chair ce qui manque ii la passion du Christ, Col., i, 24, ce ne peut être pour mettre en doute la valeur de l’œuvre rédemptrice dont il souligne tant de fois la souveraine efficacité. Dans tous ces cas et autres semblables, l’analogie de la foi est une condition élémentaire de saine exégèse et, même au seul point de vue psychologique, une garantie de vérité.
3. Analogie de la foi caih-ilique.
Enfin, au nom du même principe, on peut et doit faire intervenir l’enseignement dogmatique postérieurement développé par l’Église. C’est pour le croyant une simple conclusion du rôle qu’il reconnaît à celle-ci dans l’interprétation de la vérité révélée. Mais, à ne considérer les choses qu’au regard humain, n’est-ce pas sagesse que de compter avec cet esprit de conservation et de continuité dont l’Église se fit toujours une loi ? Établie sur la foi en.Jésus prèchée par les apôtres, elle se pose historiquement comme tout à la fois soucieuse de maintenir le contact avec ces vénérables autorités et indépendante de leurs textes. Double condition pour que sa doctrine soit le commentaire vivant de leur pensée. S’il est vrai qu’en bonne logique les effets révèlent la cause, qu’est-ce qui pourrait mieux que le symbole catholique et la vie de la chrétienté naissante nous faire connaître le sens authentique de l’enseignement du Maître et de ses premiers représentants ?
C’est au nom de ce principe que les historiens les plus avertis de nos origines chrétiennes ont franchi l’abîme que la critique a prétendu creuser entre l’Évangile et l’Église. Il est impossible de concevoir que le dogme, la hiérarchie et la liturgie, dont on constate partout l’existence et l’importance dès l’Église apostolique, soient le produit d’une génération spontanée qui n’aurait pas son germe dans l’Évangile ou, à plus forte raison, qui le contredirait. Dans l’Évangile lui-même, la prédication du royaume qui en forme la base doit garder ce caractère complexe que l’Église y a toujours vu, sans se croire tenue de choisir entre ses divers aspects.
Non moins qu’à ces grandes questions fondamentales, l’analogie de la foi préside légitimement à maints détails d’exégèse théologique. Personne n’est tenté de prendre à la lettre les anthropomorphismes dont la Bible enveloppe si souvent la notion de Dieu et de ses attributs, quand l’Église, d’accord avec la saine jibilosophie, proclame le caractère éminemment spirituel de l’être divin. Des déclarations comme celles de saint Paul : Cujiis vull miseretiir etquemvull indural, Rom., IX, 18, ne peuvent se comprendre que sous le bénéfice de la réserve, bien établie par ailleurs, que Dieu ne saurait être l’auteur du péché. Et le Verbum caro faclum est, Joa., i, 14, on le Semetipsum exinunivil de saint Paul, Philip., ii, 7, doivent être interprétés en fonction du dogme de Chalcédoine qui condamne le monophysisme. De même l’eschatologie bien connue de la primitive Église empêche de lire dans Apoc, xx, 5 et 12, l’enseignement d’une double résurrection ou d’entendre la « seconde mort « dont il est ici question, comme aussi la destruction dont parle saint Paul, II Thess., i, 9, de cet anéantissement effectif du pécheur qu’ont imaginé les modernes tenants d’une immortalité conditionnelle. La pratique pénitentielle constatée dès la première heure commande l’inlerprétation de Hebr., vi, 4-6 : Impossibile est eus qui semel snnl illiiminali. .. et prolapsi siint rursiis rennvari ad pa’tiitentiam et le renouvellement du sacrifice eucharistique éclaire ce qui est enseigné dans cette même épître, ix, 28 et x, 12, sur l’unique oblation du Christ.
Au denreurant, ces diverses formes de l’analogie de la foi, que l’on vient de distinguer pour les besoins de l’analyse, sont rarement séparées en fait. Les enseignements dognuitiques de l’Église, bien qu’ils puissent à la rigueur s’appuyer sur une tradition purement orale.
répondent en général à des passages formels de l’Écriture, et alors son autorité s’ajoute à celle du bon sens pour nous rappcller qu’il faut interpréter les textes obscurs et équivoques par les textes clairs, les obiter dicta par les endroits où la doctrine s’énonce ex professo, les déclarations occasionnelles ou polémiques par les enseignenients sereins, les particularités individuelles par les témoignages qui nous font connaître la croyance de tous. De même, l’interprétation de l’Ancien Testament par le Nouveau ou l’harmonie des livres du Nouveau Testament entre eux n’ont leur pleine valeur que soutenues par la doctrine postérieure de l’Église. L’exemple des protestants anciens et modernes prouve tout ce qu’on peut tirer de la Bible, au nom d’un système préconçu. Dans l’Église catholique, au contraire, l’analogie de la foi est un préservatif contre l’arbitraire des créations personnelles ou la tyrannie des systèmes exclusifs, parce qu’elle invite à contrôler toutes les conceptions privées, fussent-elles les plus plausibles ou les plus séduisantes, par l’enseignement du magistère public, qui seul a qualité pour prononcer eu dernier ressort.
Là où l’Église ne se prononce pas, l’analogie de la foi reste encore un secours précieux et un guide nécessaire pour la science théologique, sans que pourtant ses résultats puissent dépasser le domaine de l’opinion.
4° Valeur de cette règle.
Cet aperçu, bien que forcément très incomplet, montre pourtant la grande place que tient pratiquement l’analogie de la foi dans l’interprétation catholique des Écritures. Il faut également avoir ces exemples présents à l’esprit pour en apprécier la valeur théorique.
Elle est à tout le moins et sans conteste d’ordre négatif. Du moment que l’inspiration garantit pour nous la vérité de l’Écriture, que l’enseignement de l’Église a le privilège de l’infaillibilité, tout ce qui contredirait la doctrine certaine de l’une ou de l’autre doit être écarté comme faux. « Aucune interprétation ne peut donc être vraie, qui attribuerait à un texte quelconque des Écritures couvert par le jugement formel de l’auteur sacré un sens contraire à la règle prochaine de la foi. Car la vérité ne peut pas être en conflit avec la vérité. » Franzelin, op. cit., p. 221.
Faut-il aller plus loin et lui attribuer également une valeur positive ? Certainement l’analogie de la foi peut très utilement servir d’auxiliaire pour éclaircir le sens des passages obscurs. Le même auteur cite comme exemple le secours que fournit à l’exégète la doctrine catholique du sacrement du mariage pour comprendre le texte de Eph., v, 23 remis dans son contexte, la notion du caractère sacramentel pour expliquer II Cor., i, 22 et Eph., i, 13, ou encore les lumières que jette le pouvoir reconnu à l’Église d’accorder des indulgences sur Matth., xvi, 19, le dogme de l’union hypostatique sur Joa., x, 36 et xiv, 28, la théologie de la science du Christ sur Luc, ii, 53, la sainteté parfaite de la Vierge immaculée sur Luc, i, 28. Ibid., p. 221.
Il ne faut pourtant pas oublier que la vérité du dogme n’entraîne pas nécessairement qu’il soit contenu dans tel texte, même s’il s’est créé une tradition d’école pour l’invoquer à cet effet. De même un théologien catholique ne doit jamais perdre de vue que l’Écriture n’a point prétendu tout dire et que la tradition liien constatée est par elle-même une preuve qui se suffit. Lorsqu’il s’agit d’interpréter l’Écriture, l’analogie de la foi peut suggérer que tel sens est possible, probable peut-être : seules des raisons d’ordre exégétique peuvent établir qu’il est réel. On retrouve ici la même règle qui préside à l’usage de Va priori dans les sciences de fait. Autant il est imprudent d’en faire fi, autant il serait abusif de s’en contenter et de l’appliquer indistinctement à tous les cas.
I-’n reprenant les exemples énumérés plus haut, on