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INTERSTICES


d’épreuve prescrit par les canons. > La loi des interstices demeure donc la même dans son fond, nialgi’é des variations de détail ; les décrets de Constantinople sont un écho fidèle de ceux de Sardique.

Une nouvelle infraction notable à la loi des interstices, suivie également d’une condamnation, fut commise dans la première élection du pape Léon VIIL Un concile réuni à Saint-Pierre par l’empereur Othon l" déposa le triste pape Jean XII à cause des désordres de sa vie privée et de sa politique brouillonne, 1 décembre 963. Séance tenante, on élut le protoscriniaire Léon qui n’était encore que laïque. En deux jours il reçut tous les ordres et fut sacré à Saint-Pierre le 6 décembre. Mais à peine l’empereur avait-il quitté Rome que Jean XII y rentra. Lhi nouveau concile se réunit au Latran au début de février 961 qui cassa tout ce qu’avait fait le concile de décembre 963. Jean XII posa à l’assemblée la question suivante :

« Que décidez-vous au sujet de Sico, ordonné par moi

évêque, et qui, sans aucun délai, a ordonné l’employé de la curie, Léon, ce néophyte et ce parjure, portier, lecteur, acolyte, sous-diacre, diacre et prêtre, et l’a ensuite sacré pour ce siège, sans observer les interstices nécessaires ? » Le concile répondit : « Tous deux, celui qui a donné et ce ui qui a recules ordres, doivent être déposés. » Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. IV, p. 813. Le pape prononça, en conséquence, la déposition de Léon et y ajouta la dégradation de ceux qui avaient été ordonnés par lui. Voir Duchesne, Les premiers temps de l’État pontifical, p. 350 ; Hefele-Leclercq, loc. cil., p. 809-815 ; Saltet, Les réordinations, p. 109-171. La déposition de Léon V III ne fut d’ailleurs pas plus durable que ne l’avait été celle de Jean XII : ce dernier mourut le 14 mai 964 ; son successeur, Benoît V, fut déposé presque aussitôt que nommé ; et Léon VIII fut reconnu pape le 23 juin 964. Ainsi non seulement les textes des canons, mais même les faits qui sembleraient en opposition directe avec la loi des interstices montrent que cette loi n’avait pas cessé d’être en vigueur ; ces faits n’étaient souvent qu’une occasion de la rappeler avec quelque sévérité.

Cette revue historique, que nous avons poursuivie jusqu’à la fin du x’e siècle, nous a conduits presque jusqu’à la législation des Décrétâtes. La loi y prendra une forme plus stable et moins sujette aux variations, il nous suffira d’en noter les principaux points.

Les Décrétâtes.

Les règles concernant les interstices sont contenues surtout dans les titres De iemportbus ordinatiomim et qualitale ordinandorum, et De eo qui furtive ordinationem suscepit, Décret. Gregorii IX, lib. I, tit. xi et lib. V, tit. xxx, Friedberg, t. II, col. 118-124 et 834-S35. Les décrets insérés dans ces passages émanent des papes Alexandre III, 11591181, Célestin III, 1191-1198, Innocent III, 11981216 et Honoi-Ais III, 1216-1217. En général, la discipline des Décrétâtes au sujet des interstices se distingue de la discipline antérieure non seulement parce qu’elle y devient plus stable, mais aussi par les points suivants : les quatre ordres mineurs y sont définitivement fixés tels que nous les comptons actuellement ; le sous-diaconat en est séparé et compte désormais parmi les ordres sacrés ; enfin la loi est moins sévère soit sur le nombre, soit sur la durée des interstices.

En voici les principales dispositions : il est permis de recevoir en un seul jour les quatre ordres mineurs, Alexandre III dans les Dfcre/ « /e, s, t. I, tit. xi, c. 3 ; mais on ne doit pas recevoir le même jour les ordres mineurs et le sous-diaconat, Célestin III, ibid., t. V, tit. xxx, c. 2 ; il est également défendu de donner deux ordres sacrés, soit le même jour, soit même deux jours consécutifs, et cela, sous peine de suspense pour l’cvêque violateur de la loi, Célestin III, ibid., t. V, tit. xxx,

C.3 ; Innocent III, ibid., 1. I. tiC xi, c. 13 ; Honorius III, ibid., I. I, tit. XI, c. 15.

Le concile de Trente.

Les interstices avaient été réduits par les Décrétales jusqu’à n’être plus qu’une formalité sans but ni résultat pratique, comme un organe témoin de l’ancienne législation. La modification n’était pas heureuse, et on jugea bientôt nécessaire de revenir en arrière. Ce fut l’œuvre du concile de Trente. La XXIIIe session, de reformatione, fut consacrée à rechercher les mesures les plus efficaces pour ramener et maintenir dans le clergé la dignité de la vie et la sainteté des mœurs. Elle édicté surtout les règles qui doivent présider au choix des ministres de l’Église, aux qualités qu’ils doivent présenter, à la préparation par laquelle ils doivent se former ; à cette occasion le concile prescrit l’institution des séminaires, qui devait avoir de si féconds résultats pour la réforme du clergé. Chemin faisant, le concile est amené à rétablir, en l’adoucissant, l’ancienne loi des interstices. Il le fait au chap. xi, pour les ordres mineurs et le sous-diaconat, au chap. xiii pour le diaconat, au chap. xiv pour la prêtrise. Nous négligeons, pour le moment, ce qui concerne les dispenses possibles, et aussi les motifs par lesquels le concile justifie ses prescriptions, pour nous attacher seulement aux dispositions législatives. Entre un ordre mineur et le suivant, on doit garder des interstices. Aucun laps de temps n’est déterminé : il faut que le clerc minoré se soit exercé dans les fonctions de son ordre et ait progressé dans les vertus ecclésiastiques avant d’être promu à un ordre plus élevé.

Un an doit s’écouler entre la réception du dernier ordre mineur et les ordres sacrés ; un an encore entre le sous-diaconat et le diaconat : ]un an entre le diaconat et la prêtrise. Et si le concile permet que l’évêque abrège ces délais quand il le juge possible et opportun, il lui interdit absolument de conférer au même sujet deux ordres sacrés le même jour, et cela privilegiis ac indultis quibusvis concessis non obstantibus quibuscumque.

Ces dispositions législatives, qui, tout en maintenant l’oldigation des interstices en principe, la tempéraient en pratique par de larges pouvoirs de dispenses accordés aux évêques, étaient très sages. Elles ont été, en somme, maintenues dans le Code de droit canonique, avec quelques mitigations.

Le Code de droit canonique.

Les prescriptions relatives aux interstices sont énoncées au canon 978. Le § 1 rappelle le principe : il faut observer les interstices entre les différents ordres, afin de permettre à ceux qui ont reçu un ordre de s’y exercer avant d’être promus à un ordre supérieur.

Le § 2 énonce la loi proprement dite avec ses détails. Il appartient à l’évêque de déterminer les interstices à observer entre la tonsure et l’ostiariat ou entre les divers ordres mineurs. On laissera passer un an au moins entre le dernier ordre mineur et le sous-diaconat, trois mois au moins entre le sous-diaconat et le diaconat, comme entre le diaconat et la prêtrise.

L’évêque ayant un large pouvoir de dispenser s’il le juge nécessaire ou utile à l’Église, le § 3 détermine les limites qu’aucune dispense ne doit dépasser sans permission spéciale du souverain pontif.-. Jamais on ne conférera le même jour les ordres mineurs avec le sous-diaconat, ni deux ordres sacrés, reprobata quavis contraria consueludine. Bien plus, il est interdit dedonner ni la tonsure avec quek(u’un des ordres mineurs, ni les quatre ordres mineurs ensemble.

Il est utile sans doute de faire remarquer la manière dont est rédigé ce dernier §. La restriction reprobata quavis contraria consueludine ne s’applique qu’au fait i de donner ensemble ou les ordres mineurs avec le sous le diaconat, ou deux ordres sacrés. Pour les cas énumérés I ensuite, à savoir la collation de la tonsure avec un