Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.2.djvu/448

Cette page n’a pas encore été corrigée
2145
2146
INSPIRATION DE L’ECRITURE


diate des pensées et même des mots dans toutes les prophéties. Voir Kleutgen, dans Sclineemann, op. t.it., p. 477-478.

Bellarmin enseignait la même doctrine. Dans ses Controverses, De verbo Dei, t. I, c. xv, ayant à répondre à l’objection de Calvin contre la canonicité du II'" livre des Macchabées, dont l’auteur avouait un labeur personnel incompatible avec la révélation divine, faite aux prophètes, il disait que Dieu est l’auteur de tous les Livres saints, mais qu’il ne l’est pas de tous de la même manière. Aux prophètes il révélait l’avenir et en même temps il les assistait pour qu’aucune erreur ne s’introduisît dans leurs lettres. De la sorte, les prophètes n’avaient d’autre travail qu'à écrire eux-mêmes ou à dicter, comme Jérémie à Baruch. Aux autres écrivains sacrés, aux historiens notamment. Dieu ne révélait pas toujours ce qu’ils avaient à écrire, mais il les excitait à écrire ce qu’ils avaient vu et entendu, les choses dont ils se souvenaient, et en même temps il les assistait pour qu’ils n'écrivissent rien de faux, (ette assistance n’excluait pas le labeur de la pensée et de la rédaction. Saint Luc l’indique dans le prologue de son Évangile. Quant au pardon que demandait l’auteur du II « livre des Macchabées, il ne portait pas sur les erreurs qa’il aurait commises, car il savait n’en avoir pas commises, mais sur son discours moins ! >oigné, comme saint Paul disait aux Corinthiens qu’il itait inhabile dans l'élocution. Voir J. de la Servière, La théologie de Bellarmin, Paris, 1908, p. 2-8 ; Bellarmin, t. ii, col. 521.

La ; > « proposition de Lessius ne satisfaisait pas complètement Bellarmin ; toutefois, telle qu’elle était modifiée et expliquée dans l’Apologie, elle lui parut lolérable. Des explications données il résultait, en effet, qu’un livre, approuvé comme Lessius l’entendait, avait l’autorité de l'Écriture, mais non pas qu’il était Écriture par son origine et sa dignité. Or, il est de foi catholique que l'Écriture est divine par son origine et sa dignité. D’ailleuis, Lessius n’admettait pas qu’aucun livre, pas même le II'^ des Macchabées, fût devenu Écriture sainte par cette approbation subséquente du Saint-Esprit. Il ne proposait qu’une IJure possibilité, et il finit par déclarer à ses adversaires qu’un livre ainsi approuvé présenterait la même certitude de foi que s’il était la parole même de Dieu. Aucun théologien n’a souscrit à cette hypothèse, sinon André Duval, et Bonfrère, comme nous le dirons plus loin. Ajoutons dès maintenant que l’hypothèse de Lessius n’a pas été visée au concile du Vatican. Dans une congrégation générale, Mgr Casser, évêque de Brixen, au nom de la Députation de la foi, le déclara expressément. Le schéma, présenté aux Pères, niait qu’un livre profane pût devenir Écriture sainte par l’approbation de l'Église ; Lessius parlait de l’approbation de Dieu même, et il n’envisageait qu’une pure possibilité. Bien que son opinion soit fausse. Dieu peut par son témoignage confirmer un livre déjà composé, de telle sorte que ce livre ait une autorité divine, et que Dieu lui-même apparaisse être comme son auteur, sans qu’il le soit réellement. Ibid., p. 489-491 ; Collectio I.acensis, t. VII, p. 140-141.

Opstræt rapporte que, le Il mars 1692, les trois propositions de Lessius furent soutenues par le P. Van Oulers au collège des jésuites de Louvain. De lacis theologicis, Louvain, 1737, p. 78-80.

6° Théologiens du XVil^ et du XVllle siècles — Le xvii<e siècle est la grande époque, l'époque classique de l'étude de l’inspiration Les théologiens catholiques ont exposé de différentes manières leur sentiment touchant l’action de l’Esprit inspirateur sur les écrivains sacrés. Leurs opinions sont complexes et ne rentrent pas dans un cadre tout fait Je ne mentionnerai pas les nombreux théologiens et exégètes, qui

DICT. DE THÉOL. CATHOI, .

ont parlé de l’inspiration en termes généraux, sans prendre parti pour aucune opinion, ni ceux qui se sont bornés à reproduire l’enseignement de saint Thomas sur la prophétie et ses différents modes.

1. Je ne ferai que nommer ceux qui ont admis la révélation immédiate faite par Dieu à tous les écrivains sacrés sans exception, et par suite l’inspiration verbale : au xviie siècle en Espagne, Basile Ponce, Quæst. exposil., q. ii, c. ii. Cursus completus Scripturæ sacræ, de Migne, 1. 1, col. 1066 ; les docteurs de Salamanque. Cursus iheologicus. De fide, disp. I, dub. v, § 3, n. 123-125, édit. Palmé, t. xi, p. 164-165 ; cf. disp. III, dub. i, §3, n. 20, p. 196-197 ; en France,

Philippe Gamache, Sum. theot., I, q. i, c. xit ; In

Epist. I Pc., I, 20, 21 ; les jésuites Barradius, Comment, in concordiam ei hisloriam evangelicam, t. I, c. i, xvii ; Octavian de Tufo, Comment, in Ecclesiaslicum, prol. ; Jean Lorin, In Psalmos, prref., c. m ; Ps. xliv ; Tirin, Comment, in Jer., xxiii, 31 ; In II Mac, xv, 31Neesen, chanoine de Malines, Universa theologia, quæst. proœm., vii, viii ; Ange Rocai, In quatuor libros Regum annoiatio, proœm. i, sect. i ; Rangolius, In l. I Reg. comment., præf. ; Libert Fromond, In Epist. Il ad Tim., iii, 16 ; Jean de Sylveira, carme, Opuscul., 1, resol. I, q. i-viii (il réfute là 3 « proposition de Lessius) ; Noël Alexandre, Expositio litteralis et moralis j Ev. J.-C. secundum quatuor evangelistas, Luc, i, ] p. 897-899 ; Comment, litteralis et moralis in omnes I S. Pauli apostoli Epistolas, etc., II Tim., iii, 16, 17, j t. II, p. 43 ; Arnault, Difficultés contre M. Steyært, 71' difficulté, p. 82 (avec les censures de Louvain contre Lessius) ; — au xviiie siècle, 'Gaspar Juénin, Institutiones theologiæ, j)Toeg, àsevl. IV, c. iii, iv ; Humbelot, Sacrorum Bibliorum notio generalis seu compendium biblicum, t. I, c. i, q. m ; Annat, Apparalus ad positivam Iheologiam, t. II, a. 2, 4 ; Chérubin de Saint-Jo -eph, Summa criticæ sacras, disp. II, a. 3, 4, 1. 1, p. 99-136 ; cf. t. iv, disp. II, a. 1 ; disp. III, a. 1-7 ; C. Witasse, Tractatus de Deo ipsiusque proprietatibus. 1718, q. I, a. 5 ; Opstræt, théologien de Louvain, De locis theologicis decem difserlationes, 1737, dissert. 1, q. II ; Thomas de Charmes, Theologia universa, TraU. de prolegomenis, dissert. V, c. i, 3'= édit., Nancy, 1759, t. i ; Compendiosse institutiones theologicse ad usum seminarii Pictaviensis, 2'= édit., 1774, tr. De Scriptura, q. i ; Paul de Lyon, Tolius theologiae spécimen, 1723, tr. I, De Dei verbo, c. i ; Billuart, Summa Summæ S Thomæ, Tractatus de régula fidei, 1758, dissert. I, a. 2 ; Rabaudy, Exercit. de Scriptura, sect. II, § 1, dans Zaccaria, Thésaurus Iheologicus, t.. i ; Institutiones theologia : de Lyon, 1780, Tractatus de locis theologicis, dissert. I, c. i ; Compendium institutionum theologicarum, 1781, t. i, p. 39-42.

2. La nouvelle opinion, que le P. Pesch dit « plus commune après le concile de Trente », De inspiratione sacræ Scripturæ, p. 283 (ce qui est vrai au moins chez les théologiens de la Compagnie de Jésus), a eu de plus en plus de tenants, qui y ont apporté cependant quelques modifications ou perfectionnements. Ménochius reconnaissait dans les prophètes des scribes intelligents, à qui l’Esprit "Saint suggérait I et dictait ce qu’ils devaient écrire. Cependant, tout i dans la Bible n'était pas dicté, et les menus détails, j quecertainsjugcaientindignesdu Saint-Esprit, étaient au moins écrits sous sa direction. Comment, iotius Scripturæ, proleg., c. iv ; cf. In ps. xliv, 8, et in Epist. II Pet., i, 20, 21. Selon Tirin, le Saint-Esprit a laissé le plus souvent les écrivains sacrés à leur science naturelle pour le style et la manière d'écrire. D’où les uns sont plus éloquents que les autres, et l’auteur du 11^ livre des Macchabées a pu s’excuser de ce que son style était moins poli, moins soigné, moins beau Comment, in Il Mot., xv, 39.

VII,

68