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INTERPRETATION DE LÉCRITURE


les grandes vérités, par exemple, que Dieu a fait toutes choses par son Verbe. Cont. hær., t. II, c. xxvii, n. 2, P. G., t. VII, col. 803. Mais elle est souvent obscure, ibid., c. xivaii, col. 804-812, et elle a besoin d'être interprétée. Bien qu’elle soit une règle de la vérité, elle n’est pas l’unique règle de la foi. Elle ne contient pas toute la vérité. La plénitude de la vérité a été déposée dans l'Église par les apôtres. Les grandes vérités de la foi et du salut sont nettement enseignées par les Églises et transmises par la tradition. Si des doutes surgissent sur de petites questions, il faut recourir aux Églises d’origine apostolique. L. III, c. IV. ii, 1, col. 855. Cette vérité est dans l'Église : Ubi charismata Domini posita sunt, ibi discere oporiet verilalem, apiid quos est ea quæ ab apostolis Ecclesiæ successit, et id quod est sanum et irreprehensibile conversationis et inadulteratum et incorruptibile sermonis constat. Ceux qui ont la foi en l’unique Dieu et dans l'œuvre. de son Fils, ceux-là et Scriptnras sine periculo no bis exponunt, neqiie Deum blasphémantes, neque patriarchas exlmnorantes, neque prophetas conlemnentes. L. rV, c. xxvi, n. 5, col. 1056. Les gnostiques n’ont pas conservé la vérité et ils expliquent mal l'Écriture, ou bien ils la rejettent ou ils la déclarent mensongère. Cum vero ad eam iterum traditionem, quæ est ab apostolis, quæ per successioneni presbyterorum in ecclesiis custoditur, provocamus eos, adversantur traditioni..s Evenit itaque neque Scripturis neque traditioni consentire eos. L. III, c. i, ii, 2, col. 845 sq. Cf. A. Dufourcq. Saint Irénée, Paris, 1905, p. 199-203 ; J. Hoh, Die Lehre des hl. Irenâus iiber das Neue Testament, Munster-en-Westphalie, 1919, p. 104-109 (qui discute l’opinion de Kunze, Glaubensregel, Hl. Schrift, Leipzig, 1899, p. 101 sq.). Voir Irènér (Saint).

Dans son De præscriptionibus, TertuUien est très net sur le magistère de l'Église. Il oppose aux hérétiques une fin de non-recevoir dans leurs interprétations de l'Écriture. S’il y a des litiges, la tradition apostolique les tranchera, c. vi, vii, P. L., t. ii, col. 18, 19. Dans l'étude scientifique de l'Écriture, on ne doit pas perdre de vue la règle de la foi, c. xii, xiv, col. 26, 27. L’interprétation des Livres saints appartient à l'Église, aussi bien que leur conservation, c. xvii, xxxviii, XXXIX, col. 30, 51, 92. Les hérétiques, qui n’acceptent pas la règle de la foi, que l'Église a reçue des apôtres, les apôtres du Christ, le Christ de Dieu, n’ont pas le droit d’interpréter les Écritures. Pour le faire dans leur sens, ils ajoutent, retouchent et modifient suivant leurs caprices, c. xxxvii, col. 50-51. Catholique, Tertullien a suivi ces principes, en expliquant le texte sacré ; devenu hérétique, il les a maintenus, mais la logique de l’erreur l’a entraîné, dans la pratique, à de fortes contradictions. A. d’Alès, La théologie de Tertullien, Paris, 1905, p. 242 ; J. Turmel, Tertullien, Paris, 1905, p. « 43-57.

Clément d’Alexandrie, qui enseignait que l'Écriture est obscure et pleine de mystères, voir t. iii, col. 165-166, ne se bornait pas à dire que seul « le gnostique » chrétien pouvait la comprendre et expliquer ce que le Saint-Esprit avait dit obscurément, il ajoutait que le dépôt de la révélation est compris et manifesté par la tradition pieuse des apôtres du Seigneur. Les sens cachés et my.stiques de l'Écriture, il faut les prêcher sur les toits, en expliquant les livres divins xa-xà tèv tTjÇ àXvjŒîaç. Strom., vi, 15, P. G., t. IX, col. 348.

Dans son homélie viii, n. 4, sur l'Épître aux Hébreux, P. G., t. Lxiii, col. 73-75, saint Chrysostome expose éloquemment à ses auditeurs comment ils pourront comprendre l'Écriture et comment, en face des hérétiques, qui l’expliquent diversement et qu’il nomme depuis Marcion jusqu'à Arius, il faut l’interpréter correctement. C’est un art qu’il est nécessaire

d’apprendre, une doctrine qu’il faut suivre, en tenant la règle qui en a été donnée. Lui-même, il recherche le témoignage des autres, qui l’ont précédé, et il n’explique pas le texte sacré d’après quelques-uns seulement. C’est une manière discrète, mais claire pourtant, de dire qu’il y a une règle et qu’elle est commune dans l'Éghse catholique, la règle traditionnelle.

En étudiant personnellement les Livres saints, le grand docteur saint Jérôme ne recourait pas seulement à la grâce divine par la prière, il avait encore le culte de la tradition ecclésiastique. « Il s’en remettait si pieusement à l’autorité de la tradition, a déclaré Benoît XV dans l’encyclique Spiritus Paraclitus du 15 septembre 1920, Acta apostolicæ sedis, 1920, t. xiii, p. 402, qu’il a pu affirmer avoir appris « tout ce qu’il sait, non par lui-même, c’est-à-dire auprès du maître très mauvais de la présomption, mais auprès des illustres hommes de l'Église. » (Epist., cviii, n. 26, P. L., t. XXII, col. 902). Il avoue, en effet, que jamais il ne s’est fié à ses propres forces en lisan*- les saints Livres (Ad Dominum et Rogatianum in l. I. Par., prref. t. XXIX, col. 401). Et voici comment dans une lettre, à Théophile d’Alexandrie (Epist., lxiii, n. 2, t. xxii, col. 607), il formule la loi suivant laquelle il avait ordonné sa vie et ses saints labeurs : « Sachez pourtant que nous n’avons rien plus à cœur que de sauvegarder les droits du christianisme, de ne rien changer au langage des Pères et de nous souvenir toujours de cette foi romaine louée par la bouche de l’apôtre. » La semence sainte, préditepar Isaïe, vi, 13, devait faire pulluler des apôtres sur toute l'Église. In Is., t. III, c. VII, t. XXIV, col. 161. Cf F. Valente, S. Girolamo e V encyclica Spiritus Paraclitus, etc., Rome, s. d. (1921), p. 129-130.

Pour saint Augustin, l'Écriture est une règle de foi, quand elle est claire : Quidquid est, mihi crede, in Scripturis, altum et divinum est. De utilitate credendi, c. vi, 13, P. L., t. XXXIV, col. 74. Mais l'Écriture est parfois obscure, et quelques-uns de ses termes sont à tout le moins ambigus. Quand l’exégète se trouvera en présence de ces termes et ne pourra percer leurs obscurités que devra-t-il faire ? Consulat regulam fidei quam de Scripturarum planioribus locis et Ecclesiæ auctoritate percepil, conclut le docteur d’Hippone. De doctrina christiana, t. III, c. ii, n. 2, P. L., t. xxxiv, col. 05. L'Écriture n’est donc pas une règle de foi parfaite et unique, l’autorité de l'Église est une règle de foi supérieure qui expliquera les obscurités de l'Écriture. D’autre pai-t, l’abus que les hérétiques font de l'Écriture, en y cherchant un appui à leurs erreurs, oblige à soumettre l’interprétation de celle-ci à la règle de la foi de l'Église : Quoniam mulli hæretici ad suam sententiam, quæ præter fldem est catholicæ disciplinæ, expositionem Scripturarum divinarum trahere consueverunt, anle tractationem Inijus libri (la Genèse) catholica fides breviler exponenda est. De Genesi ad lilteram, imper/ectus liber, n. 1, t. xxxiv, col. 221. L’autorité de l'Église résulte de ce que son enseignement provient du Christ et des apôtres. Sequere viam catholicæ disciplinæ, quæ ab ipso Christo per apostolos ad nos usque manavit et ab hinc ad posteras manatura est, disait Augustin à Honorât, qu’il voulait retirer de l’erreur manichéenne. De utilitate credendi, c. viii, 20, t. xLii, col. 79.Cf. L. Moirat, Notion augustinienne de l’herméneutique, Clermont-Ferrand, 1906, p. 70-80.

Saint Vincent de Lérins connaît deux moyens d'éviter les pièges des hérétiques : l’autorité de la loi divine et la tradition de l'Église catholique. Si quelqu’un dit que l’autorité du canon biblique suffit et qu’il n’est pas nécessaire d’y joindre l’autorité de l’intelligence que l'Égfise en a, il répond : Quia videlicct Scripturam sacram pro ip.sa sua allitudine non uno eodemque sensu universi accipiuni, sed eiusdem