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INSPIRATION DE L’ECRITURE


Quant aux erreurs, qu’on attribue aux évangélistes, Cano les repousse, en interprétant les passages objectés. Les erreurs du discours de saint Etienne, Act., VII, il les attribue au diacre auteur du discours, et non pas à saint Luc qui, en fidèle historien, n’a pas changé un iota et a reproduit le discours tel qu’Etienne l’avait prononcé. Le diacre, quoique rempli du Saint-Esprit n’a pas parlé comme les prophètes, les apôtres et les évangélistes, il n’avait pas leur privilège de ne pas se tromper. Les écrivains sacrés ont le droit de rapporter les erreurs des autres. Ibid., c. xviii.

Bellarmin enseignait qu’un livre canonique est infailliblement vrai. Chemnitz a eu tort de prétendre que certains livres canoniques ne sont pas infailliblement vrais, parce qu’ils sont une règle proportionnée à notre infirmité comme tous les autres livres humains. Comment sont-ils une règle s’ils ne sont pas infailliblement vrais ! Du temps de saint Augustin, les livres proto-canoniques qui étaient reçus par tous pouvaient avoir une plus grande autorité que les deutéro-canoniques qui n'étaient pas reçus par tous. Mais maintenant, après la^ définition des conciles généraux, nous sommes également certains de l’autorité de tous les livres canoniques et nous ne devons pas préférer l’un à l’autre. L'Église n’a fait qu’attester leur autorité ; elle n’a pu la leur conférer. Tous ont donc la même autorité, Calvin objectait que l’auteur du IP livre des Macchabées, qui demande pardon de ses erreurs, ne peut être regardé comme l’auteur d’un livre canonique Les auteurs sacrés n'écrivaient pas de leur propre génie et par leur travail, mais par la révélation du Saint-Esprit, comme il résulte de l’exemple de Jérémie, dictant ses oracles à Baruch. Bellarmin répond que Dieu est l’auteur de toutes les Écritures, mais qu’il ne l’a pas été de la même manière pour chacune. Aux prophètes il a révélé l’avenir* et il les a simplement assistés pour qu’ils ne mêlassent pas d’erreur à ses oracles, en les écrivant ; aussi les prophètes n’avaientils d’autre travail à accomplir qu'à écrire ou à dicter. iVIais Dieu n’a pas révélé aux autres écrivains, surtout aux historiens, tout ce qu’ils avaient à écrire, il les a excités à écrire ce qu’ils avaient vu et entendu, ce dont ils se souvenaient, et en même temps il les a sistait pour qu’ils n'écrivissent rien de faux. Cette assistance n’empêchait pas qu’ils n’eussent à travailler en pensant et en cherchant ce qu’ils allaient écrire et comment ils l'écriraient. Ainsi a fait saint Luc. L’auteur du IPlivre des Macchabées ne demandait pas pardon des erreurs qu’il aurait commises comme s’il ne savait rien, il s’excusait de son style peu poli, comme saint Paul avouait son inhabileté dans l’art d'écrire. De verbo Dei, 1. L c. x, xv.

Les théologiens.et les exégètes qui, au xv^', au xvii « et au xviiie siècle, demeurèrent fidèles à l’ancienne opinion de la révélation immédiate du Saint-Esprit, enseignèrent, on le comprend, plus encore que les partisans de la nouvelle opinion, l’exemption complète d’erreur daiis les Livres saints.

Pour Martin Becan, le vrai sens de l'Écriture est celui qui a été entendu par le Saint-Esprit. Mais les écrivains sacrés n’ont pas toujours connu, et par conséquent, n’ont pas entendu tout ce que le Saint-Esprit signifiait par leurs paroles. Par suite, si quelque sens n’a pas été compris parl'écrivain sacré, mais a été entendu par le Saint-Esprit, un autre hagiographe peut le connaître et le citer. D’où Becan conclut qu’un auteur canonique ne cite jamais un de ses prédécesseurs en un sens accommodatice, mais en un sens voulu par le Saint-Esprit. Le sens littéral de l'Écriture est donc infailliblement vrai et il ne peut exprimer rien de faux, parce qu’il a été voulu par le Saint-Esprit, qui ne peut rien dire de faux, puisqu’il est la vérité première, cl, dès lors, il est infiniment sage j

et vérace. Quand l'écrivain sacré reproduit les paroles d’autrui, il n’est pas nécessaire qu’elles soient vrfiies, car il affirme seulement qu’elles ont été prononcées, ce qui est infailliblement certain. Summa Iheologica scholastica, proœm., q. vii, a., 4, 5.

Dans, l’Index controversiarum fidei, qui suit ses Commentaires, Tirin conclut de la révélation faite par Dieu aux prophètes que les choses qui viennent de Dieu, la vérité première et infaillible, sont unes et uniformes, exemptes d’erreur et de vice. L’accord des paroles prophétiques résulte de ce qu’elles ont été inspirées par le même auteur.

Les docteurs de Salamanque prouvent qu’il y aurait contradiction à admettre que Dieu pût enseigner le faux immédiatement et par lui-même, et ils en déduisent que Dieu ne peut pas le faire non plus médiatement et par ses ministres. Ceux-ci ne disent, à ce titre, que ce que Dieu leur a immédiatement révélé. Dans ce cas, il est impossible que leurs paroles soient fausses à moins que Dieu ne leur ait immédiatement révélé quelque chor^e de faux. D’ailleurs, s’il ne répugnait pas que Dieu pût dire le faux par ses ministres, toute la certitude de notre foi péricliterait. Cursus (heologicus. De fuie, disp. II, dub. i, § 4, n. 35, édit. Palmé, t. xi, p. 13-14. Un écrivain sacré n’a donc pas écrit la parole de Dieu sans n’avoir pas la possibilité d’erreur, car autrement l’infaillible autorité de l'Écriture chancellerait. De soi, un écrivain sacié n’a pas l’impuissance de ne pas écrire de fausseté ; mais si on suppose d’autres conditions, des secours efficaces qui le poussent à écrire la vérité, il écrira infailliblement la vérité. L'Écriture est donc infaillible, sans qu’il soit nécessaire d’enlever à l'écrivain sacré la puissance d’errer. Il suffit pour rendre l'Écriture infaillible qu’elle provienne d’un écrivain qu’une prémotion efficace porte à écrire qu’il ait d’ailleurs, de soi, ou qu’il n’ait pas le pouvoir d’errer. Qu’on ne dise pas qu’il faut accorder à l'écrivain sacré autant qu'à l'écrivain profane, qui ne se trompe pas souvent, il faut lui accorder non pas seulement de n’avoir jamais erré, mais encore de n’avoir pas pu errer. La principale différence entre un écrivain sacré et un écrivain profane n’est pas celle qu’on dit, mais elle consiste en ce que l’un écrit les paroles de Dieu et l’autre ses propres concepts. Si même l'écrivain profane n’avait pas la liberté d’errer, il ne serait pas pour cela un écrivain sacré, parce qu’il n’aurait pas eu les secours pour écrire infailliblement sans défaut, secours qui ont été accordés à l'écrivain sacré. Qu’on ne dise pas non plus que l’infaillibilité de l'Écriture exige que l'écrivain sacré n’ait pas le pouvoir d'écrire le faux et de mentir. S’il est de la nature de l'Écriture non seulement de dire la vérité, mais même de ne pouvoir rien dire de faux, cela provient de ce que Dieu, qui ne peut rien dire de faux est son auteur principal. Or, il suffit que cet auteur donne à son intermédiaire humain le secours efficace, en vertu duquel il est tellement porte à dire le vrai, qu’il n’y mêle rien de faux. Dans cette hypothèse, l'Écriture est divine, et dès là qu’elle est divine, elle sera tellement vraie qu’il répugnera que la fausseté s’y mêle. Il est chimérique d’imaginer pour l'Écriture la liberté d’errer qui reste à l'écrivain sacré. Peu importe qu’en écrivant celui-ci garde le pouvoir prochain d’errer, puisque Dieu, par le moyen de secours efficaces fait qu’un organe faillible parle et écrive infailliblement et dise la vérité infaillible, comme le salut d’un prédestine est infaillible, quoique ce prédestiné, ait le pouvoir prochain de péclier et d'être condamné. Ibid., disp. IV, dub. i, § 3, n. 18, 19, p. 258-259.

Louis Abelly, traitant des livres canoniques, fait remarquer qu’il n’y a rien dans l'Écriture qu’on ne doive tenir de foi divine, de telle sorte qu’on ne trouve en eux aucune erreur, même légère, ni aucun lapsus