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rences dans les élections des dignitaires ecclé iastique .cnipiitements sur la justice d’Église, se sont mulUplic ; jusqu’en 1208, et voici qu’en cette année l’élection à l’archevêché de Cantorbcry va être le poijil de départ d’une aventure terrible pour l’Angleterre. Trois concurrents sont en querelle pour la possession du trône primatial : il ; ont porté leur différend en cour de Rome. San ; cherclicr à débrouiller un tel imbroglio, Innocent casse tout ce qui s’e^l fait, profite de la réunion à Rome d’un nombre suffi-ant d’électeurs cl fait élire en sa pré. ence Etienne Laaglon. Fureur du roi.Jean ; il refu-e net d’accepter cette élection et menace même de faire schisme. « Après tout, écrit-il au pape, l’Angleterre possède assez d’archevêques, d’évêques et de prélats instruits pour que nous puissions nous passer des étrangers que Rome nous impo e. « b’ort de son droit. Innocent passe outre à cette protestation, Potthast, n. 3111, et consacre Langton à Vilerbe. Cette fois, la guerre est déclarée ; elle durera sept ans. « On y épuisera d’une part tout l’ar.enal des armes et des châtiments d’Église, de l’autre toutes les formes de persécution et de spoliation qu’un despote pouvait imaginer. Dans cette guerre, si âprenient soutenue, Innocent va jusqu’au bout de la gamme ascendante des châtiments d’Église, mais il ne passera d’une note à l’autre qu’après avoir essayé tous les moyens d’entente et constaté l’impossibilité d’un accommodement. Et il continue les négociations tout en sévissant avec un desir de conciliation dont la sincérité est hors de doute. » Luchaire, Les roi)qu(és vassales, p. 203. Nous n’entrerons pa ; dans le détail de tous ces événement ; qu’il nous suffise de marquer les principales étapes : d’abord l’iiitcrdil absolu lancé par les légats sur toutes les possessions de Jean ; puis l’excommunication personnelle du roi. Puis, comme ces mesures n’ont pas produit l’effet attendu, Innocenta la fin de 12Il délie tous les sujets de Jean de leur serment de fidélité ; enfin, en 1212, 1e pape prononce la déposition du Plantagenet et le transfert de sa couronne à un autre souverain. Philippe-Auguste est invité à se mettre en campagne pour cette nouvelle croisade, où il va plus joyeusement qu’à celle d’Orient. La flotte du Capétien est rassemblée à Boulogne ; la descente en Angleterre S3 prépare. JMais, coup de théâtre ! le 13 mai 1213, devant ce péril imminent, Jean Sans Terre cède, s’humilie au delà de tout ce qu’espérait Innocent. Toutes les lois de proscription et de spoliation sont retirées ; plus que cela, Jean résigne sa couronne entre les mains du légat ; l’Angleterre devient le domaine de saint Pierre ; cette vassalité se marquera par un tribut annuel de mille livres sterling, et par l’hommage féodal que le roi prête sur le champ entre les mains du légat. Et ce ne sont point là vaines formule ; ou simples manières de parler. Innocent en veut faire une réalité : « Nous désirons, écrit-il, selon le devoir de notre office, diriger en Angleterre non seulement le sacerdoce, mais la royauté. » Potthast, n. 4889.

Le premier devoir d’un suzerain est de défendre son vassal ; c’e-t au nom du droit féodal qu’Innocent va maintenant protéger Jean Sans Terre contre Philippe-Auguste. Le glaive que la papauté avait mis entre les mains du Capétien, il faut qu’il rentre maintenant au fourreau sur l’injonction de cette même puissance. I-]t quand, au lendemain de la Roche-aux-Moincs, .Jean Sans Terre se trouve en face d’un nouveau péril, la révolte des nobles anglais contre l’autorité de polique du roi. Innocent III interviendra de nouveau. La Grande Charte que les rebelles ont arrachée à la faiblesse royale, le 15 juin 1215, Innocent la déchire par une bulle du 24 août de la même année. Que lui importe que cet acte exaspère les insurgés, et rende définitive leur rupture avec Rome ? Protecteur

dévoué de son vassal. Innocent, pour le défendre, anathématisera les révoltés et tout spécialement ce même Langton qu’il a jadis élevé lui-même au siège de (.antorbéry contre la volonté de Jean ; et Langton devra finalement se soumettre à la sentence de déposition que confirmera le concile de Latran.

Inniicent et les autres royaumes.

Sans être aussi tragiques, les rapports d’Innocent avec les autres souverains de l’Europe témoignent d’une même application à faire triompher les règles de la morale et du droit. Alphonse IX, roi de Léon, a épousé Bérengère fille du roi de Caslille, sa nièce à la mode de Bretagne. Innocent s’élève vivement contre cette union qu’il qualifie d’incestueuse ; finalement l’interdit est lajicé contre le royaume de Léon ; il ne sera levé qu’en 1204 quand Bérengère se sera définitivement retirée dans sa famille. — Pierre II d’Aragon recherche en mariage Blanche de Navarre, sa parente ; le pape s’oppose au mariage. Fils soumis de l’Église, Pierre renonce au mariage projeté, et épouse Marie, fille de Guillaume de ÎNIontpellier ; mais bien vite il se lasse de sa femme et cherche à faire annuler son mariage sous le prétexte d’une vagué parenté. Innocent trouve les motifs insuffisants et refuse l’annulation demandée. Au cours d’un voyage à Rome, en 1204, à l’occasion de ce procès matrimonial, Pierre est amené à renouveler l’hommage de ; on royaume au Saint-Siège et à recevoir des mains du souverain pontife la couronne d’Aragon. Quand il meurt en 1213, c’est le pape, qui, au nom du droit féodal, prendra la tutelle de Sanche F fils du roi défunt. — De même en Portugal, il prétend bien exercer les droits que lui confère la donation faite jadis au Saint-Siège par Alphonse F"’. El comme le roi Sanche F^fait quelques difficultés à reconnaître ses obligations de vassal el de censitaire du Saint-Siège, il s’ensuit entre lui et le pape une crise qui est à l’état aigu entre 1208 et 1211, Potthast, n. 4187, et qui ne sera résolue que par la maladie du roi. A la mort de celui-ci. Innocent prend sous sa tutelle le jeune Alphonse II ; et comme l’exécution du testament royal donne lieu à de graves difficultés, allant jusqu’à la guerre civile, c’est encore la justice romaine qui est chargée d’appointer les confliF portugais.

La Hongrie, de par ses origines mêmes, est encore plus largement ouverte à l’influence du Saint-Siège. Saint Etienne († 1038), qui en a fait le royaume apostolique, fut à la fois prince temporel et légat du souverain pontife. Rien d’étonnant donc que Rome revendique la suzeraineté du royaume nouveau. A la fin du xTi<’siècle néanmoins, en Hongrie comme ailleurs, on voit commencer la lutte entre les principes nationalistes et les traditions ecclésiastiques ; mais Innocent n’épargnera rien pour empêcher de laisser prescrire les droits de la papauté. C’est ainsi qu’il interviendra dans la guerre civile qui met aux prises depuis 1197 les deux fils de Bêla III, Emeri et André. Finalement vainqueur, grâce surtout à la protection d’Innocent, Tlmeri se montrera disposé dans l’ensemble à suivre les directions de la papauté. Sun la demande du pontife, il intervient vigoureusement en Bosnie pour arrêter les progrès de fhérésie bogomile. — Ladislas, duc de Pologne, s’est rendu fameux par son absolu mépris de tous les droits ecclésiastiques. Le jour où un compte rendu exact arrive à Rome de ce qui s’est passé en cette terre lointaine, Innocent adresse au souverain un formidable réquisitoire, qui le ramena pour quelque temps à de meilleurs sentiments. Potthast, n. 2948-2960. — Ottokar, roi de Bohême, est sollicité lui aussi de reconnaître l’autorité spéciale du Saint-Siège sur son royaume et revoit la couronne à Mcrsebourg d’un légat du pape.

— La Scandinavie malgré son éloignement n’échappe