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IMPOSITION DES MAINS


marquée du Saint-Esprit, pour autant qu’on s’est préoccupé jadis de distinguer dans les cérémonies de l’initiation clirétienne deux sacrements proprement dits, a toujours été rattachée, en Occident, non pas à la confirmation, mais au baptême. Pour s’en rendre compte, il n’y a d’abord qu'à jeter un coup d’oeil sur le tableau précédent. La chrismation a constitué partout avec l’ablution un groupe naturel que, dans les liturgies romaine et milanaise tout au moins, une cérémonie intermédiaire, la vèture des habits blancs, et en plus à Milan le lavement des pieds, séparaient de l’imposition des mains de l'évêque. En outre, les formules qui l’accompagnent présentent toutes le mcine trait essentiel : après la rémission des péchés obtenue par le baptême, l’onction est le « signe du salut pour la vie éternelle, a Les commentateurs de la liturgie baptismale lui donnent le même sens : TertuUien, saint Ambroise et saint Isidore de Séville sont d’accord pour y reconnaître l’onction royale et sacerdotale conférée à tout baptisé par le fait de son incorporation au Clirist. Pour les Églises d’Espagne où la cérémonie intermédiaire de la vêture des habits blancs fait défaut et où, d’après le Liber ordinum, l’enfant plongé nu dans la piscine était rhabillé avant de recevoir l’onction, le parallélisme des formules et des interprétations suggère de rattacher l’onction au baptême : on n’a pas connaissance qu’elle ait été jamais rattachée à la confirmation.

Église d’Afrique. — Les attestations des écrivains ecclésiastiques permettent d’ailleurs, à elles seules, de résoudre le problème. Aucun doute n’est possible, pour l'Église d’Afrique. Voir La consignation à CarIhage et à Rome, loc. cit., p. 352-358. Tertullien dit trop clairement, De baptismo, 8, que ce n’est qu’après la chrismation qu’on impose les mains pour appeler le Saint-Esprit : dehinc, manus imponitur per benedictionem advocans et invitans Spiritum Sanctum. Saint Cyprien, dans toute sa polémique contre le pape saint Etienne, suppose que l’onction est rattachée au baptême : Rome ne la réitère pas aux convertis de l’hérésie, et l'évêque de Garthage demande pour elle comme pour l’ablution comment on peut en admettre la validité chez les hérétiques. Pas plus que le baptême elle ne saurait avoir de valeur que par la communication du Saint-Esprit, et puisque, néanmoins, on renouvelle l’imposition des mains pour communiquer le Saint-Esprit aux hérétiques convertis, on suppose donc qu’ils ne l’avaient pas reçu et l’on se met ainsi en contradiction. Or une telle argumentation suppose à la fois et qu’on prend parti pour ou contre la réitération de l’onction en prenant parti pour ou contre celle de l’ablution, et que, aux yeux de saint Cyprien, le rite propre de la collation du Saint-Esprit spéciale à la confirmation ne comporte pas la chrismation. Voir l’article cité plus haut et l’adhésion donnée à cette démonstration, par dom de Puniet dans la Revue d’histoire ecclésiastique, Louvain, 1912, t. xiii, p. 453.

Il en était encore de même, en Afrique à l'époque de saint Augustin. Lui et saint Optât affirment que l’onction suivait l’ablution et précédait l’imposition des mains. Voir plus haut, col. 1358. La signification de l’onction aussi, nous l’avons vii, restait la même à leurs yeux. Saint Optât, vii, 4, lui reconnaît comme effet propre de préparer l'âme à recevoir le Saint-Esprit, qui, pour répondre à l’invitation faite ensuite par la prière de l’imposition des mains, de venir habiter dans l'âme, attend que le séjour lui en ait été ainsi rendu agréable. Oleuni simplex est et nomen suum unum et proprium habet ; confectum jam chrisma vocatur, in qiio est suavitas, quæ cutem conscientiæ mollit, exclusu duritia peccatorum ; animum innovât lenem,

    1. SEDEU SPIRITVI SANCTO PARAT##


SEDEU SPIRITVI SANCTO PARAT, Ut INVITATUS ILUC,

asperitate /ugata, libentvr inhabitare dignctur. Corpus de Vienne, p. 175. C'était déjà la pensée de Tertullien : le baptême et l’onction précèdent, et alors, tune ille Sanctissimus Spiritus super emundata et bencdicta corpora libens a Pâtre descendat. De baptismo, 8. Saint Augustin, d’autre part, rattache aussi nettement que Tertullien ou saint Cyprien à l’imposition des mains l’etffusion du Saint-Esprit qui continue dans l'Église celle que les apôtres assurèrent aux baptisés de Samarie. A l'égard de la chrismation des hérétiques, il a pris une attitude opposée à celle de saint Cyprien : il a adopté le point de vue romain. Comme saint Optât, iv, 4, Corpus de Vienne, p. 174175, il reproche aux donatistes de la réitérer aux catholiques qui passent chez eux. De baptismo, ii, 10, 21 ; Contra litteras Petiliani, ii, 103, 237 ; 104, 239. Les catholiques, au contraire, ne la renouvellent pas plus que le baptême aux convertis de l’hérésie, tandis qu’ils leur renouvellent (pour le sens, voir Absolution ou confirmation ? la réconciliation des hérétiques, dans les Recherches de science religieuse, juillet 1914, p. 370sq.) l’imposition des mains pour la communication du Saint-Esprit : Propter charitatis copulalionem, quod est maximum donum Spiritus Sancti, manus

hæreticis correctis imponitur Manus impositio,

non sicut baptismus, repeti non potest. De baptismo. V, 23, 33 ; iii, 16, 21, P. L., t. xun, col. 149, 193. Dans le baptême, en effet, dont il dit que, à la différence de l’imposition des mains, il ne saurait être réitéré, il comprend toutes les autres cérémonies qui l’accompagnent. Cela ressort dos paroles citées, mais cela se lit en propres termes dans le court traité De baptismo contra donatistas, édité par dom Wilmart. Revue bénédictine, 1912, p. 157 sq. Comme il n’y a eu qu’un déluge, que ce ne fut qu’après le déluge que le Saint-Esprit descendit sur les eaux sous la forme d’une colombe et que cette colombe revenant à l’arche, n’a porté qu’une fois en son bec une brindille d’olivier, ainsi ce n’est qu’une fois que l’on baptise et que le Saint-Esprit, symbolisé par la colombe, agit par une chrismation symbolisée par la brindille d’olivier : Da mihi secundum diluvium, aut secundam columbam. Vnum diluvium, una columba, unus ramus ; unum baptisma, unus Spiritus, unum chrismatis sacramentum, p. 158. La colombe de l’arche, en n’apportant qu’une fois la brindille d’olivier, condamne le donatiste, car ce rameau est le symbole du chrême : Accusai te illa columba una (ou mieux : uno) contenta gestalorio rami frondentis. Emissa est ilerum de arca, et allerum ramum non reporlavii, quia suffecil ei quod unum semel sub uno sacramento veclavil. Labia columbæ lenentis ramum tanquam duo sunt lestamenta frondosa tenentia chrismatis Christi mysterium. Ibid.

Église de Rome. — De la pratique de l'Église d’Afrique il serait légitime de conclure à celle de l'Église de Rome : on admet volontiers qu’il y a toujours eu entre ces deux Églises concordance liturgique, et l’argumentation de saint Cyprien contre le pape nous a déjà fourni la preuve qu’on n’y renouvelait ni la chrismation ni le baptême, quoiqu’il y fût prescrit de réitérer aux convertis de l’hérésie l’imposition des mains. Si l’on admet d’ailleurs que la Tradition apostolique et les Canons d’Hippolyte représentent réellement l’usage romain, la preuve est évidente. La chrismation y est rattachée au baptême : ce n’est qu’après avoir repris leurs vêtements, que les baptisés sont introduits dans l'Église pour y recevoir le Saint-Esprit par l’imposition des mains. Pour l'époque de saint Augustin, la réponse du pape saint Innocent l^' à l'évêque Decentius est formelle : la chrismation qui suit le baptême n’a aucun rapport avec la confirmation ; elle est faite par le prêtre qui baptise, et c’est par un autre rite réservé à l'évêque que se