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IRRÉGULARITÉS

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/) Sont irrcgulicrs ceux qui, agissiuil comme représentants de l’autorité publique, ont versé le sang par homicide ou mutilation, defectus lenilalis, à savoir ceux qui ont prononcé ou exécuté une sentence de mort ou de mutilation, et les soldats qui, au cours d’une bataille, ont tué ou mutilé un ennemi. Il ne s’agit ici ni de l’homicide coupable, qui est puni par une irrégularité ex delido, ni du cas de légitime défense qui, tie soi, n’eptraîne pas d’irrégularité. Clementin., t. V, lit. IV, cap. unie, t. ii, col. 1184.

L’irrégularité ex defedii Icnitalis atteint d’abord tous ceux qui, le sachant et sans ij âlre forcés, concourent en tant que ministres de la justice publique, à la mort ou à la mutilation d’un coupable, et cela par un acte qui influe ii(<tablement, prochainement et directement sur la mort ou la mutilation, Gasparri, n. 451 ; ainsi sont irréguliers le juge ou les juges qui prononcent la sentence, le procureur général qui la requiert, le bourreau et ses aides qui l’exécutent ; mais non le législateur qui a édicté la loi pénale, ni probablement les jurés dont le rôle est seulement de déclarer l’accusé coupable et non de le condamner, ni les témoins convoqués d’oflîce. Il est remarquable que cette irrégularité, admise par tous, consacrée par la pratique et qui a été insérée dans le Code, au moins en partie, n’est pas formulée explicitement dans les Décrétâtes ; ony trouve seulement une défense faite aux clercs et aux moines de prendre part à un jugement qui entraîne la mort ou la mutilation, et une menace de déposition contre ceux qui oseraient le faire. Gasparri, n. 452.

Cette même irrégularité atteignait également les soldats qui dans le combat avaient tué un ennemi ou lui avaient enlevé un memlire. Toutefois il y avait des distinctions assez délicates à faire. Si la guerre était offensive, et à plus forte raison si elle était injuste, tous ceux qui avaient réellement tué ou mutilé un ennemi tombaient sous l’irrégularité, et probablement aussi ceux qui avaient aidé, commandé, excité les combattants. Si la guerre était juste et défensive, les combattants étaient considérés comme se trouvant en cas de légitime défense et aucun d’eux n’était irrégulicr. Mais il faut avouer qu’en pratique il devenait très difficile d’appliquer ces distinctions. Avec les complications de la diplomatie, on ne pouvait .savoir si une guerre était purement défensive ou non, chacun des deux peuples belligérants se prétendant victime d’une injuste agression ; et dans la mêlée <les combats ou, à plus forte raison, avec les armes actuelles, on était rarement sûr d’avoir ou de n’avoir pas tué. Aussi les congrégations romaines ont-elles toujours considéré comme ayant besoin de dispense pour recevoir les ordres tous ceux qui en guerre avaient pris part à des batailles. Gasparri, n. 450, cite une décision de la S. Congrégation du Concile de 1804 ; et, à la fin de la dernière guerre, le décret Redeuntibus de la Congrégation Consistoriale, 25 octobre 1918, a accordé aux Ordinaires le pouvoir de dispenser ad rautelam, de l’irrégularité ex dejecia lenitatis qui aurait pu être contractée par les clercs obligés de se battre. Acta Apostolicæ Sedis, 1918, p. 482. Le cardinal Gasparri ajoutait une remarque dont les rédacteurs du code ont fait leur profit, en supprimant désormais cette irrégularité : ’11 faut avouer, dit le cardinal, que pour ceux qui sont contraints au service militaire et forcés de se battre, comme c’est la règle générale dans nos pays, ce defectus lenitatis se comprend difficilement », n. 450.

g) Étaient irréguliers enfin les néophytes en ce sens que ceux qui avaient été baptisés à l’âge adulte contractaient une irrégularité qui leur fermait l’accès aux ordres à moins de dispense. Gasparri, n. 269.

DICT. DE THÉOL. C.THOL.

2. Irrégnlariiés ex delicto.

On rangeait sous ce titre les irrégularités qui atteignaient :

a) Le fait d’avoir réitéré le baptême ou de s’être prêté à la réitération ; si les deux baptêmes étaient donnés publiquement et d’une manière absolue, quiconque se rendait sciemment coupable de la réitération, c’est-à-dire le ministre qui donnait le second baptême et le sujet adulte qui s’y prêtait, étaient irréguliers. Gasparri, n. 320 sq.

b) Le fait d’exercer solennellement un ordre sacré qu’on n’a pas reçu. Cette irrégularité, contenue formellement dans les Décrétâtes, t. V, tit. xxviii, c. 1, t. II, c. 833, ne s’applique probablement qu’aux clercs et non aux laïques ; elle suppose que le clerc, sachant qu’il n’a pas reçu tel ordre sacré, accomplit solennellement une fonction qu’il sait être propre à cet ordre. Des détails très complets sont donnés par les auteurs sur les cérémonies dont l’usurpation entraînerait une irrégularité, par exemple Gasparri, n. 239 sq. ; Noldin, n. 133.

c) Le fait d’exercer solennellement un ordre sacré en violation d’une censure, excommunication, suspense ou interdit. Gasparri, n. 353 sq.

d) Le fait de commettre injustement un homicide ou une mutilation. Cette irrégularité est « voisine de celle qui nous avons étudiée plus haut, en ce que, dans les deux cas, il y a mort d’homme ou mutilation réellement produite ; mais, tandis que, dans l’irrégularité ex defeclii lenitatis, les auteurs de la mort ou de la mutilation agissaient au nom de l’autorité publique ou en vertu du droit de guerre et étaient exempts de toute faute, dans l’irrégjlarité ex delicto il y a homicide ou mutilation coupable. Cette irrégularité est encourue avant tout par ceux qui sont directement responsables du crime d’homicide, c’est-à-dire ceux qui le commettent, ceux qui le commandent, le conseillent ou l’encouragent ; ils se rendent coupables d’un crime qui doit être puni à l’égal des plus grands ; peu importe d’ailleurs la manière dont ils font mourir leur victime, en public ou en secret, par violence ou par ruse, par coups, par empoisonnement ou par d’autres moyens. IJne des formes d’homicide que les mœurs trop païennes traitent avec une excessive indulgence, mais où l’Église voit toujours le meurtre d’une créature humaine, est l’avortement : ceux qui en sont coupables contractent l’irrégularité. Elle est encourue encore par ceux qui, sans avoir voulu tuer, provoquent un accident morte !, par suite d’une négligence gravement coupable. Il en est de même de ceux qui, placés dans un cas de légitime défense, tuent leur agresseur, mais en dépassant notablement la mesure strictement nécessaire pour se défendre, le moderamen inculpata ; tutctæ ; Gasparri, n. 433-434, cite un grand nombre de décisions dans ce sens et conclut qu’en pratique il faut toujours demander dispense ad cautetam quand on a tué un injuste agresseur, tant il est facile de dépasser ce que demande le droit de défense. Et ce que nous avons dit de l’homicide est vrai de la mutilation, c’est-à-dire de la violence injuste par laquelle on fait perdre au prochain un membre proprement dit. Les décisions de l’Église sont particulièrement sévères pour ceux qui se mutilent eux-mêmes si la mutilation est coupable : alors même qu’ils ne se seraient enlevé qu’un doigt, ils sont irréguliers. Elles visent aussi très formellement ceux qui, même par un souci mal entendu de vertu, sibi ampularent aiil aniputari facerent oirilia ; ainsi Clément III et Innocent III, dans £)etTeto/es, t. I, tit. xx, c. 3, 4 et 5, t. ir, col. 145.

e) A ces irrégularités prévues par le droit des Décrctale. s, le décret Vigilanti de la S. Congrégation du Concile, 25 mai 1893, et le décret Ut débita de la même Congi’égation, 11 mai 1901, en ont ajoute une autre,

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