Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.2.djvu/595

Cette page n’a pas encore été corrigée
2439
2440
IRENEE (saint ;


membres. En elle (P.'Batifîol, L'Église naissante et le catholicisme, p. 247, n. 4, propose de lire in ea, entendu de l'Église, au lieu de in eo que porte le texte de Massuet et qui se rapporte à hoc enim Ecclesiæ creditum est Dci mnnus) a été déposée la communication du Christ, c’est-à-dire l’Esprit Saint, arrhes de l’incorruptibilité, confirmation de notre foi, échelle de notre ascension à Dieu. Car dans l'Église Dieu a établi… toute l’opération de l’Esprit. Ubi enim Ecclesia ibi et Spirilus Dei, et ubi Spirilus Dei illic Ecclesia et omnis (jratia ; Spirilus autem writas. » Ce n’est pas tout à fait la définition du concile du Vatican ; c’en est la préparation. L'Église possède le charisme de la vérité, charisma veritatis certum. L. IV, c. xxvi, n. 2, col. 1053. Cf. H. Bôhmer, Zu deni Zeugnisse des Irenaus von dem Ansehen der rômischen Kirche, dans la Zcitsehrijt fiir ncutesiam’jntliche Wissenscha/t, Gicsscn, 1906, t. vii, p. 193-201 ; U. Mannucci, dans lu Rivista storico-critica délie seienie teologiche, Rome, 1907, t. iii, p. 699-700. Le mot veritatis et fldei nanquam deficientis charisma se lit dans le concile du Vatican, const. Pastor œternus, sess. IV, c. m. Cf. Denzinger-Bannvart, Enr.hiridion, n. 1837.

Tout cela étant, l'Église est lu critère suprême de la vérité, la règle de foi ultime. Pas de règle de la vérité possible chez les hérétiques qui suivent leurs pensées propres, leurs opinions particulières et aboutissent, de la sorte, à une incroyable diversité de doctrines. L. III, c. xii, n. 6, col. 898. « La prédication de la vérité, la règle de notre salut, la voie qui mène à la vie, les prophètes l’ont annoncée, le Christ l’a établie, les apôtres l’ont transmise, partout l'Église l’oflre à ses enfants. « Dem., c. xcviii, p. 730. « Là donc où ont été placés les charismes du Seigneur, c’est là qu’il faut apprendre la vérité, chez ceux qui ont dans l'Église la succession apostolique… Ils gardent notre foi au Dieu unique, créateur de toutes choses ; ils augmentent notre amour pour le Fils de Dieu, qui pour nous a disposé de si merveilleuses choses ; ils nous exposent les Écritures sans péril d’erreur, sans blasphémer Dieu, sans insulter les patriarclies, sans mépriser les prophètes. » Conl. hier., t. IV, c. xxvi, n. 5, col. 1056. Non oportet adhuc quærere apud alios veritatem quam facile est ah Ecclesia sumere, cum apostoli, quasi in depositoriam dives, plenissime in eam contulerint omnia qusa sint veritatis, uti omnis quicumque velit sumat ex. ea potum vilse. L. III, c. iv, n. 1, col. 855.

5. Nécessité d’appartenir à l'Église. — Elle découle de tout ce qui précède, notamment de l’Ubi Spirilus Dei illic Ecclesia et omnis gratia, Spirilus autem Veritas

Être hors de l'Église, c’est être hors de la vérité, omnes cos qui sunt extra veritatem, id est qui sunt extra Ecclesiam. L. IV, c. xxxiii, n. 7, col. 1076. Quotquot autem absistunt ab Ecclesia…. vere a semetipsis sunt damnati. L. I, c. xvi, n. 3, col. 633. Et, t. IV, c. xxvi, n. 2, col. 1054 : Omnes autem hi deciderunt a veritatc. E' hxretici quidem…. a cœlesti igné comburentur, quemadmodum Nadab et Abiud. Qui vero exsurgunt (contra) veritatem et altéras adhorlantur adversus Ecclesiam Dei rémanent apud inferos. voragine lerræ absorpti, quemadmodum qui cirea Corc, Dathan et Abiron. Qui autem scindunt et séparant unitalem Ecclesiæ eamdem quam Jéroboam pcenam percipiunt a Deo. Cꝟ. t. iii, c. IV, n. 1 ; t. V, c. xx, col. 855, 1177-1178. Hors de l'Église, pas de salut. Elle est la seule mère légitime des fidèles. L. III, c. xxiv, n. 1, col. 966 : Cujus (Spirilus) non sunt participes omnes qui non currunt ad Ecclesiam, scd semetipsos fraudant a vila per sententiam malam et operationem pessimam… Quapropter qui non participant eum, neque a mamillis matris nutriuntur in vitam, neque percipiunt de corpore Christi procedenlin nitidissinuim fonlem. Cf., sur

VEcclesia mater, A. Harnack, Lehrbuch der Dogmengeschichte, 1. 1, p. 373, note ; J. Lebreton, Mater Ecclesia, dans les Recherches de science religieuse, Paris, 1911, t. II, p. 572-573 : P. de L(abriolle), Le style de la lettre des chrétiens de Lyon, dans le Bulletin d’ancienne littérature et d’archéologie chrétiennes, Paris, 1913, t. iii, p. 199 ; P. Galtier, La Vierge qui nous régénère, dans les Recherches de science religieuse, Paris, 1914, t., p. 138 ; H. Leclcrcq, dans le Dictionnaire d’arehéolngir chrétienne et de liturgie, Paris, 1921, t. iv, col. 223r2238. Elle est le paradis du monde présent, le paradis dans lequel on fructifie, hors duquel on n’est bon que pour le feu. L. V, c. xx, n. 2 ; cf. c. x, n. 1, col. 117<s, 1147-1148.

6. L'Église et l'État. — Une théorie complète des rapports entre l'Église et l'État n’entrait pas dans le sujet d’Irénée. Il en esquisse pourtant quelque chose. Lui, contemporain de la persécution de Marc-Aurèle, il parle de l’autorité impériale en des termes qui, pour n’avoir pas la chaleur de ceux des apologistes du iiie siècle, n’en témoignent pas moins d’un respect et d’un loyalisme impeccables. « L’empereur notre maître, » dit-il, t. II, c. VI, n. 2, col. 725. Le pouvoir vient de Dieu, non du démon. L. IV, c. xxxvi, n. 6 ; t. V, c. XXIV, n. 1, col. 1096-1097, 1180-1187 ; cf. Bossuet, Defensio dcclarationis cleri gallicani, part. 1, t. I, sect. i, c. x ; sect. ii, c. m. Œuvres, édit. Lâchât, Paris, 1879, p. 161, 190-191. L’autorité civile a des droits et des devoirs. « Les magistrats qui suivent la justice ne seront pas punis pour ce qu’ils auront prescrit de juste et de légitime ; mais tout ce qu’ils auront fait d’injuste, d’inique, d’impie, contre la loi, à la manière des tyrans, les perdra, le juste jugement de Dieu parvenant également à tous et ne manquant jamais. » L. V, c. XXIV, n. 2, col. 1187. « L’homme, éloigné de Dieu, est devenu furieux^ comme il ne connaissait ^ pas la crainte divine. Dieu lui a imposé la crainte humaine, afin que, soumis aux hommes, contraint par leurs lois, il atteignît quelque justice et quelque modération envers les autres. Le royaume terrestre a donc été constitué pour l’utilité des gentils, par Dieu (non par le diable, qui nunquam omnino quieius est, imo qui ncc ipsas quidem gentes vult intranquillo agere), en telle sorte que, craignant l’autorité, les hommes ne se mangent pas entre eux vice piseium, mais par la vigueur des lois repoussent la multiple injustice des gentils. Et, en cela, ceux qui exigent de nous les tributs sont, d’après le mot de saint Paul, Rom., xui, 6, Us ministres de Dieu et le servent. » L. V, c. xxiv, n. 1, col. 1187. Irénée assimile les princes à des agents de police ; « un peu plus il dirait que les princes sont faits pour les seuls païens, comme chez nous les agents de police servent seulement à maintenir les coquins en respect. » Était-ce là, au fond, l’idée de saint Irénée, connexe avec son millénarisme qui lui aurait fait regarder l’empire « comme une construction provisoire destinée à s'écrouler bientôt pour laisser la place au règne du Christ et des élus ? » P. Allard, Histoire des persécutions pendant la première moitié du il Je siècle, Paris, 1886, p. 152. Peut-être. En tout cas, la phrase suivante, n. 3, col. 1187-1188 : Cujus jussu homines nascuntur hufus jussu et reges constiluuntur apti his qui illo tempore ab ipsis regnantnr, formule heureusement la thèse de l’origine divine du pouvoir. Jamais Irène e n’a, à la différence d’autres partisans du millénarisme, une parole de colère ou de résistance contre l’autorité impériale. Et même il vante, dans un chapitre fort curieux, t. IV, c. xxx, n. 3, col. 1060, les bienfaits de la civilisation romaine : « par les Romains le monde a la paix et nous pouvons sans crainte voyager pai terre et par mer partout où nous voulons. » Voir les textes d' Irénée dans E. Preuschen, Analekta. Kiirzere Texte zur Geschichte der alten Kirche und des Kanons,