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IRENEE (saint :


n. 2, col. 984-985. Irénée fait bonne justice de l’argument que les gaostiques tiraient de I Cor., xv, 50 : Caro et sangiiis regnum Dei hæredilare non passant, t. V, c. ix-xii, col. 1144-1156 ; « la chair et le sang » doivent s’entendre de ceux qui pèchent en s’adonnant à des œuvres charnelles, et le sens est que les pécheurs n’entreront pas au ciel. Les actes du Christ : d’abord, les guérisons et les résurrections qu’il opère, c. xii, n. 5 ; c. xiii, n. 1, col. 1155-1157 : elles laissent pressentir la résurrection générale. Ensuite, sa propre ré ;, urrection, qui garantit la nôtre, c. vii, n. 1 ; cꝟ. t. IV, c. ii, n. 4, 7 ; c. v, n. 2, col. 1139-1140, 978, 979, 985. La preuve fondamentale est dans l’incarnation. Si le Verbe a pris notre chair, c’est pour la sauver. L. V, c. XIV, col. 1160-1163. Il a institué l’eucharistie ; nourris du corps et du sang du Christ, nos corps sont divinement immortels. L. IV, c. xviiii, n. 5 ; t. V, c. ii, col. 1027-1029, 1123-1128. Enfin, l'Écriture nous apprend que nous sommes les membres du Christ, lequel est notre tête ; comme la tête est ressuscitée, les membres ressusciteront. L. III, c. xix, n. 3, col. 941. Nos corps sont les temples du Christ, les temples du Saint-Esprit, les temples de Dieu. Templum igitur Dei, in quo Spirilus inhabiiat Palris, el membra Christi non participare sulutem sed in pcrditionem redigi dicere, quomodo non maximæ est blasphemiœ? L. V, c. vi, n. 2, col. 1139 ; c. xiii, n. 4, 1159-1160.

En quoi consistera la résurrection ? Il y aura identité personnelle. L'âme retrouvera son corps, le corps son âme, non enim aliud est quod moritur et aliud quod viviftcatur. L. V, c. xii, n. 3, col. 1153 ; cꝟ. t. II, c. xxxiii, n. 5 ; I. V, c. iii, n. 2 ; c. xiii, n. 3 ; fragment xii, col. 833834. 1130, 1158-1159, 1235. La résurrection sera générale, ad… ressuscitandam omnem carnem. L. I, c. x, n. 1, col. 549 ; cf. c. xxii, n. 1 ; t. ii, c. xxxiii, n. 5 ; L III, c. xvi, n. 6, eol. 669-670, 834, 925, etc. Mais elle ne sera pas simultanée. Les justes ressusciteront, en premier lieu, au début du royaume terrestre du Christ ; les méchants ressusciteront, à leur tour, à la fin du royaume. L. V, c. xxvi, n. 2 ; c. xxii, n. 2 ; c. xxxiii, n. 4 ; c. XXXIV, n. 1 ; c. xxxv, n. 1, 2, col. 1194, 1211, 1214, 1215, 1218, 1220 ; Dem., c. xli, xui, p. 690, 691.

c) Le nii/aunie terrestre du Christ. — La résurrection des justes n’est pas le dernier stade de la fin des choses. Il faut qu’ils s’accoutument peu à peu à contenir Dieu, pualatim assuescunt capere Deum ; que, dans cette création renouvelée, ramenée à l'état primitif, ipsam condilionem reintegralam ad pristiniim, ils reçoivent la récompense des efforts et des peines dont la création fut le théâtre ; qu’ils aient l’héritage de la terre promis à Abraham et, en lui, à tous ceux qui seront ses fils par la foi, accipient autem eam in résurrection' juslorum. Coiit. hær., t. V, c. xxxii, col. 12101211. Le Christ a annoncé qu’il boira, avec ses disciples, du vin nouveau dans le royaume de son Père, Malt h., xxvi, 29, ce qui indique et la résurrection de la chair et l’héritage de la terre, car, on ne Ijoit pas du viii, au ciel, ni sansunrorps C xxxiii.n. l.col 1212. Ceux qui ont tout laissé pour lui auront le centuple en ce siècle et la vie éternelle au sièclf futur, Matth., XIX, 12 ; ils auront ce centuple dans le temps du royaume, c’est - ; i dire au septième jour, jour sonctitié où le Seigneur s’est reposé de toutes ses a-uvres, vrai sabbat des justes pendant lequel ils ne se livreront à aucun travail terrestre, mais seront assis à une table préparée par Dieu même et servie de tous les mets les plus délicieux. » C. xxxiii, n. 2, col. 1212. Ce septième jour, vrai sabt)at des justes, représente un millénaire d’aimées, comme aux six jours de la création correspon(leiit les six mille ans de la durée du monde actuel ; Papias, de qui saint Irénèe se réclame, dit expressément que le règne temporel du Christ durera mille ans. Cf. Eusôbe, H. E., t. III, c. xxxix, P. G.,

t. XX, col. 300. Irénée, en effet, allègue, c. xxxiii, n. 3, 4, col. 1213, 1214, l’autorité des « presbytres qui ont vu Jean, le disciple du Seigneur.. Partant de cette tradition, qu’il croit apostoUque, il interprète dans le sens millénariste la prophétie d’isaac bénissant Jacob, et de nombreux passages des prophètes qui se rapportent au Messie. C. xxxiii, 3-xxxv, col. 1213-1220. Il se refuse à entendre ces passages allégoriquement : niliil allegorizari potest, sed omnia firma, et vera, et subslantiam habentia, col. 1220. Voici les principaux traits de la description du royaume. Irénée n’imagine pas un grossier paradis, tel que celui qui hanta l’esprit de plus d’un millénariste. Son rêve comporte toutefois des festins, col. 1212, 1217, et il admet, col. 1213, sur la foi de Papias, l’authenticité du discours du Seigneur annonçant des vignes, du froment, des arbres fruitiers merveilleux : « des vignes naîtront, dont chacune contiendra dix mille ceps, et dans chaque cep il y aura dix mille bras, et dans chaque bras dix mille rejetons, et dans chaque rejeton dix mille grains, et chaque grain pressé donnera vingt-cinq mille muids de vin ; et, quand un des saints saisira une des grappes, une autre criera : « Je suis meilleure, prends-moi, et bénis Dieu à mon sujet. Les anim’aux, devenus herbivores et pacifiques, seront soumis à l’homme, col. 1214, 1215. Plus de douleur. Les justes seront rois, col. 1210, 1213, 1218. Ils croîtront en grâce et en force par la vision du Seigneur, et, par son secours, ils se prépareront à porter la gloire de Dieu le Père ; ils vivront dans la communion et la société des anges et des justes, en la ville de Jérusalem réédifiée à la ressemblance de la Jérusalem du ciel, col. 1218-1220.

Certes voilà un millénarisme qui n’est pas timide. Mais la pensée d' Irénée a connu des fluctuations. L’exception en faveur des martyrs passant directement au Père après leur supplice posait, au point de vue du millénarisme, un problème ardu, car, dit L. Laguier, La résurrection de la chair dans saint Irénée, dans la Revue du clergé français, Paris, 1905, t. xun, p. 234, si, comme les justes et avec eux, ils ressuscitent, vont-ils jouir en corps et en âme de la vision béatiflque ou en faire sur terre un apprentissage qui serait superflu ? « Ce problème Irénée avait évité de le résoudre. Puis, il avait donné, t. IV, c. xxxiii, n. 14 ; c. xxxiv, n. 4, col. 1082, 1086, pour des textes analogues à ceux qu’il cite en faveur du millénarisme une interprétation étrangère au millénarisme. En outre, là même où Il prend parti ex professo pour le royaume terrestre de mille ans, il y a, non pas la « sourdine » à ses alTirmations, que L. Laguier, op. cit., p. 235, a cru y découvrir — Irénée dit nettement, c xxxv, n. 1, 2, col 1 21 8, 1220 : si autem quidam tenlaverint allegorizare hsec quæ ejusmodi sunt, neque de omnibus polerunt consonantes sibimclipsis inveniri, et conuincenlur… Et nihit allegorizari potest — mais cet aveu que le mill narisme est rejeté par des chrétiens qui putantur recte crrdidisse, c. xxxi, n. 1, col. 1208. Cf. J.-B. Franzelin, Traclatus de divina traditione et Scriptura, Rome, 1870, p. 102. Irénée n’est pas de leur avis ; à l’en croire, ils ont des « sentiments hérétiques, » car nier cet élat intermédiaire de résurrection, c’est fournir des armes aux gnosliques et dénaturer la résurrection de la chair. Telle est « la seconde raison qui, avec son respect pour l’autorité prétendue apostolique de Papias, l’a rendu millénaire, et cette raison est une erreur. L. Lescœur, Le règne temporel de Jésu.t-Christ. Étude sur le millénarisme, Paris, 1868, p. 220. Or, ni cette erreur ni le millénarisme ne reparaissent dans la Démonstralion de la prédication apostolique. Irénée y retrouve, r. lxi, p. 706-707, les textes qui lui avaient paru imposer le millénarisme. Cette fois il n’accorde pas mêmeune mention à l’interprétation littérale ; il ne voit dans les