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IRÉNÉE (SAINT)


précepte du Verbe de Dieu, livra prompteinent son | fils unique et aimé en sacrifice à Dieu, ut et Dcus benephciliim haf’eat, pro universo scniine ejus, dilntum el unigenitum Filium suiim pr.vstarc sacri fÏKium in nostram redemptioncm… IV c. v, n. 4, coi. 986.

Concluons. Dieu et homme, le Christ est médiateur, sauveur, rédempteur, récapitulateur, par sa vie, par ses soullrances. Il est tout cela excellemment, prêtre et victime, par le sacrifice de la croix.

2. Da côté de l’homme.

Parle péché originel l’homme avait contracté une dette envers Dieu. Le Christ en fournit le payement ; c’est la satisfaction. Le mot manque dans Irénée, et il y manque aussi les développements de la théologie ultérieure sur l’expiation du péché et la substitution pénale du Christ innocent à l’homme pécheur. Mais Irénée a l’idée, et pose les prémisses d’une conclusion que d’autres tireront. L’homme était incapable de se sauver par ses propres moyens ; « il n'était pas possil>le que celui qui était tombé sous le péché opérât son salut. » L. III, c. xvra, n. 2, col. 9 : ^2. C’est la première prémisse. La seconde est tirée de la soulTrance et de la mort que le Christ a endurées pour nous. Il a été l’homme de douleurs annoncé par Isaie, ui-i.ni, « bafoué, tourmenté et à la fin mis à mort, » mai.., comme l’ajoutait le pi’ophètc, nous avons été guéris par ses plaies : « il est évident que cela lui est arrivé par la volonté de son Père pour notre salut. Il est allô volontairement h la mort. » Dem., c. Lxviii-Lxix, p. 710-712. Et Cont. hær., t. V, c. I, n. 1, col. 1121 : Qiioniam Verbum potens et homo verus, sanguine suo ralionabiliter redisnens nos, ledempiionem semeplisum dédit pro his qui in captivitatem ducti sunt. « De ces deux prémisses la conclusion logique, dit fort bien J. Chaîne, Le Christ rédempteur d’après saint Irénée, Le Puy, 1919, p. 87-88, étant donnée notre solidarité avec le Sauveur, est que Jésus a pris notre place et a olTcrt à Dieu pour nous la véritable expiation. Mais saint Irénée ne pousse pas si loin son raisonnement ; il se contente de dire que Jésus a soulîert et est mort pour nous, à notre profit. Si on met cette vérité en regard de l’insuffisance de l’homme à opérer son salut, on a les deux éléments de la substitution ; mais Irénée ne les relie pas entre eux et ne nous montre pas comment ! e Christ expie à notre place. » Il est plus explicite sur la réparation du péché. Le péché consiste dans un déni d’obéissance à Dieu ; la réparation doit consister dans une parfaite obéissance. Irénée revient indéfiniment sur la satisfaction que le Christ olt’re à son Père par la soumission à sa volonté. Il le montre obéissant au désert, triomphant trois fois du tentateur, et soluta est ea quee fuerat in Adam præcepti Dei prævaricatio per præteptum legis quod servavit Filius honiinis, non transgrediens prreceptam Dei. L. V, c. xxT, n. 2, col. 1181. Cf., sur le sens juridique du mot prævaricatio, H. E. Oxenham, Histoire du dogme de In rédemption, trad. J. Hruneau, Paris, 1909, p. 143, n. 3. Surtout le Christ a obéi sur la croix, dissoluens enim eam quæ ab initia in ligna facta fuerat linminis inobedienliam, obediens factus est usquc ad mortem, mortem nutem crucis, eam, qux in ligna facta fneral inobedienliam, per eam qnæ in ligno fuerat obedientiam sanans. L. V, c. xvi, n. 3, col. 1168. Et, parce que nous avons hérité du péché d’Adam, parce que nous sommes solidaires avec lui, avec celle d’Adam il répare toute désobéissance : per obedientiam inobedienliam persnlvens.., sahilem donavit plasmali suo, destruens pcccatum ; mediator Dei et hominum factus, propilians quidem pro nobis Patrem in quem peccai’eramus, et nostram inobedienliam per suam obedieniiam consolalus. L. III, c. xviii, n. 6 ; t. V, c. xvii, n. 1, col. 937, 1169.

L’homme pécheur, en même temps qu’il avait contracté une dette envers Dieu, avait perdu les biens

surnaturels. Le Christ les lui restitue ; c'^st le mérite. 1 A ceux qui croient, qui aiment le Seigneur et qui vivent dans la sainteté, la justice et la patience, le Dieu de tous accordera la vie éternelle par la résurrection des morts, et cela en vue des mérites de celui qui est mort et ressuscité, .lésus-Christ, auquel il a donné la royauté univeuelle et le pouvoir de juger les vivants et les morts. » Dem., c. xi i, p. 690-691. Kt Cont. hxr., t. III, c. xviii, n. 1, col. 932 : Verbun… unitum suo plasmali, passibilem hominem faclum…, ut quod perdideramus in Adam, id est secundum imaginem et similitudinem esse Dei, hoc in Christo Jesu reciperemus. Ici nous pourrions reprendre les textes dans lesquels Irénée montre que, par suite de notre union avec Dieu dans le Christ, la chair est sauvée, l’incorruptibilité et l’immortalité nous sont rendues, l’homme reconquiert la ressemblance divine, redevient fils adoptif de Dieu.

En fin, en péchant, l’homme était tombé, jusqu'à un certain point, au pouvoir du démon et réduit en captivité. Le Christ nous libère ; c’est la rédemption. Le mot « rédemption n ou « rachat » n’est pas pris par Irénée au sens strict d’une rançon à payer à une tierce personne ; nous verrons qu’il n’y a pas à strictement parler, de rançon payée à Satan, et donc, « si l’on voulait pousser la métaphore jusqu’au bout c’est à Dieu lui-même que serait acquitté le prix de notre rachat, car c’est Dieu que l'œuvre rédemptrice apaise et rend propice, mais rien ne permet d’affirmer que la métaphore soit poussée si loin, » pas plus chez Irénée que dans saint Paul. Cf. F. Prat, La théologie de saint Paul, Paris, 1912, t. II, p. 280. En style biblique, « racheter*, c’est il délivrer » ; « sauver ». De même dans l’ancienne littérature patristique. « A une époque où régnait partout l’esclavage, dit J. Rivière, Le dogme de la rédemption. Étude théoiogique, Paris, 1914, p. 193, 11 était assez naturel de se représenter sous cette forme le malheur de l’humanité et, par conséquent, de considérer la délivrance des âmes sous l’image d’un rachat.Voir plus loin, col. 2479. Ainsi les expressions « satisfaction », i mérite », « rédemption », sont à peu pi es synonymes. Ce sont trois métaphores qui expriment l’un ou l’autre des aspects de l'œuvre du Christ. Distinguée de la satisfaction et du mérite, la rédemption désigne la libération de l’homme captif du démon, c’est-à-dire, ainsi que nous l’avons vii, la délivrance du péché : parce que le démon in initio homini suasit transgredi præceptum Facloris, ideo eum habuit in sua potestate ; potestas autem ejus est transgressio, el apostasia, et his colligavil hominem. L. Y, c. xxi, n. 3, col. 1182. CL P. Galtier, Les droits du démon et la mort du Christ, dans les Hccherches de science religieuse, Paris, 1912, t. iii, p. 347349. Tout ce chapitre xxi, qui commence, n. 1, col. 1179, par : Omnia ergo recapilulans recapitulatus est, montre bien ces trois aspects de l'œuvre de salut accomplie par l’effasion du sang du Christ. Ils y apparaissent dans une série de textes fort remarquables, par exemple, n. 2, col. 1 1 80, 1181 : Pr.Tcepium ejus perfecit Dominus, factus ex muliere, el destruens adversarium noslrum (rédemption), el perpeiens hominem secundum imaginem et similitudinem Dei (mérite)… ; et solula est ea, quæ fuerat in Adam, pracepti Dei pnvvaricatio, per præceptum legis quod servavit Filius liominis non transgrediens præceptum Dei ^satisfaction). A neuf reprises, n. 2-3, col. 1179-1182, Irénée souligne l’obéissance du Christ rédempteur au précepte du Père. Arrêtons-nous à ce point de vue, qui complète toute l’exphcation possible du mystère.

3. Du côté de Dieu.

Deux attributs diviuo expliquent la Passion rédemptrice : ce sont la bonté et la sagesse de Dieu.

a) La bonté de Dieu. — Irénée met en rel’ef la bonté divine. Il n’y a pas de Dieu où il n’y a pas de bonté.