Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.2.djvu/498

Cette page n’a pas encore été corrigée
2245
2246
INSPIRATION DE L’ECRITURE


tiens et des Assyriens. Par suite, une inscription trouvée en Egypte ou en Assyrie et qui contredirait un récit biblique ne prouverait rien contre l’espèce de vérité admise par le Saint-Esprit. » Le P. Lagrange rapprochait de cette théorie celle du P. de Huninielauer, In libros Samuelis. Paris, 1886, p. 451, d’après laquelle les écrivains sacrés, dans l’histoire des Rois, se seraient servis parfois de documents authentiques et auraient reproduit des chiffres exacts ; mais, quand ils ont parlé suivant l’opinion des hommes ou selon des documents moins authentiques, on ne saurait serrer d’aussi près les nombres qu’ils reproduisent, à supposer que le texte n’ait pas été corrompu. A propos de i encyclique, dans Ir Revue biblique. 1895, p. 53. Plus loin, dans le même article, p. 58-59, rendent compte du Traité de la sainte Écriture de M. Didiot, voir plus haut, col. 2161, il reniar que une fois de plus, « depuis l’encyclique, la tendance à mettre l’histoire dans l'Écriture sur le même rang (|iie les sciences. Il ne semble pas cependant, ajouta-t-il, que le souverain pontife ait voulu les assimiler complètement en disant d’appliquer les remarques relatives à la physique aux sciences de la nature, à l’histoire. » Il faudrait du moins, avec M. Didiot, distinguer l’histoire profane de l’histoire sacrée.

En 1902, le P. Lagrange est plus afrnmatif. Dans la conférence analysée plus haut, il met résolument l’histoire sur le même rang que les sciences physiques et, à deux reprises, La méthode historique, p. 104 et 106, il reconnaît que le Saint-Père, dans une toute petite phrase, dit « que le même critérium devait s’appliquer à l’histoire. » Il se plaît à réciter cette règle, tracée par le P. Cornely inteiprétant la parole de saint Augustin, que Léon XIII a prise pour guide au sujet des sciences physiques. Mais l’illustre exégète de la Compagnie de Jésus ne parle que de la chronologie et de l’histoire profane et sacrée, comme si elles avaient été voulues directement et dans leur entier par le Saint-Esprit. Introductio generalis, 3e édit., Paris, 1894, p. 603-604. C’est ce compendium d’histoire sacrée et profane, que Dieu n’a pas voulu donner aux hommes, parce qu’il n'était pas utile au salut. Aussi Cornely qui a admis l’inerrance biblique, ibid., p. 595-597, recommandait seulement aux critiques modernes de n’avoir pas une si grande confiance dans les systèmes chronologiques et historiques qu’ils bâtissaient eux-mêmes, d’après des chilTres et des textes, qui ne nous sont pas parvenus sans de nombreuses altérations. Il n’est pas question d’expressions bibliques, qui seraient matériellement fausses. Le point de vue du jésuite était donc tout différent de celui du dominicain.

La 6' conférence de Toulouse appliquait ces principes à l’histoire primitive, p. 183-220.

En 1903, dans ses Éludes sur saint Jérôme, BruxellesParis, p. 154, dom Sandcrs ne citait encore du P. Lagrange que la remarque de la Revue biblique, 1895, p. 38, il ajoutait : « Il faut donc discerner ce qu’affirme l'Écriture sainte en matière d’histoire. Il est nécessaire de savoir si les auteurs sacrés ont rapporté un fait historique, ou si, sous une forme métaphorique, ils ont voulu donner quelque enseignement. Lorsqu’ils ont fait de l’histoire, il faut examiner s’ils veulent aflirmer la vérité du faithistorique, avec toutes ses circonstances, ous’ils nous le relatent tel qu’il est connu par la tradition. Il est vrai, toutefois, que le sens des Livres saints s'étend par l’allégorisme, et que la vérité historique étant sauve, il convient d’interpréter le texte d’une manière spirituelle, » p. 154-155. Puis il prouve que saint Jérôme fait toujours précéder l’interprétation spirituelle de l’Ecriture de l’explication historique, p. 155-161. Nous verrons que, selon dom Sanders, saint Jérôme n’admettait pas finexactitude apparente de certains faits bibliques.

Dans les notes ajoutées en 1903, à ses Études bibliques, M. Loisy reconnaissait que Léon XIII, dans l’encyclique Providenlissimus Deus « afïlrmait avec autorité la doctrine traditionnelle de l'Église, qui a enseigné simplement que la Bible est inspirée tout entière et qu’elle ne contient pas d’erreur. » Au fond, l’encyclique n’a pas modifié l'état de la question théologique ; elle n’a fait que la formuler clairement. « La liberté de l’exégèse catholique n’a été ni augmentée, ni diminuée par les déclarations pontificales, » p. 38, note 2. Nous dirons comment M. Loisy a usé de cette liberté. Ajoutons seulement ici, que, selon lui, l’encyclique nous prémunissait contre la tendance qui porte les critiques modernes à retrouver, dans chaque endroit de l'Écriture, toute la somme de vérité que f on est capable de connaître actuellement sur le point qui y est traité, comme si la Bible avait été écrite spécialement pour notre époque et comme si la science de notre temps était la règle immuable de la vérité.

Le P. de Hummelauer de son côté, a interprété dans le même sens la transition, devenue célèbre, de fencyclique et il a^appliqué à l’histoire et aux sciences apparentées les trois principes de solution que Léon XIII avait exposés au sujet des sciences physiques et naturelles, à savoir que le but divin de l’inspiration est de nous instruire des choses du salut plutôt que des sciences profanes, que les expressions des écrivains sacrés sont accommodées à l’intelligence des contemporains, et par suite conformes aux apparences et au langage populaire, enfin que dans les matière scientifiques, les exégètes catholiques ne sont pas tenus d’adopter les explications des Pères, mais gardent la liberté de proposer de nouvelles interprétations. Exegetisc.hes zur Inspirations/raye, dans Biblische Studien, Fribourgen-Brisgau, 1904, t. ix, fasc. 4, p. 50-54.

Le P. Bonaccorsi, Questione bibliche, Bologne 1904, p. 103, donnait le même sens à l’encyclique pontificale. Par suite, il pensait que la direction et l’assistance du Saint-Esprit, souvent ignorées de l’hagiographe, ne changeaient pas la nature des choses. A priori, il ne répugnerait pas que l’assertion de l’hagiographe, dans des choses purement profanes, pût, nonobstant cette direction et cette assistance, être objectivement erronée. De fait, il est vrai, la tradition constante de l'Église nous assure la pleine véracité des Livres saints. Le théologien et fexégète catholique doivent donc, ^ tenir comme théologiquement certain que l’erreur ne peut se rencontrer dans les livres inspirés, et si la véracité de la Bible était un jour délinie de foi catholique, ils devraient condamner comme une hérésie le refus d’ajouter foi à une affirmation proprement dite des écrivains sacrés. Ce nonobstant, cette affirmation demeura toujours entitativement humaine et elle ne pourra par conséquent jamais être objet direct et immédiat de foidivine. Ibid., p. 250 sq. Cette explication ne paraît pas absolument conforme à la tradition ecclésiastique, et elle laisse place à la possibilité de l’erreur dans les assertions entitativement humaines des hagiographes. Cf. Revue biblique, 1905, p. 288-289.

Le P. Lagrange, pour revenir à lui, proposait en faveur de son sentiment un autre argument, tiré du témoignage de saint Jérôme sur la façon dont les faits historiques sont souvent racontés dans la Bible suivant l’opinion commune du temps et non juxta quod rei veritas conlinebat. La méthode historique, p. 107-108. In Jer., xxviii, 10, t. xxiv, col. 855. Le P. Cornely, auquel cette citation était empruntée, op. cit., p. 604, en concluait seulement qu’il ne fallait pas interpréter ces passages de l'Écriture, selon l'état actuel des scienceshistoriques, mais conformément à l’intention qu’avaient eue les écrivains sacrés en relatant ces faits : règle d’exégèse qui, bien appliquée, aurait écarté beaucoup de difficultés d’interprétation, par la considération du langjige