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IRRÉGULARITÉS


conciles et les papes raisonner a fortiori pour prouver que ce qui était exigé du sacerdoce juif doit l’être davantage encore du sacerdoce chrétien.

Nouveau Testament.

L’Évangile ne contient aucun texte qui corresponde pour les prêtres de la Loi nouvelle aux prescriptions de l’ancienne. Les soins que Jésus a apportés à la formation intellectuelle, morale et religieuse de ses apôtres prouveraient cependant que lui aussi veut des prêtres de valeur ; et c’est déjà une justification des exigences que formulera l’Église.

Les apôtres, après la mort du Maître, sont amenés par les circonstances à se clioisir des auxiliaires : ce sont les diacres. Ils les veulent « de bon témoignage, remplis de l’Esprit Saint. » Act., vi, 3. Plus tard, ils se dispersent, organisent les Églises particulières, y placent des chefs qui seront leurs successeurs ; mais nous n’avons de détails que sur l’apostolat de saint Paul et c’est lui qui, dans ses lettres à Timothée et à Tite, nous fait connaître les règles qui doivent présider au choix des ministres sacrés. Des conditions physiques, il ne dit rien ; elles ont pourtant leur importance, puisque saint Paul lui-même a souffert dans son apostolat de ses infirmités et de son aspect chétif, cf. II Cor., X, 10-14 ; XI, 29-30 ; xii, 7-9 ; Gal., iv, 13-14. Ce sont les qualités morales qu’il exige, des vertus solides, une formation religieuse affermie, en un mot tout ce qui constitue la valeur d’un ouvrier de l’Évangile, et comme consécration de cette valeur, une réputation intacte qui l’impose à la considération de ceux même qui ne sont pas fidèles. I Tim., iii, 2-10 : € Il faut que l’évêque soit irréprochable, qu’il n’ait eu qu’une seule femme, qu’il soit de sens rassis, circonspect, bien réglé dans son extérieur, hospitalier, capable d’enseigner ; qu’il ne soit ni adonné au iivi ni violent, mais doux, pacifique, désintéressé ; qu’il gouverne bien sa propre, maison et qu’il maintienne ses enfants dans la soumission avec une parfaite honnêteté ; car si quelqu’un ne sait pas gouverner sa maison, comment prendra-t-il soin de l’Église de Dieu ? Qu’il ne soit pas un nouveau converti, de peur que venant à s’enfler d’orgueil, il n’encoure le jugement (du diable. Il faut encore qu’il jouisse de la considération de ceux du dehors afin de ne pas tomber dans l’opprobre et dans les pièges du diable. Les diacres aussi doivent être des hommes graves, éloignés de la duplicité, des excès de viii, d’un gain sordide, conservant le mystère de la foi dans une conscience pure. Qu’on les éprouve d’abord et qu’ils exercent leur ministère s’ils sont trouvés sans reproche. » — Tit., i, 5-9 : 1 Je t’ai laissé en Crète afin que tu achèves de tout organiser et que, selon les instructions que je t’ai données, tu établisses des Anciens (presbytres) dans chaque ville. Que ce soient des hommes d’une réputation intacte, maris d’une seule femme, ayant des enfants fidèles, qui ne soient ni accusés de vie dissolue, ni insubordonnés. Car il faut que l’évêque soit irréprochable comme un économe de Dieu ; qu’il ne soit ni arrogant, ni colère, ni adonné au viii, ni violent, ni porté à un gain sordide ; mais qu’il soit hospitalier, aimant à faire le bien, de sens rassis, juste, saint, tempérant, attaché à la vraie parole telle qu’elle a été enseignée afin d’être capable d’exhorter selon la saine doctrine et de confondre les contradicteurs. » En exigeant ces qualités des ministres de l’Église, saint Paul exclut par le fait même ceux qui en sont dépourvus. Il dresse ainsi comme une première liste des cas d’irrégularités que l’Église va développer. II. Formation des lois d’irrégularités a l’époque patristique. — l" Raisons d’être des irrégularités. — L’Église, en se montrant exigeante dans le choix de ses ministres, en écartant du sacerdoce les indignes et les incapables, ne fait qu’obéir à une loi

qui s’impose à toute société religieuse. Des prêtres saints et instruits, irréprochaliles dans le plein sens du mot, sont seuls capables d’exercer une action sur les âmes, seuls dignes d’offrir à Dieu le sacrifice très pur de la loi nouvelle. Un sacerdoce moralement déchu ou intellectuellement irîcapable serait sans dignité auprès de Dieu et sans fécondité auprès des âmes.

C’est ce qu’expriment avec force deux lettres, faisant partie des apocryphes clémentins et qui se présentent comme écrites par saint Clément de Rome à Jacques, frère du Seigneur. Autant qu’il est possible de dater les différentes pièces de ce farrago, les lettres seraient, avec les Recognitiones, dont elles sont comme une préface, une production de la première moitié du iiie siècle. Dans la première, saint Pierre est censé apparaître à saint Clément et lui donner une ligne de conduite pour son ministère. Il lui recommande en particulier de bien choisir ses coopérateurs et ses successeurs Qu’il ne prenne pas des hommes sans jugement, sans prudence ou sans instruction, car

« si un ignorant est chargé de la fonction de docteur,

il est hors de doute que ses disciples et auditeurs, ensevelis dans les ténèbres de l’ignorance, seront précipités dans la mort. » P. G., t. i, col. 472. De ces coopérateurs mêmes, il relève singulièrement la dignité et leur inspire une haute idée de leurs fonctions afin de leur faire mieux sentir quelle doit être leur sainteté : l’évêque tient la place des apôtres, les prêtres celle des autres disciples ; … la vie des prêtres doit être supérieure à celle des laïques, plus sainte et plus élevée, parce que les prêtres, hommes spirituels, doivent l’emporter sur les laïques, hommes charnels. Ibid., col. 476. — La seconde lettre donne les conseils suivants pour le choix des ministres inférieurs :

« Il faut choisir comme clercs des hommes qui puissent

dignement toucher les mystères du Seigneur. Il vaut mieux que le prêtre du Seigneur ait peu de ministres, mais qui puissent dignement accomplir l’oeuvre de Dieu, plutôt que d’en avoir beaucoup d’inutiles, qui seront une lourde charge pour celui qui les aura ordonnés. » Ibid., col. 487.

Les mêmes raisons seront invoquées tout le long de l’histoire des irrégularités : c’est le souci de n’avoir que de bons ministres qui a dicté la législation de l’Église. Ainsi saint Jérôme commente en ces termes le mot sine crimine de saint Paul : « Il faut d’abord que l’évêque soit sans crime, ce que l’apôtre exprime dans l’épître à Timothée par le mot irrépréhensible ; cela ne veut pas dire seulement qu’au moment de son ordination il doit n’être pas coupable de crime et avoir lavé ses péchés passés par une vie toute nouvelle, mais qu’à partir du moment où il a pris une nouvelle naissance dans le Christ, sa conscience ne doit lui reprocher aucun péché grave. Car comment le chef d’une Église peut-il enlever le mal du milieu d’elle s’il a sombré lui-même dans le mal qu’il doit combattre ? Quelle liberté aura-t-il pour reprendre le pécheur s’il peut se faire à lui-même ce reproche muet : tu as commis toi-même ce que tu reprends ? » In Tit., i, 6 ; P. L., t. xxvi, col. 563-564. Sur les mêmes paroles de saint Paul, Isidore de Séville fait les remarques suivantes : « Puisque la loi écarte du sacerdoce les pécheurs, que chacun examine* sa conscience, sachant que les puissants seront puissamment tourmentés ; et, (s’il se reconnaît coupaljle.) qu’il se retire de ce qui est un honneur, mais plus encore une charge ; qu’il n’ambitionne pas de prendre la place de ceux qui sont dignes. Car il faut qu’il soit saint et irrépréhensible en tout, celui qui sera à la tête des peuples pour les former et les conduire à la vertu ; ’il faut qu’il soit sans péché, celui qui reprochera aux autres leurs péchés. Comment aura-t-il le front ; _de