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INQUISITION


de Benoît XI, Paris, 1883, n. 420. Un peu plus tard Clément V donna ordre aux cardinaux Taillefer de la Chapelle et Bcrenger Frédal de l’imposer aux cvèques et aux inquisiteurs des provinces méridionales. Douais, Docamenls, t. ii, p. 308. Il est vrai que le 12 août 1308, le pontife révoqua cette mesure. Vidal, Bullaire, p. IG. Mais le principe de l’entente était posé et le concile de Vienne, en 1312, l’introduisit dans le droit. Clémentine !  !, t. V, tit. iii, c. 1, Multonim querela.

Ce décret célèbre donnait à l'évêque les mêmes pouvoirs qu'à l’inquisiteur. Ils pouvaient, indépendamment l’un de l’autre, citer et incarcérer les hérétiques ou les suspects. Mais ils ne devaient les enfermer au mur étroit, les soumettre à la torture et prononcer leur sentence que de concert. La surveillance des prisons appartenait également à l’un et à l’autre et chacun d’eux l’exerçait par un gardien assermenté.

La promulgation de cette loi souleva les protestations des inquisiteurs de Toulouse et de Carcassonne, qui prétendirent que, si on l’appliquait à la lettre, les procédures subiraient des retards préjudiciables à la défense de la foi. Histoire du Languedoc, édit. Privât, t. IX, p. 334-337. Bernard Gui émit l’espoir de voir révoquer une décrétale aussi gênante. Practica, édit. Douais, p. 188. Mais ces réclamations furent vaines, et les documents nous montrent les inquisiteurs n’agissant jamais qu’avec le concours du juge diocésain ou de ses délégués. Cf. Douais, Documents, p. cTii cxxviii. Le tribunal d’Inquisition de Pamiers nous offre, sous l'épiscopat de Jacques Fournier (1318 1326), le futur Benoît XII (13.34-1343), le type réalisé du tribunal monastico-diocésain tel que l’avaient conçu les l'ères du concile de Vienne. Vidal, Le tribunal d’Inquisition de Pamiers, p. 73 sq.

2°" Les auxiliaires de l’Inquisiteur : vicaires, lieutenants, conseillers, le socius.— Les inquisiteurs avaient, de à"oit commun, la faculté de se donner un vicaire ou délégué. Mais à l’origine celui ci ne pouvait obtenir une délégation pleine et entière. Sa fonction était uniquement de faire comparaître les personnes suspectes d’hérésie, de procéder à leur interrogatoire, d’entendre les témoins, en un mot, d’instruire leur procès. Le jugement proprement dit, la sentence de condamnation étaient toujours réservés à l’inquisiteur. Lettres d’Alexandre IV, d’Urbain IV, de Clément IV et de Nicolas IV, Ripoll, op. cit., 1. 1, p. 32$1-$217, 460, 466 ; t. II, p. 24. Cf. Tanon, op. cit., p. 188-189. Plus tard, comme les canons Mullorum querela et Nolentes des Clémentines, t. V, tit. iii, c. 1 et 2, parlaient d’une manière générale et sans aucune réserve, des substituts et commissaires que les inquisiteurs avaient le /droit de se donner, on en conclut que tous les pouvoirs pouvaient être commis à ces officiers subalternes, y compris le jugement et le prononcé de la sentence. Telle est en particulier l’opinion du célèbre canoniste Eymcric, dans son Direclorium, part. III, De institutione vicarii. Pourtant, en pratique, on ne voit pas que le uicarius, le vices gerens, le locum tenens inquisitoris, ait entrepris et mené seul à terme un procès inquisitorial.

Le socius n’est pas un co-inquisiteur comme on pourrait le croire d’après son titre. Ce n’est même pas un suppléant normal de l’inquisiteur dans l’exercice de ses fonctions judiciaires : son rôle est purement moral et spirituel. C’est un religieux de l’ordre, soit dominicain, soit franciscain, que l’inquisiteur s’est choisi ou qui lui a été donné pour compagnon, pendant qu’il est lui-même séparé de ses frères, pour demeurer avec lui, l’assister dans sa vie intérieure et au besoin lui servir de conseil dans l’accomplissement de sa mission. Un trait caractéristique du socius est qu’il accompagne l’inquisiteur à Rome, pour les .affaires de l’office : ad se assodandum, commorandum

et ad exsequendum ofpcium hereticæ prauitatis, et cum cisdem proccdcre Iiinc et inde, ctiam ad romanam curiam, dit Eymeric. Direclorium, part. III, q. x, p. 551.

L’inquisiteur avait, ce seml)Ie, d’autres conseillers que son socius. C'étaient des jurisconsultes, clercs ou laïques, aux lumières desquels il avait recours pour suppléer à l’insuffisance de ses connaissances en matière de droit. On remarque, surtout au xiV siècle, la présence de ces auxiliaires dans les tribunaux de l’Inquisition. Leur collaboration est attestée par les archives du tribunal de Pamiers (1318-1325). Vidal, Le tribunal d’Inquisition de Pamiers, p. 99-100. Zanchini, dont la science juridique est si remarquable, assistait en qualité de conseiller l’inquisiteur de Rimini. Cf. son ouvrage De liœreticis, préface de l'édition de Campegius. Un acte de 1371 mentionne pareillement des conseillers qui entouraient l’inquisiteur de Carcassonne. Doat, t. XXXV, fol. 136 ; cf. Tanon, op. cit., p. 195.

Notaires.

Après le lieutenant de l’inquisiteur,

c’est le greffier qui tient la première place dans im tribunal d’Inquisition. Il peut être choisi parmi les notaires publics. On voit parfois, dans les actes, des officiers désignés sous le titre de publicus auctoritate apostolica ofjicii inquisitionis notarius. Ce sont des notaires spéciaux de l’Inquisition, créés soit directement, soit indirectement, par la chancellerie apostolique. Quelle que fût l’origine de leur charge, les notaires juraient de remplir fidèlement leurs fonctions et d’en garder le secret. Cf. Bernard Gui, Practica, p. 61. Ils devenaient d’ailleurs de véritables officiers de l’Inquisition et jouissaient de tous les privilèges attachés à ce titre.

Les fonctions du notaire étaient très importantes. C’est lui qui « recueillait par écrit les interrogatoires des accusés et les dépositions des témoins, ainsi que les autres actes de la procédure et dressait tous les registres, originaux et copies. Il assistait à la question, constatait la manière dont elle était administrée et recueillait la confirmation de leurs aveux, lorsqu’ils les renouvelaient après avoir été déliés de la torture. Cf. Eymeric, part. III, Instructio accuratissima circa quæstioncs reorum, p. 481. Il avait parfois un rôle plus important et pouvait être appelé à suppléer momentanément le juge. » Tanon, op. cit., p. 198. Nous voyons un notaire de l’Inquisition de Carcassonne, Menet de Robécourt, à qui l’inquisiteur délègue le pouvoir « d’entendre et d'écrire en son absence et en l’absence de ses lieutenants, par manière d’information provisoire, les aveux et les dépositions en matière de foi. » Germain, Une consultation inquisitoriale au XI v siècle, dans Mémoires de la Sociétéarcliéologiquede Montpellier, t. IV, p. 336. Il est vrai que, si l’on en juge par les méfaits de cet officier, les notaires n’auraient guère été capables de remplir une fonction aussi délicate, Cf. Vidal, Menel de Robécourt, commis.wire de l’Inquisition de Carcassonne (1320-1340), dans le Moyen âge, 1903.

41= Jurés, agents, geôliers. — Au-dessous des notaires, divers ofiTiciers sont attachés au tribunal d’inquisition soit de façon permanente, soit à titre provisoire. Il semble qu’on les désigne par le qualificatif général de jurati, » assermentés ». Les sergents d’armes (servientes), les messagers (nuntii), les espions (exploratores) et les geôliers (carcerarii) sont des jurati, car tous ont prêté le sermçnt général.

Les sergents ou hommes d’armes étaient chargés de la capture et de la garde des hérétiques, en même temps qu’ils constituai nt l’escorte de l’inquisiteur. Les inquisiteurs de France s’entouraient de sergents ou familiers, « quoi qu’il semble que ce soit en Italie que ces servants de l’Inquisition se soient surtout multipliés. Innocent IV, dans une lettre aux inqui-