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IRENEE (saint :

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cliances pour que Vin secundo ad Corinthios, qui se lit plus loin, t. iii, c. vii, n. 1, col. 864, soit également du traducteur. Ce qui invite à le croire, c’est que, t. III, c. xiii, n. 5, S, col. 925, 927, les expressions : Joanncs… in epistola sua, Joannes in prædida epislola, et rursus in epistola, rursus in epistola clamai (cette fois nous avons l’original : èv tî] ètticttoXy) <pY)cî). désignent, la seconde fois, la II « lettre de saint Jean, et les trois autres fois la P* lettre. C’est donc que les Épi très homonj’mes n'étaient pas distinguées. Dans Gal., iii, 5, Irénée, t. III, c. xiii, n. 3, col. 912, supprime la négation : neque ad horam cessimus, admise par Marcion et les principaux manuscrits et réclamée par le contexte. Cf. A. d’Alès, La théologie de TertulUen, Paris, 1905, p. 240-241. Cf., sur quelques autres citations, F. R. M. Hitchcock, Irenacus of Lugdnnum, p. 353-357.

3. L’interprétation des Écritures. —

Si, dans les choses humaines, tout ne nous est pas connu, il n’est pas étonnant que les Écritures, toutes spirituelles, nous échappent en partie. Il faut se contenter de ce que nous atteignons et, pour le reste, s’en remettre à Dieu et pour ce monde et pour le monde futur, en telle sorte que Dieu enseigne toujours et que l’homme apprenne toujours ce qui est de Dieu. L. II, c. xxvra, n. 3, col. 805-806. Un esprit sain, ferme, religieux et ami de la vérité, que Dieu a livrée au pouvoir des hommes et soumise à notre science, est celui qui profitera. Il ne faut pas expliquer l’obscur par l’obscur, mais par ce qui est clair. Et donc les paraboles, qui sont susceptibles de sens divers, ne doivent pas être adaptées à des choses douteuses au gré des rêveries de chacun, sinon il n’y a pas de règle de vérité possible, mais autant de prétendues vérités contradictoires que de fabricateurs de dogmes, et l’homme, cherchant toujours, ne trouvera jamais eo quod ipsam inventionis abjeccrit disciplinam. L. II, c. x, n. 1 ; c. xxvii, col. 735, 802-804. Mieux vaut l’ignorance aimante que des prétentions scientifiques impies.L. II, c. xxvi, n. 1, col. 800. Pour coniiaître Dieu, il n’y a pas à jongler avec les nombres, les syllabes et les lettres, mentionnés par l'Écriture, car on peut leur faire dire tout ce qu’on veut, mais à rapporter les nombres et tout ce qui a été fait à la doctrine de vérité, non enim régula ex numeris sed numeri ex régula nec Deus ex factis sed ea quæ. facta sunt ex Deo. L. II, c. xxv, n. 1, col. 798 ; cf. c. xx-xxvi, col. 776-802. Défense encore de combiner des textes épars et disparates et de les détourner de leur sens naturel ; respect du sens naturel et attachement au texte. L. I, c. ix, col. 537-550. Tenir compte des procédés de style, par exemple, des hyperbates dont saint Paul use fréquemment propter velocitatem sermonum suorum et propter impctum qui in ipso est Spiritus. L. III, c. vii, n. 1-2, col. 864-865. Tenir compte aussi de la ponctuation. Ibid. En un mot, i avoir pour règle la vérité même. » L. II, c. xxviii, n. 1, col. 804.

Tout cela est sagesse. Ce n’est pas que, dans le détail, Irénée ne se soit trompé plus d’une fois. Précisément dans le chapitre où il dehiande de tenir compte des procédés de style, Irénée voit une hyperbate là où elle n’existe pas. Cf. A. d’Alès, La théologie de TertulUen, p. 247 ; J. Tunnel, Histoire de la théologie positive depuis l’origine jusqu’au concile de Trente, Paris, 1904, p. 16. Çà et là son exégèse p(Ul s 'inbler aventureuse, par exemple, quand, d’accord avec laui d’autres, il voit des anges dans les « fils de Dieu » de Gen., vi, 2. Nous retrouverons le texte sur l'âge du Christ, t. II, c. xxii, n. 3-6, col. 782-786, où il conclut bien, de saint Jean, que le ministère public a duré plus d’une année, mais mal que le Christ mourut vers cinxjuante ans. Mais pour ce dernier point il invoque la tradition des presbytres d'.^sie. Ne pourrait-on pas surtout lui reprocher de tomber dans des travers qu’il condamne chez les gnostiques, d’abuser de l’allégorisme, d’accorder trop d’importance aux nombres, de subtiliser à l’excès ? La critique ne serait pas tout. à fait injuste, à condition toutefois de s’appuyer sur le sens véritable du texte irénéen. Quand J. Pédézert, Le témoignage des Pères, Paris, 1892, p. 213, dit qu’Irénée semble avoir pour le nombre cinq « une préférence fondée sur l'Écriture, » et cite, en preuve, t. ii, c. xxiv, n. 4, col. 794, il ne s’est pas aperçu qu’Irénée affirme seulement que l’usage des nombres par les gnostiques n’est pas justifié, et que tout autre nombre dont ils ne se servent pas, par exemple, cinq, si on admettait leurs procédés d’exégèse, paraîtrait avoir une grande valeur d’après l'Écriture, et alla quoque multa millia hujusmodi et in hoc numéro et in quo quis voluerit sive ex Scriptura sive ex subj’acentibus naturse operibus coUigere potest, col. 795. Mais ailleurs, par exemple, t. V, c. XXIX, n. 2, col. 1202-1203, il attribue aux nombres une valeur de signification fantaisiste. Et, un peu partout, partant de cette idée très juste que l’Ancitn Testament est la figure dy Nouveau, que « le Christ est le trésor caché dans les Écritures, que signifiaient les types et les paraboles, » il en fait — lui et d’autres Pères — une application inconsistante et tout au plus valable contre les gnostiques comme argument ad hominem. Où il excède encore, c’est quand, sous le couvert d’un presbytre et sous le prétexte que rien n’est inutile dans l'Écriture et que, là où elle raconte sans blâme des choses inexcusables, nous ne devons pas devenir accusateurs, sed typum quærere, il excuse Lot et ses filles, Gen., xix, 31-38, en ce que per verba earum signiftcabatur neminem esse alterum qui possit flliorum generalionem majori et minori synagogæ priestare quam Patrcm nostrum. L. IV, c. xxxi, n. 2, col. 1 069. Nous verrons tout à l’heure que cet allégorisme intempérant a été influencé, sinon produit, par la notion défectueuse qu’avait Irénée de l’inspiration de l’Ancien Testament. Les gnostiques n’avaient pas à s’en plaindre, car il était conforme à leurs principes. Et Irénée avait autre chose que ces allégories ténues. Son procédé le plus habituel de démonstration fut aussi simple qu’efficace. Il consista à rapporter les textes de l’Ancien Testament cités parles auteurs inspirés, ainsi que les endroits où Notre-Seigneur avait invoqué l’autorité des Écritures et à montrer aux gnostiques, opposant le Dieu de l’Ancien Testament et celui du Nouveau, que le Sauveur lui-même et les apôtres identifiaient le Dieu créateur avec le Dieu rédempteur, et qu’ainsi le dualisme gnostique, qui se réclamait de l'Écriture, était condamné par elle.

Ajouterons-nous que les protestants allégueraient à faux saint Irénée pour soutenir que l'Écriture se suffit, qu’elle est parfaitement claire ? Il en est qui l’ont prétendu, tel P. du Moulin, Le bouclier de la foij, Sedan, 1621 ; cf. J. Jaubert de Barrault, Bouclier de la foy catholique, Paris, 1626, t. i, p. 177-179 ; tels encore Grabe, cL P. G., t. vii, col. 255-256, et, plus récemment, des auteurs attardés l’ont répété, tel F. Bonifas, Histoire des dogmes de l'Église chrétienne, publiée par C. Bois, Paris, 1886, 1. 1, p. 227, qui appelle Irénée « le représentant le plus fidèle du principe protestant. » Cont. hær., t. II, c. xxvii, n. 2, col. 803, ne signifie pas, ainsi que le paraphrase F. Bonifas, p. 226 : « Le sens des Écritures est facilement intelligible pour tout esprit droit et simple. S’il est des passages obscurs, ils s’expliquent par d’autres plus clairs, de telle sorte que l'Écriture s’explique par l'Écriture, et n’a besoin, pour être interprétée, d’aucun secours étranger, > Irénée n’affirme pas que toutes les Écritures ont cette clarté — ^il affirme plusieurs fois le contraire, notamment au chapitre suivant, c. xxviii, col. 804-812 — mais qu’elles enseignent avec cette clarté que le Dieu unique a fait toutes choses par son Verbe. F, Bonifas, p. 227, cite de la S