gloire et majesté s’accomplirait du vivant des « Apôtres ». Or Mackenzie, Cariyle et William Dow mouraient en 1855. Comment concilier la foi en l’avènement et l’adminislration des communautés ? De là deux courants : les uns se refusaient à accepter de nouveaux apôtres, les autres en affirmaient la nécessité. Pour résoudre le problème, les six apôtres qui restaient en 1860 se réunirent à Albury. Woodhouse amenait de Berlin le prophète Henri Geyer. Celui-ci déclara que le Saint-Esprit appelait comme apôtres Charles Boehm pour l’Allemagne et Caird pour la France. Mais les anciens déclarèrent que ce nouvel appel était en contradiction avec l’Écriture. Cette opposition fut le point de départ d’un schisme qui se réalisa surtout grâce à l’activité de 1’ « Ange » de la communauté de Hambourg, Schwarz. Pourtant ce ne fut pas lui, mais son subordonné Preuss, que le prophète Geyer appela comme apôtre pour l’Allemagne du Nord et la Scandinavie.

Un nouveau schisme se produisit en 1878, sur l’initiative d’un ancien employé de chemin de fer, Krebs, qui avait été à la tête d’une communauté irvingienne dans le Harz. C’est encore Hambourg qui fut le théâtre de cette nouvelle scission. Les dissidents se réunirent aux groupes hollandais, à la tête desquels se trouvait Schwarz, qui avait été évincé de son ancienne communauté par Preuss et Geyer. Les innovations les plus importantes de ces néo-Irvingiens furent la singulière cérémonie de la consignatio des vivants et des morts et la doctrine de la réincarnation du Christ dans les

« Apôtres ». A la mort de Krebs et de Schwarz, le chef

de ces groupes fut le fermier Hermann Niehaus, de Steinhagen, près Biclefeld, en Westphalie. Leurs principaux Il Apôtres » sont, pour les États-Unis, Edwartl Mierau, à New— York, pour l’Argentine, Faber, pour l’Afrique du Sud, Klibbe, pour l’Australie, Niemeyer. En 1900, ces néo-Irvingiens prétendaient avoir gagné à leurs idées, grâce à l’apôtre indigène Sadrach, l’île de Java toute entière. Quant aux conceptions millénaristes de Lacunza, d’après une bienveillante communication orale de Mgr de la Scrcna, elles n’ont pas disparu de leur pays d’origine.

On conçoit que dans ces conditions de développement, cette secte n’ait pas eu à recourir aux innovations doctrinales. Elle déclare admettre ce qu’admettent eu commun toutes les grandes confessions chré-