Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.2.djvu/467

Cette page n’a pas encore été corrigée
2183
2184
INSPIRATION DE L’ECRITURE


dans les Évangiles de Jean ou de Matthieu, ainsi il n’est pas permis de nier ou de mettre en doute quelque chose qui est dans les livres de Josué et des Juges. Et de même qu’en niant quelque chose qui est dans le livre de Mattliieu ou de Jean on est hérétique, ainsi en niant quelque chose qui est dans le livre des Juges ou de Josué, ou en doutant, on est hérétique. In librum Parctiipomenon, præf., q. ii. Parce que l’Église est certaine que les auteurs de ces livres ont été inspirés par le Saint-Esprit, on ne peut, au point de vue de la certitude, établir aucune différence dans le contenu des Livres saints, de sorte que les choses dites en passant, qui n’ont aucun rapport direct avec le salut, sont certaines, vraies, et doivent être crues de foi. Ibid., q. vi. Puisque nous devons nécessairement croire aux jugements et aux décrets de l’Église, dit Pic de la Mirandole, sequens est ut Veteri et Novo Testamento singulisqiie sententiis adhareamus, quæ omnia Ecelesia ipsa universa recipit probavitque et credenda nobis observandaque mandavit. De fuie et ordine credendi théorise, cité par Tollner, D/e gôltliche Umgebung der heiligen Schrift, Leipzig, 1772, p. 40.

Au nombre des hérésies qui se sont produites au sujet des Livres saints, Bellarmin range celle qui a prétendu que, dans les Épîtres de saint Paul et dans les autres livres sacrés, tout n’a pas été écrit sous la dictée du Saint-Esprit, mais que quelques choses par endroits venaient de la seule prudence et raison humaine. Ses fauteurs méprisaient l’Épître à Philémon tout entière parce qu’elle avait été écrite à la façon humaine. Érasme a renouvelé cette hérésie, en soutenant que l’autorité de l’Écriture ne serait pas détruite parce que les évangélistes auraient erré en citant de mémoire des passages de l’Ancien Testament. Et Bellarmin réfute cette hérésie. De verbo Dei, t. I, c. VI.

Ménochius refuse d’écouter les anoméens qui, selon saint Épiphanc, H « t., lxxvi, attribuaient des erreurs de mémoire aux écrivains sacrés. Il refuse aussi d’écouter ceux qui, tout en reconnaissant que les écrivains sacrés ont toujours dit la vérité, ont prétendu que quelques passages de leurs écrits n’avaient pas été inspirés par le Saint-Esprit, tels que, par exemple, ceux qui traitent du manteau laissé par Paul à Troas, II Tim., IV, 13, du chien de Tobie qui remuait sa queue, Tob., xi, 9. S’il y a dans l’Écriture la moindre chose qui n’ait pas été écrite par le Saint-Esprit, on pourra douter aussi d’autres choses, et ainsi toute l’autorité des Écritures vacillera, et par conséquent notre foi, comme l’a dit saint Augustin, De doctrina christiana, t. I, c. lxviii. Les choses qui paraissent les plus petites ont toutefois leur utilité, si elles sont jointes aux plus grandes, et par suite on ne doit pas les tenir pour indignes de la majesté divine. Comment, totiiis Scripturee, Proleg., c. iv.

Le P. de Mendoza tenait pour certain qu’aucune parole, aucun fait de l’histoire sainte n’était superflu ou oiseux. L’Écriture, en effet, est, pour ceux qui la méditent profondément un trésor, dont il faut recueillir même les plus petites pièces. Dans la supputation des années il n’y a pas de superfluité : dans les catalogues de noms et dans les étymologies, dans les généalogies, il y a une grande utilité et aucune répétition oiseuse. In I V Regum libros annotationes, annot. ii, sect. IV.

Le P. de Celada se demande s’il faut penser que le Saint-Esprit a inspiré les moindres choses dans les saintes Lettres, et il répond avec saint (Jirysostonie qu’on ne doit pas blâmer celui qui recherche le sens même d’une virgule. In Estlier, proleg., Ii, § 7, n. 8. Suarcz a réfuté l’assertion de ceux qui prétendaient que les écrivains sacrés intercalaient parfois dans i’Écrilure ce qui venait de leur esprit propre et disaient

parfois des choses qui ne paraissent pas dignes du Saint-Esprit. Cette assertion ferait que l’Écriture ne serait pas la règle infaillible de la foi, car si elle est quelque part purement humaine, elle deviendrait tout entière incertaine. Les écrivains sacrés, en effet, n’ont rien écrit de leur esprit propre, mais en tout ce qu’ils ont écrit, et en chacune des choses qu’ils ont rapportées, ils ont agi sous la direction du Saint-Esprit. Cela ressort de la notion même de l’Écriture inspirée. Autrement d’ailleurs, l’Écriture deviendrait incertaine et pourrait contenir un mensonge. De fide, disp.V, sect. iii, n. 2, 14 ; édit. Vives, t. xii, p. 142, 147.

Ainsi donc, jusqu’au xviie siècle, les écrivains ecclésiastiques, les théologiens et les exégètes ont enseigné l’inspiration totale de l’Écriture. Nous avons cité ceux qui l’ont affirmé d’une façon positive. Ils en font un objet de foi. Un plus grand nombre encore, nous le verrons à propos de l’inerrance biblique, l’ont affirmé d’une manière négative, en repousssant énergiquement de la Bible la moindre erreur. Le même enseignement persista après que se furent manifestés les premiers sentiments divergents.

Inspiration restreinte.

1. Auxxvii<^ et XVIIIe siècles. — a) Henri Holden fut le premier à restreindre l’inspiration proprement dite aux vérités purement révélées et à celles qui leur étaient connexes. Il définissait l’Écriture un écrit qui contient la doctrine révélée, ou qui du moins ne renferme rien qui lui soit opposé ou contraire, et en outre qui n’a rien de dissonant avec une vérité quelconque appartenant à la doctrine religieuse ou immédiatement révélée par le Saint-Esprit, ou pour la description de laquelle un secours divin spécial a été accordé. Pour qu’un écrit réponde à cette définition, il suffit donc qu’il contienne ou bien la même doctrine révélée que l’Église universelle croit, et enseigne, ou bien qu’une autre vérité de nature quelconque ne s’y rencontre, qui détruise cette doctrine ou lui soit opposée, ou même qui soit étrangère à quelque vérité divine ou humaine reconnue universellement par les hommes. En effet, un secours spécial de Dieu n’a été donné aux écrivains des livres que l’Église reçoit comme parole de Dieu que pour les choses qui sont purement doctrinales ou qui ont un rapport prochain ou nécessaire avec les doctrinales. Pour tout ce qui ne répondait pas au but de l’auteur ou qui se rapportait à d’autres choses. Dieu n’a accordé à cet auteur d’autre secours que celui qui est commun aux autres écrivains très pieux. Un livre canonique contient donc la doctrine révélée et rien qui soit en désaccord avec la vérité. On ne doit donc pas hésiter à croire, comme article de foi catholique, tout ce qui est Écriture sainte ou parole révélée de Dieu. Mais on n’a pas la même certitude relativement aux auteurs de tous les Livres saints et par conséquent ils n’ont pas tous la même autorité, comme le reconnaissent le plus grand nombre des exégètes. Il est de foi chrétienne que leurs livres contiennent la doctrine révélée. Il faut tenir comme très certain qu’en décrivant et en transmettant cette doctrine leurs auteurs n’y ont rien introduit de faux. Quoiqu’il ne soit pas permis d’accuser de faux le contenu quel il soit des écrits sacrés, cependant ce qui n’a pas de rapport à la religion ne constitue nullement un article de foi catholique. On ne doit pas pourtant improuver les vérités philosophiques par les seules paroles ou pensées de l’Écriture. Bien que l’Écriture ne renferme aucune erreur, sa manière de parler est toutefois le plus souvent vulgaire et adaptée à la portée commune des hommes plutôt qu’à la propriété du langage et à la rigueur du discours. Divinæ fidei analijsis, t. I, c. v, sect. i, Paris, 1052, p. 80 (cette partie de l’ouvrage de Holden n’est pas reproduite dans le Cursus theologiæ complctus de Migne, t. vi). Cf. card. Manning, La mission temporelle du Saint-Esprit,