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INSPIRATION DE L'ÉCRITURE


Pour expliquer les citations d’auteurs profanes, qui se lisent dans les livres inspirés, le P. Nicremberg reproduit textuellement la distinction proposée par Bonfrère. Et c’est par le troisième mode d’action inspiratrice qu’il explique l’insertion des paroles des amis de Job dans le livre de Job et celle des vers d’Aretas et d'Épimenide rapportes par saint Paul. De origine sacræ Sc.ripturæ, t. IX, c. iv.

La même distinction a été acceptée par Frassen, Disquisiliones biblicæ, Paris, 1682, t. I, c. i, § 4, et par Goldhagen, Introductio ad sacram Scripturam, Mayence, 1765, part. I, sect. i, q. ii, au xviiie siècle. Le P Pesch, De inspiraiione sacrée Scripturæ, p. 323-325, la range parmi les opinions laxiores, parce que l’assistance concomitante du Saint-Esprit n’est pas une inspiration, mais une simple direction, et parce que l’inspiration générale, admise au début du travail de l’hagiographe, ne suffît pas à rendre Dieu auteur d’un livre au sens propre.

Il est bien certain qu’aujourd’hui les théologiens s’exprimeraient d’une manière plus précise et ils exigent une détermination plus positive à écrire de la part du Saint-Esprit ; ils maintiennent cependant la simple assistance durant la rédaction.

Avec le jésuite lorrain, Nicolas Sérier (Serarius), nous revenons à une doctrine plus sûre. Il reprend celle de saint Thomas, qu’il interprète de manière à reconnaître l’existence d’une lumière surnaturelle pour les choses que connaissaient les écrivains sacrés et d’une assistance du Saint-Esprit sur leurs mains, tandis qu ? celles-ci écrivaient. La manière dont Dieu a dicté la Bible est déterminée d’après la fin qu’il se proposait d’atteindre et d’après la façon dont les hommes dictent aux autres leurs pensées. Dieu a pris tous les moyens pour que tout ce qu’il a fait écrire soit sa parole et soit vrai et digne de foi. Il a affecté l’intelligence, la volonté et la main des hagiographes d’une manière plus parfaite que ne le font les hommes, quand ils dictent leurs pensées. Il a imprimé immédiatement dans leur intelligence ce qu’ils devaient écrire. Qu’il le fasse par les sens extérieurs ou intérieurs, il illumine leur intelligence d’une lumière tout à fait surnaturelle ou d’une lumière naturelle, surnaturellement donnée ou accrue. El hoc ad percipiendum tantum quod dictatur vel judicandum tanium ; vel ad ulrumque. C’est une révélation. Le jugement porté est théorique, quand l’hagiographe juge que les choses révélées sont vraies ; il est pratique, quand il juge qu’il doit les écrire de telle et telle manière. La lumière divine est proportionnée à la manière dont la vérité est révélée. Quand l'écrivain doit écrire des choses qu’il connaissait déjà, il suffît que Dieu l’aide de quelque façon pour que ses idées acquises brillent d’une certaine manière nouvelle et qu’il l’assiste pour qu’il ne commette aucune erreur, en les assemblant et en les exprimant. Dans l’hypothèse de la troisième proposition de Lessius, l'écrit ainsi approuvé ne pourrait être à proprement parler parole de Dieu ; il ne pourrait être ainsi nommé que dans un sens impropre, et comme éminemment, parce que le Saint-Esprit aurait attesté que cet écrit renfermait ce qu’il aurait pu inspirer et qu’il atteste, après coup, de son témoignage. La volonté de l'écrivain est mue par Dieu à écrire et cette motion rend l’homme apte à son rôle, soit par un secours actuel de Dieu, soit par un habitas, par exemple, de vérité. Dieu assiste la main et, pour ainsi dire, la tient pour qu’elle n'écrive aucune erreur. Prolegomena biblicu, 1704, c. iv, q. i-xviii.

Le récollet, Henri de Bukentip, ne jugeait pas que l’inspiration verbale fût nécessaire pour constituer un livre saint. Tradatus de sensibus sacræ Scripturæ, Louvain, 1704, c. xiv, p. 99-103. Le P. Assennet, qui rejetait la simple approbation du Saint-Esprit,

admettait, pour certains livres de la Bible, la révélation immédiate, et, pour d’autres, l’inspiration et une assistance spéciale. Theolotjixi scolastico-posiliva, Proleg., De locis theologicis, 1713. Dans sa Dissertation sur l’inspiration des livres sacres, dom Calmet exposait les deux opinions sans se prononcer ; il penchait toutefois vers l’opinion nouvelle. Commentaire littéral, Paris, 1724, t. VIII, p. 137-144. Cf. le commentaire sur II Tim., m, 16, et II Pet., i, 20, 21, ibid., p. 595, 840. Antoine Boucat expliquait l’action concomitante du Saint-Esprit par une motion et une assistance spéciale, et il déclarait suivre l’opinion commune des théologiens. Theologia Patrum scholasiico-dogmatica, 1726, t. ix, De Scriptura sacra. Le jésuite Edmond Simonnet, professeur à Pont-à-Mousson, n’admettait pas la 36 proposition de Lessius, mais il adoptait les deux premières. Institutiones theologicæ, 1725, Tradatus de regulis fidei, disp. I, a. 9, 10, t. vi. Le P. Gabriel Antoine suivait la même voie et employait presque les mêmes termes que son confrère Simonnet. Theologia universa, 1736, De fide divina, sect. iv, c. i, a. 4, t. i. Louis Habert est du même sentiment. Theologia dogmatica et moralis, 2^ édit., 1736, t. i, Proleg., c. vi, § 1. Pierre Collet n’admet la révélation immédiate de Dieu que quand l'écrivain sacré doit parler des mystères. Institutiones theologicæ, 1773, t. i, Proleg. Dans la Théologie de Wurzbourg, le P. Henri Kilber ne se contentait pas d’une simple assistance du Saint-Esprit ; lorsqu’il n’y avait pas révélation immédiate, il exigeait une inspiration des choses faite à l’intelligence de l’hagiographe. De principiis theologicis, 1749, dissert, i, c. I, a. 3, Paris, 1852, t. i, p. 15-25. L’abbé de Vence ne jugeait pas la révélation immédiate nécessaire, mais il exigeait une inspiration immédiate. Analyses et dissertedions, Nancy, 1742, t. I, dissert, préliminaire. Le P. Ignace Schunck. jésuite, admettait la dictée verbale de beaucoup de passages bibhques ; le plus souvent toutefois, dans les matières que les écrivains sacrés connaissaient par expérience, le sommaire seul leur avait été révélé, et pour le reste l’assistance du Saint-Esprit avait suffî pour empêcher l’erreur. Notio dogmatica sacræ Scripturæ, 1772, sect. VII. Jean-François Marchini adopte l’explication de Corneille de la Pierre. De divinitate et canonicitaie sacrorum Bibliorum, Turin, part. I. a. 5. Enfln, saint Alphonse de Liguori tient comme plus probable l’opinion d’après laquelle toutes les choses de l'Écriture ont été révélées, mais non tous les mots. Traité contre les hérétiques, § 5', dans Œuvre- ; complètes, trad. franc., Paris, 1836, t. xix, p. 200-203. /II. AU CONCILE DU VATICAN. — 1° Opinions nouvelles émises au xixe siècle. — La doctrine catholique sur la nature de l’inspiration continua à être enseignée au xix'ï siècle, quoique les ouvrages qui traitent cette question aient été moins nombreux que durant les siècles précédents. La caractéristique des études de cette époque est la distinction nettement établie entre la révélation immédiate, ou la prophétie, et l’inspiration scripturaire. Celle-ci n’entraîne pas, généralement parlant, une révélation directe du contenu de l'Écriture. On l’a fait consister dans une motion divine, qui pousse et détermine les hagiographes à écrire, dans une illumination intérieure qui éclaire leur intelligence et leur manifeste ce qu’ils doivent écrire, et une assistance spéciale, durant le travail de la rédaction, pour écarter de leur esprit et de leur œuvre toute erreur. Tel est, avec des nuances, l’enseignement élémentaire de J. H. Janssens, Hermencutica biblica, Liège, 1818, p. 40 (cf. Dausch, op. cit., p. 164-165), de Liebenrsmn, Institutiones theologicæ, 1819, t. II, part. II, c. i, a. 1, § 1, 2 ; plus développé de J. Perrone, Prælediones theologicæ, Tradatus de locis theologicis, Mayence, 1843, t. ix, p. 102, 103 ;.