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IMPOSITION DES MAINS


ad cxlum. P. L., t. lhi, coî. 8 ; Corpus de Vienne, p. 44.

Telle est aussi la seule interprétation que donne de la chrismation saint Maxime de Turin, qui ne dit pas un mot du Saint-Esprit : Impleto baptismale, caput vestrum chrismate, id est, oleo sanctiflcationis. infundimus, per quod oslenditur baptizatis regalem et sacerdotalem conferri a Domino dignitatem. Tract. III de baptismo, P. L., t. Lai. col. 777-778. Et il poursuit, en rappelant, suivant l’usage, l’onction des prêtres et des rois dans l’ancienne loi, et la translation, dans la nouvelle, à tous les chrétiens, de la dignité royale et sacerdotale.

Mêmes idées dans saint Germain de Paris. Elles transparaissent à travers les débris de sa seconde lettre. Le chrême lui rappelle l’onction mystérieuse du Christ et les onctions de l’Ancien Testament : Oleum quod cum chrisma benedicitur, voce psalmi (xLiv, 8) ostenditur, qui de Christo profertur : Unxit te Deus de oleo leetitiæ præ consortibus luis, vel illud (Ps. Lxxxviii, 21) : Olto sancto meo linui enm. Prias ergo ungebantur veteres oleo, sic per/undebantur unguento. Epist., ii, P. L., t. lxxii, col. 95. L’auteur de cette Expositio ne décrit pas d’ailleurs les cérémonies du baptême. Les paragraphes qui suivent, col. 96, ne visent que l’onction des calécliumènes. Cf. sur cet ouvrage Mgr Batiïtol, Études de liturgie et d’archéologie chrétiennes, p. 276.

L’auteur du De septem ordinibus Ecclesise, que dom Morin, Études, textes, découvertes, t. i, p. 23, date de la première moitié du ve siècle, a pareillement présentes à l’esprit ces connexions traditionnelles. Les trois mots chrisma. Christi, christianus, sont à ses j’eux dans le rapport le plus étroit : In corporc ejus [Christi] chrisma est… Ad episcopum pertinet chrisma [conficere], quia ipse est Christus christianorum, id est sanctus sanctorum… secundum quod scriptum est : Nolite tangerc christos mcos. P. L., t. XXX, col. 156, 158. Et cela suffît à indiquer la signification qu’il attribuait à la chrismation. Nul doute qu’avec tout l’Occident il ne fît écho à la parole classique de saint Cyprien : Ungi quoque necesse est eum qui baptizatus est, ut, accepta chrismate, id est unctione, esse unctus Dei possit.

Et le même écho nous est renvoyé par saint Éloi, HomiL, viii, ; /î die cœnæ Domini. Transcrivant saint Augustin, De Trinitate, xv, 26, 46, P. L., t. xlii, col. 1093, il parle longuement de la grâce du Saint-Esprit, quam désignai nmlerialis olei unclio qua corporalilcr unguntur fidèles, et du don de grâce, qui fut dans le Christ par suite de l’incarnation et qui visibili signiftcatur unguento quo baptizalos ungit Ecclesia, P. L., t. Lxxxvii, col. 623, 624 ; mais l’action du Saint-Esprit évoquée ainsi à son esprit par l’huile visible est celle de l’incarnation et de la rémission des péchés dans le baptême ; pour lui, comme pour son modèle, l’onction baptismale correspond uniquement au mystère qui valut au Fils de Dieu son nom de Christ et le fit unctus Deus, quia et homo Deus, ibid., col. 624 ; et pour tous deux cette première descente de l’Esprit sur lui est essentiellement distincte de celle du.Jourdain à laquelle correspond la donation principale du Saint-Esprit dans l’Église. Ibid.

Aussi bien les conciles de la Gaule suffiraient-ils à établir le sens donné dans cette contrée comme dans tout l’Occident à la chrismation et à montrer qu’on la rattachait au baptême. D’après un canon que la collection de Burchard attribue au concile de Tours (le 401, le sacrum chrisma est illud unde Christo incorjwramur, et unde omnes fidèles sanctificantur, unde reges et sacerdotes inunguntur, Mansi, t. vii, col. 949, et l’on ne saurait mieux condenser en quelques mots le sens attaché partout à la chrismation depuis Ter tullien. Le canon 2 du concile d’Orange en 441 fait plus. Il montre la chrismation normalement inséparable du baptême et précédant comme lui la confirmation. Le te.xte en est fort connu : la dernière partie a donné lieu à d’interminables discussions ; ce n’est pas ici le lieu d’en établir le sens, nous l’avons fait dans la Revue d’histoire ecclésiastique de Louvain, t..kiii, 1912, p. 296 sq., 375 ; mais la première partie, la seule qui nous intéresse, est fort claire : Nullum ministrorum, y est-il dit, qui baptizandi recepit officium, sine chrismate usquam deberc progredi, quia inler nos placnit semel chrismari. De eo autem qui in baptismale, quacumque necessitate faciente, non chrismatus fuerit, in confirmatione sacerdos commonebitur. Mansi, t. ^^, col. 435. Donc quiconque est chargé de baptiser, diacre ou prêtre, doit joindre toujours la chrismation au baptême. Mais si cependant, pour un motif quelconque, cette chrismation avait été omise, il faudrait en prévenir le prêtre au moment de la confirmation.

Il saute aux yeux que cette dernière prescription suppose l’administration de la confirmation régulièrement et longuement séparée de celle du baptême : on aura là une occasion toute naturelle de signaler, s’il y a lieu, l’omission de la chrismation. Celle-ci, en effet, dans la pensée du concile, est manifestement une cérémonie normalement rattachée au baptême, obligatoire en principe pour tous les baptisés, et dont l’omission au moment du baptême ne saurait être qu’exceptionnelle. Son intention est sans doute qu’on profite de la confirmation pour y suppléer en cas d’omission ; mais, quel que soit son but, toujours est-il que la confirmation, loin d’avoir cette suppléance comme objet propre et unique, est prévue, au contraire, comme une cérémonie postérieure normalement au baptême et par suite totalement distincte de la chrismation ; celle-ci, quand elle y est jointe, ne l’est qu’exceptionnellement.

Voilà donc très nettement attestée pour la Gaule, dès le milieu du vie siècle, la séparation normale et totale des deux sacrements. Les prêtres et les autres ministres du baptême conféraient couramment et régulièrement la chrismation. La confirmation, réservée à l’évêque, n’était administrée qu’après coup. Cet usage d’ailleurs était assez général en Occident : bien des chrétiens, dans les bourgs et les campagnes, baptisés, non sine chrismate, par les prêtres ou les diacres, mouraient avant la visite de l’évêque qui leur eût imposé les mains pour leur communiquer le Saint-Esprit. Aussi le pape saint Grégoire recommandait-il à l’évêque de Spolète, et à celui de Clusium, Jiiflé. n. 1693 ; P. L., t. Lxxvii, col. 662 et 1103, d’aller dans les diocèses voisins, assurer le bienfait de la confirmation à ceux qui avaient déjà reçu le baptême. Le Vénérable Bède rapporte que l’évêque saint Cutbert parcourait son diocèse pour » imposer les mains nuper baptizatis » et leur donnait ainsi le Saint-Esprit. Vita S. Cutberti, 29, P. L., t. xciv, col. 769. Le biographe de saint Bonnet, évêque de Clermont d’Auvergne (691-701) nous le montre également qui s’arrête en plein chemin pour donner la confirmation par l’imposition des mains. Acta sanctorum, januarii t. i, p. 1072. Et le premier concile national germanique réuni à l’époque de saint Boniface (742 ?), parlant de la visite pastorale faite par les évêques pour confirmer leurs diocésains, atteste à sa manière que les prêtres baptisaient, mais ne donnaient pas la confirmation. A la fin du xme siècle, en particulier, l’usage en Gaule était de ne donner la confirmation à ceux qui avaient été baptisés le samedi saint que le dimanche in albis : Tune maxime, dum alba tolluntur baptizatis vestimenta, per manus imposilionem a paiHificc Spiritum Sanctum accipere