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IRENEE (SAINT)


qui est unie et formée, de l'âme qui est enlre les deux. » L. V, c. IX, n. 1, col. 1144. Irénce ne parle pas de tous les hommes, mais de l’homme parfait, de celui qui est en état de grâce. T. a preuve, c’est qu’il ajoute aussitôt : " L'âme suit quelquefois l’esprit et est élevée par lui ; quelquefois elle suit la chair et devient esclave des passions sensibles. Or, tous ceux qui n’ont pas le principe qui sauve et informe, et qui n’ont pas l’unité, sont et s’appellent justement chair et sang, car en eux ils n’ont pas l’esprit de Dieu. Le Seigneur a dit qu’ils sont morts, car ils n’ont pas l’esprit qui vivifie l’homme. » Voir la suite du chapitre, n. 2-4, col. 11441147. Une preuve encore, entre plusieurs autres, est ce qu’il écrit de la résurrection générale, t. II, c. xxxiii, n. 5, col. 834 : « Tous ceux qui ont été désignés pour la vie (éternelle) reprendront leur corps propre, leur âme propre, leur esprit propre, dans lesquels ils ont plu à Dieu, tandis que ceux qui méritent le châtiment iront le recevoir en leur âme propre, en leur corpspropre, dans cette âme et dans ce corps qu’ils ont détournés de la grâce de Dieu, » in quibus abstilerunt u Dei bonilale, d’après la traduction, aTTÔ ty^ç toîj ©soù yâpiToç porte l’original. Cf. A. Dufourcq, S’ai/]/ Irénéc (collection Les saints), p. 163-164.

Adam fut élevé à cet état surnaturel. Vérité capitale, ainsi que celle de la déchéance de cet état, qu’Irénée développe surtout de façon indirecte en traitant de la récapitulation par le Christ, qui restitua au genre humain ce qui avait été perdu en Adam, mais qu’il indique aussi directement avec une netteté suthsante. Il le fait, en particulier, quand il s’inspire du Faciamus homincm ad imaginem et simililudinem noslram sans le citer, quand il le cite et le commente. L'étude des passages d’Irénée relatifs à ce verset de la Genèse nous a démontré que si, une fois, il y trouve la simple ressemblance avec Dieu par la possession de la liberté et l’usage de la raison, il y aperçoit d’hal>itude ou, dans l’imago, la ressemblance par les biens naturels, et, dans la siniilitudo, la ressemblance par les biens surnaturels, ou, dans l’une et l’autre, l’image et la ressemblance divines par la grâce. Il ramène l’image et la ressemblance divines, quand il parle du « Fils de Dieu, existant toujours auprès de son Père, qui s’est incarné et, fait homme, a récapitulé en lui la longue suite des hommes, et, résumant en lui l’humanité, nous a donné le salut, afin que nous recouvrions dans le Christ Jésus ce que nous avions perdu en Adam, a savoir d'être à l’image et à la ressemblance de Dieu. > L. III, c. xviii, n.l, col. 932. Les formules analogues se pressent sous la plume d’Irénée. Le Christ nous a rendu l’adoption surnaturelle d’enfants de Dieu, t. II, c. XI, n. 1 ; L III, c. xix, n. 1 ; c. xx, n. 2 ; t. IV, c. 1, n. 1 ; t. V, c. xii, n. 2, col. 737, 939, 943, 975, 1152, non la simple filiation naturelle, qu’Irénée déclare commune à tous de par la création, secimdum naturam quee est secundum condilioncm, ut ila dicam, omnes filii Dei suinus, proptcr quod a Dco omncs facti sumus. L. IV, c. xLi, n. 2-3 ; l V, c. xviii, n. 2, col. 1115-1117, 1173 ; Dcm., c. iii, col. 662. Il a été « médiateur entre Dieu et les hommes, étant avec tous deux chez lui, aliii de rétablir entre eux l’amitié et laconcorde, afin de placer rhoiiiiue près de Dieu, afin de faire connaître Dieu à l’homme. Conunent aurions-nous pu participer à l’adoption lihale, si le Fils ne nous avait pas donné communion avec lui ?… Et c’est pourquoi il a traversé tous les âges rendant à chacun la communion avec Dieu. » L. III, c. xviii, n. 7, col. 937. Par le Christ nous sommes redevenus lils adoptifs de Dieu, ses amis. L. III, c. xix, n. 1 ; c. XX, n. 2 ; t. IV, c. xiii, n. 4 ; c. xl, col. 939, 943, 1009-1010, 1112-1114. Nous sommes parfaitement unis à Dieu. L. IV, c. xx, n. 4 ; t. V, c. i, n. 1, col. 1034. 1121 ; Dvm., c. vi, xxxi, xl, p. 664, 683, 689. Nos corps sont les temples de Dieu, du Christ, de l’Esprit Saint, « des temples purs qui charment l’Esprit de Dieu, comme l'épouse charme l'époux. » L. III, c. xvii, n. 3 ; I. V, c. VI, n. 2 ; c. viii, n. 1 ; c. ix, n. 3 ; c. xii, n. 2 ; c. xiii, n. 4, col 930, 1138-1139, 1141, 1145, 1153, 1159. Par le Christ, « notre lot permanent et continuel est de participer à la vie divine et de nous élever au dessus des choses terrestres. » Dcm., c. iii, p. 662.

Avec le don proprement surnaturel, la grâce, Adam reçut des biens préternaturels. Irénée fournit sur ce point, à défaut d’une thèse rigoureuse comme on la rencontre chez les théologiens modernes, d’utiles indications. Il n’attribue pas à Adam la science parfaite, ou presque parfaite, que lui ont prêté des théologiens. Adam, enseigne-t-il, fut créé enfant, Cont. hær., 1. IIl, c. xxii, n. 4 ; t. IV, c. xxxviii, n. 1, col. 959, 1105 ; Dem., c. XII, p. 668, ce qu’il entend surtout d’une enfance spirituelle, Adam n'étant pas confirmé en grâce, voir Adam, t. i, col. 370, mais aussi d’une certaine enfance intellectuelle et physique : « L’homme était un enfant : il n’avait pas encore le parfait usage de ses facultés, » lisons-nous, Dem., c. xii, p. 668, et, Cont. hær., col. 959 : Paulo ante facti, non intellectum lutbebant filionim generationis, oportebat enim illos primo adolescerc, dehinc sic mulliplicari. Mais si, tandis que les animaux « étaient dans toute leur force, le maître, c’est-à-dire l’homme, était encore petit.., pour qu’il piit vivre et croître dans la joie et le bien être Dieu lui avait préparé » le paradis terrestre. « Le Verbe deDieu s’y rendait tous les jours, s’y promenant, s’entretenant avec l’homme des choses de l’avenir, et s’appliquant avant tout à lui faire comprendre qu’il habiterait et s’entretiendrait avec lui, et qu’il demeurerait avec les hommes pour leur enseigner la justice. » Dem., p. ()68. Adam et Eve furent créés exeinpts de la concupiscence. « Ils étaient nus et ils ne rougissaient pas, car ils étaient innocents et n’avaient que des pensées pures comme celles des enfants. IHien n’entrait dans leur esprit et leur intelligence qui pût faire naître dans l'âme des désirs mauvais et des mouvements lionteux. C’est qu’alors ils gardaient l’intégrité de leur nature, car ce qui leur avait été insufflé au moment de la création était un souftle de vie. Or, tant que ce souffle conservait son intensité et sa force, il mettait leur pensée et leur esprit i-i l’abri du mal. » Dem., c. xiv, p. 669. Ce passage laisse entendre qu’Adam et Eve, s’ils étaient restés fidèles, auraient gardé l’immunité de la concupiscence. Le Contra hæreses, au contraire, semble supposer que l’exemption de la concupiscence tint à la condition d’enfants où ils furent créés et que la fougue de la concupiscence aurait coïncidé avec la perte de Vindolem et puerilem sensum. Cꝟ. t. III, c. xxii, n. 4 ; c. xxiii, n. 5, col. 959, 963. Encore est-il possible que, s’attachant à décrire l’homme historique, Irénée songe à dire ce qui fut, non ce qui se sérail produit si Adam et Eve n’avaient pas désobéi. L’immunité de la douleur concédée à nos premiers parents est affirmée d’un mot, t. V, c. xv, n. 2, col. 1165 : proptcr inobedienlix peccatum subsecuti sunt languorcs hominibus. CL l. III, c. xxiii, n. 3, col. 962 ; Dem., c. xvii, p. 671. Enfin, Adam et Eve étaient immunisés contre la mort. « Dieu traça quelques limites à Adam, afin que, s’il gardait les commandements divins, il pût resler toujours dans l'état où il était, c’est-à-dire immortel, tandis que, s’il n’y restait pas fidèle, il devînt sujet à la mort. » Dem., c. xv, p. 670. Irénée nomme presque toujours à la suite « l’incorruptibilité » et « l’immortalité » sans les distinguer explicitement. Mais cette distinction se dégage de ses textes. « Il ne les sépare pas plus que le péché et la mort ; entre elles, comme entre ceux-ci, existe un rapport de cause à effet. De même que le péché engendre la mort, l’incorruptibilité engendre l’immortalité. » J. Chaîne, Le C/im/ r^denip 1