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INSPIRATION DE L’ECRITURE


leurs écrits prophétiques ou inspirés. Pour saint Cyrille, les Livres saints n’étaient donc pas rédigés sous la dictée du Saint-Esprit.

4° L’école exégétique d’Antioche, qui recherchait, avant tout, dans l’Écriture le sens littéral, a eu aussi une doctrine propre sur la nature de l’inspiration scripturaire. Il est nécessaire toutefois de séparer celle de Théodore de Mopsueste, le plus ancien de ses représentants dont les écrits nous soient parvenus, de celle des autres membres de cette école.

1. Tout en admettant que les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament provenaient du même Dieu, du Dieu unique, créateur de toutes choses, In Jonam, proœm., P. G., t. lxvi, col. 317, Théodore cependant rejetait hors du canon biblique Job, le Cantique, les Paralipomènes, Esdras et Néhémie, Esther, Tobie, Judith, la Sagesse, les deux livres des Macchabées, l’Épître de saint Jacques, la IP de saint Pierre, la II « et la III" de saint Jean, celle de Jude et l’Apocalypse. In Nahum, i, 1, col. 401. S’il tient comme inspirés tous les autres livres bibliques qu’il garde dans son canon, il ne leur attribue pas le même degré d’inspiration. L’Esprit inspirateur, qui communiquait tout aux écrivains sacrés, ne le faisait pas pour tous de la même manière ; il aidait diversement leurs facultés selon l’importance de l’ouvrage qu’il leur , faisait rédiger. Cela résulte de I Cor., xii, 6, 8, 11. Le verset 8 fournit le catalogue xapi.a[i, âTcov et permet de distinguer le discours de sagesse et le discours de science. Ibid. En composant de lui-même et pour l’utilité des autres les Proverbes et l’Ecclésiaste, Salomon n’a pas reçu la grâce de prophétie, mais seulement celle de prudence. Voir le 65" fragment de Théodore, lu au V" concile œcuménique, IP de Constantinople, en 553, qui énonce cette distinction. Mansi, Concil., t. ix, col. 223 ; P. G., t. lxvi, col. 697. (Il faut remplacer Ecclesiaslica du texte par Ecclesiastes, leçon de nombreux manuscrits.)

Cette distinction établie, Théodore a exposé, non pas a priori, mais d’après les multiples indices qu’il a relevés dans les écrits des prophètes, une théorie complète de la prophétie. Il range Moïse et David au nombre des prophètes, et on a compté que l’épithète de prophète est jointe 200 fois au nom de Moïse et 128 fois à celui de David. Le Pentateuque est l’œuvre du Saint-Esprit, et Moïse n’a pas écrit la Genèse comme il l’a voulu, mais comme le Saint-Esprit le renseignait. Cf. Kihn, Theodor von Mopsuesiia, p. 94. Les psaumes de David ont été composés par lui, son intelligence ayant reçu une illumination céleste et sa volonté un avertissement spirituel. In Oseani, i, 1, col. 123. Or, les prophètes ont connu leurs prédictions par une révélation divine. Ils désignent eux-mêmes dans leurs écrits l’action du Saint-Esprit sur eux indifféremment par les termes : parole de Dieu, vision ou audition. Ces mots ont, en effet, le même sens. Et en voici la raison : Aôyov yàp toù Kuptou tyjv èvépYei.av ôyofxdc’^et. Toû 6eo’j, xa6’yjv t^ TTveu(i.a- : ix7^ yjxçiii -àç àiroxa-Xinlietç ot TrpoçTÎTai Tcôvsaqi.Évtùv èSs)(ovTO’xai ôpocoiv, TO aÙTO S/] toGto xaXeï t7)v à7roxâX’Ji| ; t.v ty]v Ostav, xa6’T^v èyéveTO aùxoiç twv àSrjXcov Sé^STOai Trjv Yvûmv ÈTreoS/] yàp xal ôecopîaç xivàç à7 : oppY)Twç81à -rç, ttvsufiaTixîiç èvepyeîaç ItcItyjç 4°-*XiÇ sSsxovto tt^ç oîxetaç ol Tcpotp^rai, xal t’Jjv SiSaax-xXîxv xwv è(70jjt.évwv wç Trapde Tivoç XocXùÎIvtoç ûttyjxouov, xaxà xt)v £yyivo[xév7]v aùxolç £^)épy^^avlJTC6 xoû Ilve’JiJ.axoç xoû àyCou Sià xoùxo xal ôpaotv aùxo xal Aôyov Kupîou xaXsï’xal àxoyjv Se cjç elxo !  ;, … wa-ep àxo-Jj xivi SexoiJiévwv xtjv yvwaw. In Ahdiam, , 1, col. 308.

La révélation divine, faite aux prophètes, n’était pas un don permanent, elle ne leur était accordée qu’aux temps divers, auxquels ils recevaient la connaissance de l’avenir et donnaient leurs oracles. In

Oseam, i, 1 ; iii, 1, col. 125, 144. Mais il est croyable que tous recevaient dans l’extase la connaissance des choses les plus sublimes. Il fallait, en effet, que leurs intelligences fussent éloignées de la nature présente, pour qu’elles pussent s’appliquer à la révélation qui leur était faite de l’avenir. L’intelligence humaine n’est pas capable de bien s’occuper en même temps de plusieurs choses. Théodore compare cette extase au sommeil, durant lequel se forment les songes ; l’intelligence des prophètes émigré loin des choses de la terre, et placée sous la grâce du Saint-Esprit, elle contemple les choses qui lui sont présentées. Or, il arrivait parfois que, pendant l’extase, les prophètes étaient instruits par la grâce du Saint-Esprit de telle sorte qu’il leur semblait entendre quelqu’un leur parler et les renseigner, et ainsi ils étaient mis au courant des choses qu’ils avaient besoin de connaître. Parfois aussi, après une vision, ils entendaient réellement une voix qui leur parlait. D’autres fois, le prophète croyait voir quelque chose, précisément ce qu’il avait besoin d’apprendre par cette voie. La puissance de l’Esprit inspirateur était dite « la main du Seigneur » par laquelle Dieu atteignait, pour ainsi dire, l’intelligence du prophète et lui livrait la doctrine nécessaire. La manière dont cette puissance s’exerce est diteXî)[i.[X’x. Parfois, en effet. Dieu tournait subitement l’intelligence des prophètes sur ce qu’il voulait leur montrer, et ainsi ils recevaient avec un grand respect la science de l’avenir. La grâce du Saint-Esprit les avait saisis soudain et avait dirigé leur intelligence à la contemplation de ce que Dieu voulait leur montrer. In Nahum, I, 1, col. 404. Théodore de Mopsueste expose cette doctrine presque à chaque page de ses commentaires sur les prophètes. S’il exigeait l’extase dans la communication prophétique, il la ramenait au simple repos des sens extérieurs pendant que l’intelligence écoulait Dieu ou recevait ses communications.

Mais tous les livres inspirés n’avaient pas été écrits avec le don de l’inspiration prophétique. Salomon n’avait rédigé les Proverbes et l’Ecclésiaste qu’avec le don de sagesse ou de prudence ; il n’était pas prophète, mais un sage que le Saint-Esprit inspirait. Sa sagesse était surnaturelle, elle consistait en une illumination de l’Esprit. Elle ne lui donnait pas de scruter l’avenir ; elle lui servait seulement à instruire ses contemporains. Elle était donc notablement inférieure à l’inspiration prophétique. Cf. H. Kihn, Theodor von Mopsuesiia, etc., Fribourg-en-Brisgau, 1880, p. 93115 ; Leitner, op : cit., p. 154-159 ; L. Pirot, L’œuvre exécjélique de Théodore de Mopsueste, p. 159-175.

Les autres membres de l’école d’Antioche, nous le dirons bientôt, n’ont pas adopté l’enseignement de Théodore de Mopsueste sur les divers modes d’inspiration. Cet enseignement s’est conservé seulement, dans une certaine mesure, chez les nestoriens de Nisibe. Le persan Paul, qui avait enseigné dans cette ville, le livra, au vi<e siècle, à Junilius Africanus, qui était, non pas évêque, mais simplement maître des offices ou questeur du sacré palais à Constantinople. Junilius l’énonça dans ses Inslituta regularia divinæ logis. Il distinguait dans l’Écriture quatre manières de dire : l’histoire, la prophétie, le proverbe et le simple enseignement. L’histoire était le récit des choses passées ou présentes. Quand Moïse rapporte des prophéties, des révélations de l’Espr it et des paroles divines, il le fait comme historien. La prophétie est rerum latenlium prælerilarum aut pra’senfium aui futurarum ex divina inspiralione manifesiatio. C’est la manifestation de choses qui sont cachées en tout temps. Pour être scripturaire, la prophétie doit être faite par Dieu. Tout ce que les livres propliétiques contiennent n’est pas prophétie ; on y trouve des faits racontés pour prouver la prophétie, et aussi des pro-