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INSPIRATION DE L'ÉCRITURE


tion du sentiment et de l’intelligence, et la folie furieuse. Ils enseignèrent que les prophètes et les auteurs inspirés savaient ce qu’ils disaient et comprenaient ce qu’ils écrivaient. L’action inspiratrice de l’Esprit Saint ne les ravissait pas hors d’eux-mêmes et leur laissait, au contraire, le libre usage de leurs facultés naturelles. Cf. Leitner, op. cit., p. 114-132.

3° Les docteurs de l'école d’Alexandrie expliquaient par la prophétie la nature de l’inspiration scripturaire et bien qu’ils aient adopté la théorie de Philon sur l’extase des prophètes, ils maintenaient qu’elle n’enlevait pas aux auteurs inspirés l’exercice continuel de leurs facultés intérieures. Clément avait écrit un traité IIspl — poçyjTeLaç, qui est perdu et qui nous aurait fait connaître toute sa pensée sur ce sujet. Il attribue au Saint-Esprit tout ce que les prophètes ont dit : c’est lui qui parle, qui prédit, qui perle des défenses, qui rend témoignage, etc., par les prophètes.

Origène décrit l’action de l’Esprit inspirateur sur les prophètes par les expressions de ceux-ci pour indiquer leur inspiration. L’Esprit de Dieu est tombé sur eux ; la parole de Dieu leur a été adressée, ils ont eu des visions ; ils ont reçu la parole de Dieu. In Num., ht>mil. XV, n. 1, P. G., t. xii, col. G84. Ils avaient des visions ou des songes. Dans la vision, leur intelligence, éclairée par le Saint-Esprit, pensait et saisissait les similitudes des choses, les signes des vérités ; puisqu’une âme, unie à un corps, ne peut rien voir plus clairement. Selccia in Ezech., x, t. xiii, col. 801. En songe, les vérités divines ou l’avenir leur étaient manifestéts clairement ou obscurément, parce que, dans le sommeil, l’intelligence seule perçoit, Cont. Celsuni, t. I, n. 48, t. xi, col. 748-749. La vision reçue, le prophète devait prédire par l’esprit ce qu’il avait vu. In Ezech., homil. ii, t. xiii, col. 682. Son état prophétique était donc autre que celui de la Pythie. Celle-ci, chaque fois qu’elle croit rendre des oracles sous l’inspiration d’Apollon, accomplit des actions honteuses. Elle est hors d’ellemême et en fureur au point qu’elle ne peut pas se tenir. Cela ne peut pas être l'œuvre du Saint-Esprit. Celui qui est inspiré par le Saint-Esprit est plus perspicace que les plus doctes, quand la divinité est avec lui. Aussi les prophètes des juifs, éclairés par le Saint-Esprit, ont eu, par le contact de cet Esprit, l’esprit le plus perspicace et l'âme la plus splendide. Si, en vaticinant, la Pythie est hors d’elle-même, il faut en conclure que c’est l’esprit de ténèbres qui l’anime. Cont. Celsum, t. VII, n. 3, t. ix, col. 1425. Les prophètes comprenaient donc tout ce qu’ils disaient. Cf. Leitner, op. cit., p. 139-147 ; F.Prat, Origène, p. 120-121.

Pour Didyme, l’annonce de l’avenir n’est qu’un des modes dont quelques hommes divinement inspirés ont prédit les mystères du Christ. In Actus apostolorum, III, 21, P. G., t. xxxix, col. 1661. Quant à l'état des prophètes, tandis qu’ils annoncent l’avenir, Didyme réfute l’erreur des montanistes, qui prétendent que les prophètes, agités par le_ Saint-Esprit, ne comprennent pas ce qu’ils disent, tant que dure l’impulsion propht tique. Le mot excTactç a plusieurs sens : il signilie ou bien la stupeur produite par l’admiration, ou bien la privation de l’usage des sens pour s’appliquer aux choses spirituelles, ou bien même encore le délire, qu’il n’est pas permis d’attribuer aux prophètes. Tous comprenaient ce qu’ils annonçaient aux autres ; c'étaient des sages, qui savaient ce qu’ils disaient. Ibid., x, 10, col. 1677 ; In Epist. II ad Cor., V, 12, col. 1704-1705.

Juhenl’Apostat comparait les prophéties del’Ancien Testament aux divinations païennes qui portaient sur peu de points et avaient cessé chez les Hébreux et les Égyptiens. Saint Cyrille d’Alexandrie, qui nous l’apprend, Cont. Juliunum, t. II, P. G., t. xxvi, col. 508, réfute cette comparaison. Les faux devins,

il est vrai, simulaient la fureur divine et l'élan prophétique pour vendre facilement leurs mensonges. Mais quelle qu’ait été d’ailleurs la manière de leur imposture, ils étaient agités par l’esprit diabolique qui a cessé d’agir après la naissance du Christ, comme l’esprit prophétique lui-même a cessé chez les Hébreux, puisque le Christ a été la fin de la loi et des prophètes. Mais tous les anciens prophètes juifs furent saints et connurent l’avenir par une connaissance que Dieu leur communiqua par le Saint-Esprit, et c’est ainsi qu’ils proclamèrent les mystères du Christ. Après la venue du Christ, la grâce de l’ancienne prophétie a cessé sans doute, cependant maintenant encore Dieu inspire aux saints la coimaissance de l’avenir quand il le veut ; Julien ne peut donc pas dire que l’Esprit a fait défaut, car nous avons reçu une nouvelle grâce. L. III, col. 673. Dans ses autres ouvrages, saint Cyrille a abondamment décrit l’action du Saint-Esprit sur les vrais prophètes d’Israël. Recevoir une prophétie, c’est recevoir la parole de Dieu. Les prophètes recevaient, en effet, la connaissance de l’avenir par le Saint-Esprit ; ils ne la prenaient pas de leur propre cœur, qui peut-être aurait réprouvé ce qu’ils annonçaient ; mais ils ne disaient rien de faux, ne manifestant que ce que Dieu leur avait appris. Leurs discours étaient sincères et sans reproche. In Mcdachiam, tom. i, P. G., t. lxxi, col. 280. Les paroles qu’ils proféraient, ils les entendaient (le Saint-Esprit les leur révélait) ; ils les voyaient même, car Dieu les leur manifestait et les leur rendait, pour ainsi dire, présentes, de sorte qu’ils voyaient avant sa réalisation ce qu’ils annonçaient. In Amos, tom. 1, 11 ; tom. iii, iv ; In Michœam, t. lxxi, col. 409, 544, 561, 600 ; In Isaiam, t. I, t. lxx, col. 13. Les faux prophètes parlaient d’eux-mêmes et ils ne disaient pas ce qu’ils avaient entendu de la bouche de Dieu, et ils osaient feindre d’avoir reçu le don de prophétie. In Sophoniam, t. lxxi, col. 993 ; In Joa., t. I, t. lxxiii, col. 133. Ils mentaient donc contre la vérité, et la non-réalisation de leurs oracles en démontrait la fausseté. De adoratione in spiritu et veritate, 1 VI, t. lxviii, col. 429, 432. Les prophètes étaient inspirés, même, pour écrire les histoires. In Isaiam, t. I, t. lxx, col. 192. Quand ils rédigeaient les révélations qu’ils avaient reçues de Dieu, ils avaient leur part d’activité. La parole par laquelle ils exprimaient ce qu’ils avaient vu et entendu sortait de leur bouche, et ils avaient coutume de la voiler de quelque obscurité. In Isaiam, t. III, t. LXX, col. 609 ; In Amos, n. 75, t. lxxi, col. 552. L'Écriture, en effet, est un livre scellé par Dieu. In Isaiam, t. III, t. lxx, col. 656, 657. Doué de la grâce prophétique, l’auteur du ps. xxxix a proféré ses bonnes paroles comme si elles sortaient du bon trésor de son cœur, de telle sorte toutefois qu’elles ne fussent pas étrangères à la personne du Fils unique de Dieu. In ps. xxxix, t. lxix, col. 988. De même, bien que saint Jean et saint Paul aient été inspirés par le Saint-Esprit, saint Cyrille loue la prudence et la perspicacité de l’esprit du quatrième évangéliste à exposer la doctrine du ^'erbe, In Joa., t. I, c. ii, ix, x, t. Lxxiii, col. 32, 148, 176 ; il lui attribue d’expliquer ce qu’il avait d’abord indiqué sonunairement, t. I, c. X, col. 134 ; de ne prendre aucune précaution dans son récit, t. V, c. i, col. 745 ; de s'étonner de ce que Jésus ait pleuré, 1. VII et VIII, fragm., t. lxxiv, col. 56. Jean a écrit l'Évangile, t. XII, col. 745. Saint Paul a été prolixe. In Epist. ad Rom., col. 813. Il manque à la construction de sa phrase quelque chose qui exprimerait pleinement sa pensée. Ibid., col. 817. Ailleurs, saint Cyrille admire la bonté de l’apôtre qui rédige si bien les paroles que Dieu nous dispense. Ibid., col. 848. L’inspiration et même la révélation n’empêchaient donc ni les écrivains sacrés ni les prophètes d’avoir leur part personnelle dans la rédaction de