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INNOCENT IV — INNOCENT V


ses théologiens ont achevé de mettre au poiiiL la synthèse dont Innocent III avait esquissé les grandes lignes. Synthèse grandiose, mais fragile ; appuyée sur une exégèse sujette à caution, sur des considérations historiques douteuses, sur des précédents contestables, elle se voit dès l'époque que nous étudions, ébranlée par les violents coups de bélier que lui portent les adversaires. En face d’elle, ceux-ci en édifient une autre, dont les légistes frédériciens posent les premiers fondements. C’est l’intérêt du pontificat d’Innocent IV, pour le théologien de l'Église, qu’il ait vu se dresser l’une contre l’autre ces théories rivales, dont la lutte ouverte allait commencer quelque quarante ans plus tard.

I. SouKCES.

Il existe deux biogi-aphies anciennes d’Innocent IV, l’une anonyme : ex manuscriplo Bcrnardi Guidonis, dans Muratori, Scripiores rentin italicariim, t. m a, p. 589, l’autre de Nicolas de Curbio, chapelain du pape, que l’on trouvera également dans Muratori, ibid., p. 532. Une très courte notice dans le Liber pontificalis, édit. Duchesne, t. ii, p. 454. Il faut tenir compte également des nombreuses chroniques contemporaines que l’on trouvera reproduites dans Muratori, ift/d., dans Bouquet, Recueil des historiens des Gaules, et dans les Monumenta Germanise historica. Voir les références exactes ù ces diverses chroniques dans Realencyclopddie fur protestantisctie Théologie, 3' éd., t. IX, p. 122. Une mention spéciale doit être faite des Clironica majora de Mathieu Paris. Celui-ci écrit en Angleterre et du point de vue anglais ; il est violemment antipapiste, mais il a eu en main des documents intéressants et des renseignements de première valeur. — Pour ce qi i est des écrits d’Innocent lui-même : V Apparatus super quinque libros Decretalium a été imprimé à Strasbourg en 1477, à Venise en 1481, 1491, 1495, 1570, à Milan en 1501, à Lyon en 1525. Les pièces émanées de la chancellerie pontificale sont recensées et analysées sommairement dans Potthast, Regesta pontifwum romanorum, t. n p. 943-1285 et 21102124 qui reste un guide précieux et indispensable malgré ses lacunes ; un bon nombre de celles qui sont relatives à la querelle avec Frédéric II sont également analysées dans Bôhmer-Ficker, Regesta imperii, t. v a et 6. On trouvera les pièces au complet dans C. Hôfler, Albert von Beham und Regesten Pabst innocen : /V, publié dans la Bibliothek des literarischen Vereins in Stuttgart, t. xvi b (1847), dans Rodenberg, Monumenta Germaniæ historica, in-4°', Epistolse sæculi XIII, t. n et m ; dans Huillard-Bréholles, Historia diplomatica FrederiA II, t. vi a et b. Aucun des recueils précédents n’a pu utiliser les archives du Vatican. Elles l’ont été par E. Ge^rger, Les Registres d' Innocent IV ; 4 vot in-4. Berger ne donne le texte complet que des pièces importantes et seulement l’analyse des autres. Nombre de documents capitaux ont été insérés par Raynaldi dans les Annales ecclesiastici. Sur une lettre de ('.uyiik, grand Khan des Mongols à Innocent IV, voir Comptes rendus, de l’Acad. des Inscr. et Belles-Lettres.l'è2'l, p. 41.

II. Tbavaux.

Notices importantes dans les ouvrages généraux et spécialement dans Gregorovius, Geschichte der Stadt Rom, 3e édit., 1878, t. v, p. 217 sq. ; Jungmann, Disserlationcs selcctie in liistoriam ecclesiasticam, lS85, t. v, p. 41 8 sq. ; Mefele, Histoire des conciles, trad.Leclercq, t. v 6 ; Hauck, KirchengeschichteDeutsclilands, t. iv. et v. La plupart des ouvrages spéciaux se rapportent à la querelle d’Innocent et de Frédéric II. Voici les plus importants dans l’ordre chronologique : Lau, Der Untcrgang der Hohenstau/en, Hambourg, 1856 ; Cherrier, Histoire de la lutte des papes et îles empereurs de la maison de Souabe, Paris, 18411851 ; Huillard-Bréholles, Historia diplomatica. Introduction (vol. non numéroté de la collection), Paris, 1859 ; le même : Vie et correspondance de Pierre de la Vigne, Paris, 1865 ; Guibal, Les Hohenstaufen, Strasbourg, 1867 ; Zeller, L’empereur Frédéric II et la chute de l’empire germanique du moyen âge, Paris, 1885 ; Ktihler, Dos Verhdltnis Kaiser Friedrich II zu den Pàpsten seiner Zeit, 1888 ; Deslandres, 7nnocen( IV et la chute des Hohenstaufen, Paris, 1907. Sur les rapports d’Innocent et de la France ; E. Berger, Saint Louis et Innocent II, introduction au t. n des Registres, Paris, 1887 ; voir aussi les diverses histoires de saint Louis. Po.ir les relatioas avec l’Angleterre, F. A. Gasquet, H^nry the Third and the Church, a sladg of his ecclesiastical po’ic’i and o/ the relations beluteen England and Rime, Londres, 1905. E. Amann.

5. INNOCENT V, (pape 21 janvier — 22 juin 127()) -- Pierre de Champagny, plus coiuiu depuis son entrée en religion sous le nom de Pierre de Tarentaise, ou de Pierre de Bourgogne, était né, en 1225, dans le comté de Tarentaise, dépendance du duché de Savoie. Admis tout jeune dans l’ordre de Saint-Dominique, le 2 février 1234, il fut envoyé par ses supérieurs à l’université de Paris. Il y suivit probablement les leçons d’Albert le Grand et se montra dés lors le digne disciple d’un tel maître. Bachelier en 1256, il lut et expliqua les Sentences de Pierre Lombard jusqu’en 1258. En 1259, il obtint le grade de docteur, et au mois de septembre de cette année, il inaugura ses leçons de maître, qu’il continua durant sept années jusqu'à l'été de 1267. Mandonnet, Des écrits authentiques de saint Thomas d’Aquin, 2° édit., Fribourg, 1910, p. 126-127. Au mois de juin 1209, il prit part avec divers maîtres en théologie au chapitre général de Valenciennes, qui arrêta définitivement la règle des dominicains et fixa en particulier le règlement des études pour tous les collèges théologiques de l’ordre. Déni fie et Châtelain, Charlularium Universitalis Parisiensis, t. i, p. 385. Ses qualités distinguées et la confiance de ses confrères le portèrent à la charge de provincial de France, qu’il remplit de 1260 à 1267. Au mois d’octobre 1267, il redevint professeur à SaintJacques jusqu’en 1269. Il fut réélu cette même année provincial de France. Mais en 1272, Grégoire X, à la demande du clergé de Lyon, le nomma au siège archiépiscopal de cette ville, et, l’année suivante, il le créa cardinal-évêque d’Ostie et grand pénitencier de l'Église romaine. Au II « concile œcuménique de Lyon, assemblé (1274) principalement en vue de porter secours aux chrétientés orientales et d’amener la réunion des Grecs à l'Église latine, Pierre tint une place éminente ; il y prit plusieurs fois la parole avec une rare autorité, et c’est à lui qu'échut l’honneur de prononcer l’oraison funèbre de saint Bonaventure. Aussi, à la mort de Grégoire X, survenue à Arezzo le 10 janvier 1276, il fut élu, d’une voix unanime, pour lui succéder. Son élection eut lieu le 21 du même mois. Il prit le nom d’Innocent V ; c'était le premier dominicain appelé à ceindre la tiare.

Sur le trône pontifical, sa grande préoccupation, comme celle de son prédécesseur, fut d’assurer à l'Église la paix et l’union à l’intérieur et de la protéger contre les ennemis du dehors, surtout contre les musulmans. Avant même de quitter Arezzo pour Rome, où il allait se faire sacrer, il écrivit aux Génois, les exhortant vivement à rétablir la concorde dans leur cité. Contre les habitants de Pavie, de Vérone et de plusieurs autres villes, fauteurs obstinés de troubles et de révoltes, il dut d’abord recourir aux censures ecclésiastiques. Mais, à force d’admonestations et de négociations, il parvint enfin à ménager entre Pise et le reste de la Toscane un traité de paix qui valut à cette turbulente région quelques années d’une heureuse et féconde tranquillité. Toutefois la politique italienne d" Innocent fut beaucoup plus favorable que celle de son prédécesseur à la cause angevine. Par ailleurs son attention se portait aussi sur les dangers et les angoisses de l’Espagne, où Alphonse de Castille et Jacques d’Aragon étaient aux prises avec BenYousouf, le redoutable sultan du Maroc, que les Maures de la péninsule avaient appelé à leur aide. Par ses lettres au clergé et par la concession d’un décime de guerre à prélever sans tarder sur les revenus ecclésiastiques, il soutint le zèle pour la croisade nationale. D’autre part, il envoyait une ambassade solennelle à Michel Paléologue et à son fils Andronic, et pressait ces deux princes de réaliser pratiquement