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INSPIRATION DE L’ECRITURE


(le sa Divina inspiratio sacrarum Scripturarum ad mentem S. Thomæ Aquinatis, Rome, s. d. (1898), p. 93109, il critique les définitions de l’inspiration données par Patrizi, Marchini, Janssens, S. di Bartolo, Franzelin, C. Pesch, E. Levesque et C. Chauvin, qui présentent toutes des inconvénients. Il propose ensuite celle-ci : Inspiratio est influxus diviniis physicus et supernaturalis elevans et movens facilitâtes hominis, ut scripto consignentur Ecclesiæ, propter bonum et utilitatem ejus, ea quæ Deus ouït, et modo quo vult. La grande différence entre cette définition et les autres est dans l’insertion des mots physicus et movens. Par un engouement excessif, on introduit ainsi une opinion d'école dans la définition même del’inspiration. Aussi, au c. VIII, p. 109-138, consacré à l’exposé de l'élévation des facultés de l'écrivain sacré, on insiste spécialement, n. 91, p. 127-131, sur cet influx physique, surnaturel, et immédiat de Dieu, qui est vraiment et proprement la physica præmotio divina. Cf. c. XI, n. 126, p. 176-185, M. Chauvin, qui admet la piémotion physique, a eu le tort, ajoute t-on, de ne pas l’introduire dans la définition même de l’inspiration.

g) Le P. Calmes a exposé, lui aussi, la théorie de l’inspiration. Il a suivi la méthode d’enseignement, et non la méthode d’invention (proposée par M. Dick). L’inspiration, prise en soi, est une grâce gratis data, efficace et extraordinaire. Dans l'écrivain inspiré, l’inspiration s’exerce d’abord comme motion sur la volonté. Cette motion est intérieure, immédiate. Son premier eiîet est de déterminer à écrire l’auteur, qui a quelque idée de son sujet. Dieu qui choisit des instruments tout préparés, n’a qu'à les mettre en branle dans un sens déterminé. Il suffit pour cela de mouvoir la volonté vers l’objet qui doit faire le fond du livre, suggérer cet objet. Les connaissances que l’auteur a acquises par sa raison naturelle et son travail se réveillent naturellement dans son esprit. A ce moment la volonté, mue parl’action efficace de Dieu, fixe l’esprit dans la considération des vérités qui sont destinées à devenir la parole de Dieu, et lui fait émettre le jugement pratique, qui doit préluder à la rédaction. Ainsi, la volonté occupe une place intermédiaire entre deux ajctes de connaissance ; elle est précédée d’un jugement spéculatif et suivie d’un jugement pratique. Sauf le cas où la révélation se combine avec l’inspiration, le jugement spéculatif est porté par les autres forces naturelles de l’intelligence, tandis que le jugement pratique est toujours formé sous l’influence de la volonté mue et fortifiée par Dieu. Ainsi la volonté n’entre en jeu qu’au moyen d’une connaissance préalable qui la sollicite ; mais sa détermination infaillible a sa source formelle dans la motion divine. Dieu ne détermine pas la volonté par un commandement ; un ordre est adressé à la volonté par l’intermédiaire de la connaissance. Les ordres d'écrire, mentionnés dans l'Écriture, ne se rapportent pas à l’inspiration scripturaire. L’influence de l’inspiration sur la volonté est antécédente ; c’est une prémotion et une prédétermination, la volonté étant déterminée à agir d’une manière infaillible. L’initiative du livre inspiré venant de Dieu, Dieu prévient donc efficacement la volonté de l'écrivain. Cette prémotion enfin est physique : c’est une impulsion initiale, agissant sur la volonté d’une manière physique. Bien qu’infailliblement efficace, la détermination de la volonté de l'écrivain est spontanée.

Cela posé, quelle est l’influence de l’inspiration sur la conception, l'élaboration et la rédaction du livre ? En bref, l'écrivain conçoit son œuvre, parce qu’il la veut telle, et il la veut telle, parce que Dieu le fait vouloir. La composition proprement dite est donc due à l’action divine. Il l'élabore de même, dans l’ordre

de la spéculation, mais le jugement pratique définitif est formé sous l’influence de la volonté mue par l’action efficace de Dieu. Quant à la rédaction, l'écrivain reçoit, en écrivant, le même concours divin qui l’a guidé dans le choix et l'élaboration de son sujet. L’action de Dieu sur lui s’est exercée de la même manière : en rédigeant, il est libre dans le choix des termes.et dans l’emploi de la syntaxe. Sa volonté joue donc, ici encore, un rôle essentiel. Mais tout ce qu’il veut. Dieu le veut par lui. Donc tout ce qu’il écrit. Dieu l'écrit par lui. Dieu est donc, en définitive, l’auteur responsable, l'écrivain n’est que son instrument. Tout le travail est de l’homme, et ainsi le livre est de l’homme ; mais tous les éléments, qui constituent l'écrit, ont été déterminés parl’inspiration divine ; le livre est donc de Dieu comme cause principale. Qu’est-ce que l'Écriture sainte ? Paris, 1899, p. 27-43. Dans cette théorie de l’inspiration, l’action de la . volonté a donc la principale part. Elle diffère dès lors de celle de saint Thomas, pour qui, si l’inspiration n’est, dans le prophète, que l'élévation de l’intelligeftce ad percipienda divina, la prophétie elle-même ad cognitionem pertinet. Sum theol., ll^-ll'^, q. clxxi, a 1.

h) Les jésuites ne pouvaient laisser passer sans réclamation les critiques faites à la méthode de Franzelin et à son explication de la nature de l’inspiration ni l’introduction de la prémotion physique dans cette notion. Le P. van Kasteren défendit cette méthode et cette explication. Franzelin en Zanecchia, dans les Studien, Utrecht, 1902, t. lviii, p. 56-80. Zanecchia riposta. Scriptor sacer sub divina inspiratione jaxta sententiam cardinalis Franzelin. Responsio ad Patrem van Kasteren S. J., Rome, 1903. Van Kasteren fit une réplique : Nochmaals Franzelin en Zanecchia, dans les Studien, 1903, t. lxi, p. 289 sq. Le P. Christian Pesch, qui avait été attaqué par Zanecchia, défendit son sentiment personnel, conforme à celui de Franzelin, Theologische Zeitfragen, 1I1 « série, Fribourg-enBrisgau 1902, p. 90 sq. ; trad. latine par F. Pignataro, Apparatus ad historiam coœvani inspiraiionis, Rome, 1903, p. 96-99. Iljustifia enfin la méthode de Franzelin, De inspiratione sacræ Scriptiiræ, p. 305-313.

Dans ce dernier ouvrage (1906), il traita de nouveau la question de l’essence de l’inspiration, part. II, c. ii, p. 402-438. Après avoir écarté des questions étrangères, p. 402-405, il ramène le sujet à ceci : En quoi consiste cet influx inspirateur, par lequel Dieu est l’auteur des Livres saints ? P. 405-406. Comme Dieu, auteur principal, se sert d’hommes inspirés pour rédiger les Livres saints, Pesch expose l’influence de la cause principale sur les agents secondaires : motion à « crire sur leur volonté, illumination spéciale de leur intelligence et application de leurs facultés naturelles à la rédaction du livre, p. 406-410. Les explications insuffisantes exclues, p. 400-413, la révélation strictement dite n’est pas requise, pas plus que la détermination physique, p. 413-421. Dieu fait seulement, comme auteur principal, ce que les écrivains font pour composer un livre ; il infuse donc dans l’intellect de l’inspiré une lumière surnaturelle qui fait juger à celuici que l^ieu veut qu’il écrive ce qu’il pense naturellement, et qu’il doit l'écrire de la manière que Dieu veut, ordinairement avec conscience de cette inspiration, p, 421-427, Dieu influe sur la volonté de l'écrivain pour le déterminer à écrire, mais il n’est pas nécessaire que cette motion divine soit une prémotion physique, il suffit qu’elle soit morale, p. 431-434 ; enfin, pour éviter que l’erreur ne se mêle au travail de l’homme inspiré, il suffit que Dieu l’assiste durant tout le temps de sa rédaction et lui fasse exprimer avec une vérité infaillible tout ce qu’il a voulu lui faire écrire, p. 434-436. L’ouvrage ainsi rédigé est transmis à l'Église comme la parole de Dieu écrite et