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INSPIRATION DE L’ECRITURE


vision’- : vision corporelle qui affcctait les sens extérieurs, vision spiriUielle, qui donnait par la mémoire et l’imagination l’image d’un corps absent, non placé sous les yeux, vision intellectuelle, produite dans l’intelligence et par l’intelligence. Cette troisième sorte de vision était une révélation, une connaissance, une propliétie, une doctrine. La vision corporelle se rapportait à la vision intellectuelle, et celle-ci à la spirituelle. En effet, quand les yeux voient un objet, une image de cet objet est aussitôt produite dans l’esprit, mais cette image n’est saisie par l’esprit, que quand les yeux sont détournés de l’objet perçu. Elle devient alors pour un esprit raisonnable un signe de la chose et l’intelligence perçoit aussitôt ou cherche le sens du signe. C’est de la sorte que le Saint-Esprit, en illuminant l’intelligence du prophète, lui donnait de saisir l’image des choses corporelles imprimée dans son esprit. Au prophète, destitué de l’usage de ses sens, il donnait une vision ou il proférait des paroles. Ayant repris l’usage de ses sens, le prophète conservait le souvenir de ce qu’il avait vu ou entendu, il le voyait par la pensée, et son intelligence, aidée par un secours divin, comprenait ce qui lui avait été montré par les signes donnés. Ainsi l’Esprit Saint fait de véritables prophètes, qui voient et disent ce qu’ils ont vii, tandis que le mauvais esprit fait des démoniaques, des exaltés et de ; ^ faux prophètes. Il y a deux sortes de rapt de l’âme : l’un est joint à la vision intellectuelle, l’autre à la vision spirituelle. Moïse a vu Dieu de la première manière, saint Paul a été ravi au troisième ciel de la seconde manière. Dans la vision intellectuelle, il faut distinguer les choses vues de la lumière qui les éclaire pour que toutes soient vues et comprises. Cette lumière, c’est Dieu lui-même. D’où saint Paul fut certain d’avoir vu le troisième ciel, mais demeura incertain de la manière dont il l’avait vii, soit hors de son corps soit dans son corps. Son âme toutefois était ravie pour avoir cru entendre des choses ineffables. De Genesi ad litteram, t. XII, c. i-v, P. L., t. xxxiv, col. 4.53-458. Cf. c. vi-x, xi, xii, xix, XXIV, xxvi-xx%aii, XXXI, col. 458-461, 462, 464, 470, 474-475, 476-478, 479-t80.

Ailleurs, l’évêque d’Hippone dit que le Saint-Esprit n’agit pas sur tous les prophètes de la même manière. Il informe l’esprit des uns, en leur fournissant les images des choses ; il fait en sorte que l’intelligence d’autres comprenne ; il agit sur d’autres par ces deux sortes d’inspiration ; il en laisse même d’autres dans l’ignorance. Mais il informe l’esprit de deux manières : par songe ou par démonstration durant l’extase, qui est l’aliénation hors des sens corporels, afin que l’esprit du prophète, saisi par l’Esprit divin, s’occupe à comprendre et à voir les images qui lui sont fournies. L’intelligence n’est amenée à comprendre que d’une seule manière, quand le sens des images qui lui sont montrées, lui est révélé. De diversis quæslionibiis ad Simpliciannm, t. II, q. i, n. 1, t. xl, col. 129. Dans l’extase, il faut distinguer l’cfïroi et l’application aux choses supérieures telle que le souvenir des choses inférieures soit en quelque sorte perdu. Or, tous les saints, à qui les secrets de Dieu qui surpassent ce monde ont été révélés, ont eu cette extase. In ps. xxx, enar. ii, n. 2, t. XXXVI, col. 230.

Telle est, pour saint Augustin, l’inspiration ad loquendum des prophètes. Quant à l’inspiration ad scribendiim, qui a été voulue par Dieu, In ps. xxxii, II. 17, t. XXXVI, col. 317, elle a été aussi opérée par lui cjui, par l’action du Saint-Esprit, a écrit les Écritures à l’aide de ministres. In ps. viii, n. 7, 8, col. 111112 ; De ulililale credendi, c. vi, t. xlii, col. 75. Ces ministres sont Moïse, les prophètes et tous les écrivains sacrés. Or, le Verbe a proféré les paroles que Moïse rapporte dans la Genèse avec une vérité inté rieure, qu’aucun œil n’a vue ni aucune oreille n’a entendue, mais que l’Esprit du Verbe révélait à l’écrivain. De Genesi ad litteram, t. VIII, c. iii, n. G ; t. IX, c XIII, t. xxxiv, col. 375, 402. Moïse a connu et annoncé ce qui lui était révélé par l’Esprit de Dieu, De cii’itate Dei, t. XI, c. iv, n. 1, t. xli, col. 319 ; Conless. , t. XII, c. XVII, n. 24, t. xxxii, col. 834, et tandis qu’il écrivait, l’Esprit agissait par lui. De civitale Dei, I. XV, c. VIII, t. XLI, col. 446. Pour saint Augustin, les titres des psaumes sont de l’Esprit Saint. In ps. LXXXIll, n. 1, t. XXXVII, col. 1055-1056. Le Saint-Esprit nous a donné le psautier par le ministère de David. Serin., xxi, n. 3, t. xxxviii, col. 197. Les psaumes ont été dits et écrits, Spirilii Dei dictante. In ps. LXII, n. 1, t. XXXVI, col. 543. Le Saint-Esprit a donné, dans les lettres divines, par Salomon, beaucoup de saints préceptes, d’avis salutaires et de secrets divins. In ps. CXXV1, 1. 2, col. 1667, 1668. Les actes racontés dans le livre de Job n’ont pu être indiqués aux hommes dans les Écritures, nisi Spirilu Sancto révélante. Serm., xii, c. vi, t. xxxviii, col. 103. Quelle différence y a-t-il entre les livres canoniques et les livres non canoniques ? Les auteurs de ces derniers rapportent ce que le Saint-Esprit a révélé, sicut homincs, historica diligentia : ceux des premiers ont pu écrire, sicut prophelre inspiratione divina. De civitatc Dei, t. XII, c. xxxviii, t. xli, col. 598. Saint Jean n’aurait pas écrit le prologue du quatrième Évangile, s’il n’avait pas été inspiré. In Joa., tr. CXXIV, c. i, n. 1, t. XXXV, col. 1969. Saint Augustin n’explique pas plus explicitement l’inspiration des écrivains sacrés. Toutefois, il dit à propos de l’inspiration des évangélistes : Quia ipsi homines erant qui scripserunt Scripturas, non de se lucebant, sed ille erat lumen verum, qui illuminât omnem hominem venientem in Ininc mundum. In Joa., tr. I, n. 46, t. xxxv, col. 1382. Si les évangélistes avaient, pour écrire l’Évangile, leurs souvenirs personnels, ils n’en usaient néanmoins que sicut eis ministrabat Spiritus recordationis rerum quos scriberent. Ils ont donc écrit des choses différentes, mais sans erreur ni fausseté, quia unus Spiritus in omnibus fuit. Serm., ccxlvi, n. 1, t. xxxviii^ col 1153. Le Saint-Esprit ne leur donnait pas une révélation ; il gouvernait seulement leur intelligence. De consensu evangelistarum, t. III, c. ^^I, n. 30, t. xxxvi, col. 1176. Saint Augustin, d’autre part, sait très bien reconnaître les particularités propres à chacun des évangélistes. Voir t. i, col. 2342. Cf. Leitner, op. cit., p. 179-185.

8° Les écrivains postérieurs, tant grecs que latins, de l’ère patristique, ne disent rien de nouveau sur l’action inspiratrice du Saint-Esprit. Ils continuent à exposer les différentes manières dont Dieu révélait aux prophètes les choses futures et ses volontés ; ils accordent aux prophètes la connaissance des vérités que Dieu leur manifestait en visions et en songes, et dont ils se souvenaient pour les transmettre aux hommes par la parole ; ils distinguent ainsi les vrais prophètes, des devins et des faux prophètes. Ils traitent de la sorte presque toujours de la seule inspiration ad loquendum. Ainsi Cassiodore. La plupart cependant, en citant des textes scripturaires, affirment, en passant, l’inspiration ad scribendum, mais sans rien dire de sa nature propre. Ceux qui en traitent, le font en des sens différents. Ainsi l’évêque de Cart liage Licianus, à pi’opos de lettres de Notre-Seigneur qu’on disait tombées du ciel à Rome en l’honneur de saint Pierre, écrit à l’évêque Vincent r|ue Jésus-Christ n’avait pas envoyé du ciel des lettres à ses apôtres, mais qu’il avait rempli leurs cœurs du Saint-Esprit. Seul, le Décalogue a été miraculeusement écrit sur des tables de pierre. Des lettres n’ont été envoyées du ciel à aucun des prophètes et des apôtres. Einst.,