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IMPOSITION DES MAINS


quait la première prise de possession du Saint-Esprit dans leurs âmes, et il était tout naturel de la marquer par le rite qui en était par excellence le symbole traditionnel. Mais dans tout cela il n’y a tien non plus qui corresponde au don du Saint-Esprit caractéristique du sacrement de confirmation.

3. Cette imposition des mains ne se confondait pas alors avec une onction quelconque. — Après ce que nous avons dit, col. 1335-1311, de la nature de l’imposition des mains, il paraît à peine nécessaire d’insister sur ce point. Parfois, nous a-t-il semblé, cette imposition se réduisait à un signe de croix ; la plupart du temps, pour ne pas dire toujours, elle était accompagnée d’une invocation ; mais nulle part, aux premiers siècles, elle n’apparaît se confondre avec une onction. L’imposition des mains et l’onction étaient, aux yeux des anciens, deux rites d’ordre différent et totalement distincts, qui pouvaient être juxtaposés et associés, mais non être identifiés. Sirmond, Anlirrhelicus, part. II, c. VI, s’est amusé de l’abbé de Saint-Cj’ran (Petrus Aurelius), qui avait prétendu le contraire ; il a parlé à ce sujet de rêveries et d’inventions ridicules. On lui a opposé les auteurs du haut moyen âge, qui ont introduit cette confusion. Witasse, Tractaias de confirmatione, part. I, q. ii, a. 3, sect. v, § 5, dans Migne, Cursus conjpletus (heologiæ, t. xxi, col. 789, cite l’abbé Rupert et Hugues de Saint-Victor. Mais on ne saurait, croyons-nous, en trouver aucun exemple pour l’époque où se conservait la notion exacte de ce qu’avait été d’abord l’imposition des mains.

4. Quand l’onction lui a été ajoutée, ce n’est pas à elle qu’a été attribuée la collation du Saint-Esprit. — Mais, sans se confondre avec l’imposition des mains, une onction a pu y être jointe, et dans ce cas, il est nécessaire de se demander auquel des deux rites on attribuait la collation du Saint-Esprit ou si on les considérait tous deux comme également ordonnés à cet effet. La question est donc double : elle porte d’abord sur le fait de l’adjonction d’une onction, ensuite sur le sens qu’on lui attribuait.

a) Une onction a-t-elle été ajoutée à l’imposition des mains ? — a. Dans la liturgie romaine seulement. — En dehors de l’Église de Rome, on ne constate pas cette addition. Ailleurs, au contraire, il n’y en a pas de trace. Ni en Afrique, ni à Milan, ni en Espagne, ni en Gaule, jusqu’à l’époque où y pénètre la liturgie romaine, il n’en est question ; les documents liturgiques ne la mentionnent pas, et les commentateurs des cérémonies de l’initiation chrétienne n’y font pas allusion ; ils signalent et ils expliquent les onctions qui précèdent ou suivent le baptême ; mais malgré le rapport symbolique traditionnel admis entre le Saint-Esprit et l’onction, aucun ne paraît se douter qu’un rite de ce genre intervienne dans le don qui est fait du Saint-Esprit par l’imposition des mains. Celles de leurs paroles, où on a cru la reconnaître, visent la chrismation postbaptismale ; et, si la question se pose uniquement et précisément d’une onction consécutive à l’imposition des mains, la réponse négative paraît certaine. M. A.-J. Mason l’admettait déjà en 1891 pour l’Église d’Afrique, The relation o] Confirmation to Daplism, p. 88, et dom de Puniet, tout en voulant que la confirmation ait été conférée par une onction, n’hésitait pas, en 1912, à reconnaître qu’on avait eu raison d’étendre la même solution au rite romain primitif ainsi qu’aux anciennes liturgies gallicanes : « Les auteurs les plus anciens ne disent rien de cette onction supposée… La consignatio qui accompagnait ou, plus exactement, suivait l’imposition des mains, était sans doute un simple attouchement en forme de croix. » Onction et confirmation, dans la Revue d’histoire ecclésiastique, de Louvain, 1912, p. 450-451, à propos de nos articles des Recherches de science reli gieuse, 191 1, p. 350-382, et de la même Revue d’histoire ecclésiastique, 1912, p. 257-301. Ses réserves au sujet de la liturgie milanaise et mozarabe, loc. cit., p. 451, note 2, et p. 454-459, ne portaient elles-mêmes que sur j la part à faire à une onction dans le rite essentiel de la 1 confirmation et ne tendaient nullement à établir que cette onction fût distincte de la chrismation postbaptismale. Dans l’art. Confirmation du Dictionnaire d’archéologie chrétienne, t. iii, col. 2532, il reconnaît d’ailleurs, lui aussi, qu’il n’y avait pas d’onction dans l’Kslise de Milan.

b. En particulier, il n’y en avait pas en Gaule. — Le doute, sur le point précis de la question, ne pourrait surgir que pour la Gaule. Il repose d’abord sur le canon du concile d’Orange (441) dont la seconde partie, avons-nous dit, a été fort controversée. Après avoir prescrit de procéder régulièrement à la chrismation, en administrant le baptême, et de prévenir l’évêque au moment de la confirmation au cas exceptionnel où on l’aurait omise, parce que, précise-t-il, inler nos placuil semel chrismari, voir col. 1368 ; il ajoute, pour justifier ces décisions, que intcr quoslibet chrismatis ipsius nonnisi una benediclio est, c’est-à-dire, comme on l’entend communément, que partout (inler quoslibet) il n’y a qu’une seule cérémonie de la chrismation, ou bien encore peut-être, que partout on ne consacre qu’une espèce de chrême et dès lors il est indifïérent que la chrismation soit faite par le ministre du baptême ou par celui de la confirmation ; le chrême étant le même, la chrismation a la même valeur dans les deux cas. A cela le concile ajoute une dernière phrase destinée, semble-t-il, à prévenir toute suspicion de présomption ou d’empiétement sur un domaine contesté ; il déclare que son intention n’est nullement de préjuger quoi que ce soit, mais qu’il veut que la réitération de la chrismation ne soit pas — ou soit — nécessaire. Les manuscrits divergent : non ut præjiidicans quidquam, sed ut non necessaria habeatur repetita clirismatio, portent les uns, tandis que d’autres omettent le non qui précède necessaria. Il faut donc choisir la meilleure leçon d’après le contexte. Or le contexte reçoit des interprétations différentes selon le sens que l’on donne au mot clirismatio et selon la signification qu’on attribue à cette onction. De là provient l’enchevêtrement d’opinions qui s’est produit.

"Witasse les énumêre et les classe dans son traité De confirmatione, q. ii, a. 3, sect. v, § 5-8, dans Migne, Theologi.T cursus, t. xxi.col. 830-851. On en trouvera le résumé à la fin de l’article de dom de Puniet sur La liturgie baptismale en Gaule, dans la Revue des questions historiques, 1903, t. lxxii, p. 420-423, ou dans la nouvelle édition de L’histoire des conciles, par dom Leclercq, t. ii, p. 432, note 1 sq.

A vrai dire cependant, on se demande s’il y avait lieu à tant de querelles. Si le mot chrismatio, comme on n’en peut douter, garde le même sens d’un bout à l’autre du canon, la leçon non necessaria s’impose, semble-t-il. Rejeter le non, c’est mettre le concile en contradiction avec lui-même et lui faire prescrire en finissant une réitération qu’il vient d’interdire par deux fois. Aussi bien peut-on considérer l’accord comme fait sur ce point. Il y a bientôt un demi-siècle Joli. Mayer, dans sa Geschichte des Katechumenats und der Katechese, ouvrage trop peu connu, déclarait déjà, que, à défaut du témoignage des meilleurs manuscrits, le contexte suffisait à imposer la négation contestée : l’omission en serait un non-sens, p. 188. D’autre part, dom de Puniet, à l’article précité, tout en prenant parti avec Saint-Cyran contre l’interprétation de Sirmond, admettait avec celui-ci contre son adversaire la lecture non necessaria. Et peut-être l’interprétation de Sirmond, ainsi que son texte, eût-