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INTERPRETATION DE L'ÉCRITURE


est plutôt une indication d’ordre théologique qu’une véritable interprétation. A plus forte raison en est-il ainsi pour Innocent III s’appuyant sur Rom., xiv, 23, en vue de définir la nécessité de la bonne foi dans la prescription. Conc. Laleran. rr, c. 41, ibid., n. 439, ou pour le concile du Vatican lorsqu’il applique à la crédibilité le rationabile obseqiiium que saint Paul, Rom., XII, 1, disait du culte dû à Dieu. Ibid., n. 1790.

Comme exemples d’interprétations implicitement comprises dans des actes ecclésiastiques d’un autre ordre, on peut citer la quatrième session du V concile œcuménique (553) où furent lus divers extraits théologiques et exégétiques de Théodore de Mopsueste, qui, tous ensemble, furent frappés d’une réprobation collective très véhémente. Mansi, Concil., t. ix, col. 202230. Les tendances nestoriennes reprochées à l’auteur avaient inspiré maints détails de son exégèse. En condamnant celles-là, le concile invitait par là-même à rectifier celle-ci : Il faut d’ailleurs tenir compte du fait que la condamnation demeure tout à fait indéterminée. Quelques passages précis sont insérés dans le canon 12, relatif aux Trois Chapitres, comme infectés de nestorianisme, Denzinger-Bannwart, n. 224 : l’exégète croyant y trouvera marquée la pensée de l'Église sur la portée christologique de Joa., xx, 22 et 28.

Plus récemment, les censures sévères dont le pape Pie VI a frappé l’ouvrage d’Isenbiehl sur la prophétie de l’Emmanuel, Bref Divina Christi Domini voce du 20 septembre 1779, Cavallera, Thésaurus, n. 109, sont bien faites pour accréditer l’interprétation traditionnelle d’Is., VII, 14. Voir Dictionn. de la Bible, t. i, col. 395. Encore faut-il observer que le docteur viennois est condamné pour avoir refusé à cet oracle une signification messianique quelconque, ullo sensu sive litterali sive tijpico. On voit, en conséquence, que le bref laisse une réelle latitude à l’exégète catholique, pourvu qtie cet extrême soit évité.

d) Valeur du magistère extraordinaire. — Quelle que soit la forme sous laquelle se présente le magistère extraordinaire, il faut lui reconnaître une portée double.

Il a d’abord et à tout le moins une valeur négative, en ce sens qu’on n’a plus le droit d’attribuer au texte scripturaire ainsi interprété une signification contraire à celle qu’impose l'Église. Mais cela ne suffit pas et il faut lui accorder une valeur positive, c’est-à-dire une autorité propre à nous fixer sur le vrai sens du texte et qui exige l’adliésion intérieure de notre esprit. Par hypothèse, en effet, la définition ecclésiastique ne consiste pas seulement à déclarer vraie telle doctrine, mais à la déclarer contenue dans tel passage de l'Écriture. Dès là que l’autorité de l'Église est formellement exprimée, elle s'étend à la question de fait non moins qu'à la question de droit. Voir Franzelin, Tractatus de divina fraditione et Scriptura, 3<' édition, Rome, 1882, p. 219.

Cette doctrine n’est qu’une conclusion des principes catholiques sur l’autorité enseignante de l'Église. Mais son application pratique reste également soumise aux règles générales posées par la théologie et qui se ramènent à une étude minutieiise de chaque document, de manière à réaliser, sans excès ni défaut, tout l’enseignement qu’il contient.

2. Interprétation par le magistère ordinaire.

Avec le magistère extraordinaire, faut-il faire intervenir dans l’interprétation des Écritures l’autorité du magistère ordinaire ? Il paraît que ce point aurait été contesté. Vacant, op. cit., p. 546. Contre quoi il est facile de faire observer que le magistère ordinaire représente, en principe, aussi bien que le magistère extraorliinaire, la pensée de l'Église. Dès lors, il faut lui reconnaître la même qualité pour fixer le croyant sur le vrai sens de l'Écriture. Si l’on suppose qu’un texte scrip turaire puisse être formellement interprété par ces voix diffuses où s’expriment la pensée et la vie de l'Église, il n’y a plus aucune raison valable qui empêche de reconnaître ce sens pour l’s…. guem tenait ac tenet sancta mater Ecclesia.

La question, si tant est qu’elle ait sérieusement existé, a d’ailleurs été résolue par Léon XIII, qui rappelle expressément que le sens des Écritures est authentiquement déclaré ytar l'Église, sensus authentice declaratur, suivant les principes posés au concile du Vatican, n. 1792, sive sotemni judicio sine ordinario et universali magisterio. Encyclique Provideniissimus, dans Gavafiera, Thésaurus, n. 73.

Aussi bien cette minime divergence est-elle sans doute le fruit d’une équivoque. Tout ce que voulaient dire les théologiens qui ont l’air de s’opposer à la compétence du magistère ordinaire, c’est qu’il ne figure pas propris tcrminis dans le décret promulgué par le concile de Trente et renouvelé au concile du Vatican. La raison de cette omission, telle qu’elle résulte des délibérations conciliaires, est simplement celle-ci : que le magistère ordinaire est équivalemment désigné par les mots qui suivent sur le consentement unanime des Pères. Pratiquement donc ce deuxième mode d’enseignement ecclésiastique se confond avec les règles dont il nous reste à parler.

Du moins ne sâurait-il en être autrement avec la conception du magistère ordinaire communément admise par les manuels. Peut-être cependant y auraitil lieu de faire entrer dans cette catégorie les formes secondaires du magistère ecclésiastique, c’est-à-dire les enseignements des conciles et des papes qui ne revêtent pas un caractère définitif, puis encore les décisions doctrinales des congrégations romaines. Tous actes qui se réfèrent jusqu'à un certain point au magistère extraordinaire par la précision de leur teneur et la solennité relative de leur exercice, mais qui s’en distinguent par une moindre autorité.

Quoi qu’il en soit de la nomenclature, on ne saurait oublier que ces sortes d’actes renferment des enseignements importants dans l’ordre de l’interprétation scripturaire. Pour ne rappeler que les plus directs, le décret Lamentabili, publié par le Saint-Office en date du 3 juillet 1907, outre certaines indications générales, par exemple sur le caractère historique du quatrième Évangile, prop. 16, Denzinger-Bannwart, n. 2016, sur la preuve évangélique de la divinité du Christ, prop. 27 et 30, ibid., n. 2027 et 2030, sur le sens de ses miracles, prop. 28, ibid., n. 1028, en donne aussi de plus précises sur la foi primitive en la résurrection comme fait historique, prop. 37, ibid., n. 2037, sur l’idée de mort rédemptrice dans l'Évangile, prop. 38, ibid., n. 2038, et la fondation de l'Église par le Christ, prop. 52, ibid., n. 2052, sur l’usage apostolique de la confirmation, prop. 44, ibid., n. 2044. Il promulgue enfin des enseignements tout à fait déterminés sur le récit de l’institution eucharistique dans saint Paul, prop. 45, ibid., n. 2045, le fondement scripturaire des sacrements de pénitence, prop. 47, ibid., n. 2047 et d’extrême-onction, prop. 48, n. 2048.

Dans la suite, la commission biljlique a tranché plusieurs questions relatives, non seulement à l’authenticité des livres saints, mais à l’explication de quelques passages jugés plus importants ou plus actuels. L’n décret du 29 mai 1907 condamne l’application, totuliier vel ex parte, de la méthode allégorique au quatrième Évangile et confirme le caractère historique, affirmé déjà par le décret Lamentabili, des récits et des discours qu’il contient. Denzinger-Bannwart, n. 2112. Le 29 juin 1908, la commission impose d’admettre que les oracles que nous lisons au livre d’Isaïe et dans les autres livres de l'Écriture, passim in Scripturis, sans davantage préciser lesquels, sont veri nominis vali-