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IMPOSITION DES MAINS


publié sur ce sujet dans les Recherches de science religieuse, septombre-octobre 1912, p. 448-460, on a pu citer une longue liste d’auteurs, tous spécialistes en exégèse ou en histoire des institutions primitives de l'Église, qui l’admettent, p. 448. Aussi bien cette interprétai ion est-elle de beaucoup la plus ancienne ; jusqu'à l’Ambrosiaster et à Théodore de Mopsueste, on n’en connut point d’autres. Tertullien, De pudicitia, xvHi. 9 ; cf. xviii, 1, cite ce verset pour prouver que l’apôtre interdisait la réconciliation de certains pécheurs. Au concile de Carthage, en 256, l'évêque Aurcle d’Utique l’oppose aussi à la réconciliation des hérétiques par la seule imposition des mains : s’en contenter, c’est se rendre coupable de cette « participation aux péchés d’autrui que proscrit l’apôtre. » Sent, episc. 41. Opéra S. Cypriani, édit. Hartcl, t. i, p. 51. L’auteur du De aleatoribus, 4, un évêque, on a même dit un pape du iiie siècle, le cite, parmi beaucoup d’autres, comme condamnant les chefs d'Église qui pardonnent trop aisément aux coupables : Nonne ipsi delinqiientinni se pondère oneranl ? Opéra Cypriani, édit. Hartei, l. iii, p. 95. Saint Cyprien peut être considéré comme lui donnant le même sens, du peccantes coram omnibus ari/ue que l’opinion commune entend, au contraire, des seuls presljylres reconnus coupables. Teslini., iii, 76, édit. Hartei, t. I, 172. O’igéne prend également le v, 20 au sens général. In Jfs. Xauc, hom. vii, 6, P. G., t. xii, col. 861. Saint Augustin suit, en cela saint Cyprien. Serm., Lxxxii, 5 ; Lxxxiii, 7, P. L., t. xxxviii, col. 510, 519 ; de même, De fide et operibus, 3, 4, t. XL, col. 200 : aux montanistes qui s’autorisent eux aussi du ne commuuicaveris peccalis alicnis pour refuser leur communion à ceux qu’ils estiment insuffisamment purifiés par la seule imposition des mains, il ne reproche nullement d’entendre des pécheurs en général ce qui serait dit des clercs précipitamment ordonnés. Lui aussi applique le mot aux pécheurs, quels qu’ils soient. Il conteste uniquement que la communication aux péchés d’autrui ainsi proscrite résulte de la seule vie en commun ; elle suppose en plus l’approbation ou l’imitation de leurs fautes. Epist.. cviii, 3, 7, P. /, ., t. xxxiii, col. 409 ; Cont. epist. Parmen., ii, 20, 39 ; iii, 1, 2 ; Cont. Crescon., iii, 36, 40, P. L., t. xuu, col. 80, 83, 517. Saint Pacien de Barcelone, Parœnesis ad pœnilentiam, 8 ; Epist., iii, 19, l’applique formellemen l à la réconcil iation par le prêtre du pécheur qui dissimule ses fautes : le pénitent ainsi réconcilié corrompt ta masse tout entière et met en cause la responsabilité du prêtre qui l’admet à la communion. P. L., t. xiii, col. 1076, 1086. Si l’on ajoute que saint Jean Chrysostome lui-même, Inl rz7n., homil. xv, 2, P. G., t. Lxii, col. 582, tout en appliquant le verset 22 à l’ordination, entend, au contraire, comme saint Cyprien et à rencontre de l’opinion commune, les trois versets précédents de la pénitence et du traitement des pécheurs en général, on comprendra qu’il peut y avoir intérêt à comparer les deux interprétations et à rechercher celle qui répond le mieux à l’ens ; mble du texte. Or, il n’j' a dans le texte, pour recommander l’opinion commune, que l’expression même d’imposition des mains. Nulle part, le Nouveau Testament ne l’applique à la réconciliation des pécheurs, et saint Paul, dans deux autres passages des Épîtres à Timothée, ITim., iv. 14 ; IITini., i, 6, la mentionne à propos de l’ordination. On conclut de là qu’ici encore il doit l’entendre de même. Mais la question est précisément s’il n’y a pas lieu de reconnaître ici un emploi spécial de ce rite dont l’usage est si divers. D’une part, la chose est possible. Les Épîtres pastorales ont plusieurs expressions qui leur sont propres, et les acceptions diverses, quoique juxtaposées, d’un même mol sont fréquentes chez saint Paul. Dans ce chapitre

même, le mot TrpscrpÛTepoç désigne au j ? 1 un vieillard et au f 17, d’après l’opinion commune tout au moins, un presbytre : le mot nposax{ùX£< ;, 17, désigne les chefs de la communauté alors qu’au c. iii, 4, 5, 12, il est dit des chefs de famille. Il n’y aurait donc rien d'étrange que l’imposition des mains y ait une signification particulière. D’autre part, il est incontestable que la réconciliation des pécheurs, dès qu’elle apparaît dans la littérature chrétienne, comporte l’imposition des mains ; elle est même communément désignée par cette expression. A l'époque de saint Cyprien, l’usage en est manifestement très ancien ; la formule imponere manum in pœnilentiam est une foi’mule toute faite. S. Cyprien, Epist., xv, 1 : Anie manum ab episcopo et clero in pœnitenliam impositam ; xvi, 2 : per manus impositionem episcopi et cleri jus communicationis accipiant ; … nondum manu eis ab episcopo et clero imposita. Cf. xvii, 2 ; xviii, 1 ; xix, 2, etc. Le pape saint Etienne l’emploie comme traditionnelle à propos de la réconciliation des hérétiques : Nihil innovetur nisi quod traditum est, ut manus illis imponatur in psenitentiam : prescription qu’Eusèbe résume par cette formule très expressive ; (xôvt) xpîjfîôai tt) 8tà )(eipâiv èmdéazcùç eixfl- ^- ^-t '^^> 2. Enfin l’affirmation de la Didascalie des apôtres est on ne peut plus explicite ; l’imposition des mains est pour le pénitent ce qu’est le baptême pour le converti du paganisme, II, 41, 2, édit. Funk, p. 131. Voilà donc un usage, un rite, dont le caractère traditionnel ne saurait s’expliquer que par son origine apostolique. Les documents du iie siècle ne permettent pas, il est vrai, de saisir ce lien de dépendance. Mais il en est de même pour tous les usages de l’imposition des mains : leur dérivation apostolique se déduit plutôt qu’elle ne se constate. Ni pour la confirmation ni pour l’ordination, il n’y a aucun texte du iie siècle qui en atteste l’usage. Mentionnée dans les écrits de l'âge apostolique, elle ne reparaît ensuite que chez les écrivains du m » siècle, où apparaît aussi l’imposition des mainf dans la réconciliation des pécheurs. La lacune documentaire est donc d’ordre général et elle s’explique par le caractère général des œuvres de cette époque qui nous sont parvenues. Malgré l’absence de témoignages positifs, personne cependant ne songe aujourd’hui à contester la continuité de la pratique ecclésiastique. « Il n’y a pas de doute, écrit Behm à ce propos, que l’usage de l’imposition des mains si largement répandu dans l'Église [du iiie siècle] ne se rattache à la pratique primitive ; c’est en droite ligne et en partant de la période de début que le développement s’est produit ; ici encore, suivant la loi de l’histoire des rites, c’est la pratique du commencement qui est devenue la tradit ion. » Die Handauflegung im Urchristentum, p. 61. On ne saurait par conséquent alléguer non plus le silence de l'époque intermédiaire pour refuser de rapporter à l'époque apostolique l’imposition des mains pénitentiellc, telle qu’elle se pratique au iiie siècle.

b. Sens de la communication aux péchés d’autrui. — Or, ce que les habitudes lexicographiques de saint Paul montrent possible et ce que l’histoire la plus ancienne de la réconciliation pénitentielle suggère, le contexte immédiat du passage en question l’impose. La « communion aux péchés d’autrui, » qui, de l’avis commun, y est présentée comme la conséquence d’une imposition des mains prématurée, ne peut s’entendre en effet que de l’admission dans la communauté chrétienne de pécheurs insuffisamment purifiés. Pour l’entendre d’une contamination par les fautes ultérieures d’un presbytre, de celui qui lui a imposé les mains, il a fallu partir de l’idée préconçue qu’il s’agissait de l’ordination. On ne cite pas, en effet, d’exemple où la formule « communier aux péchés d’autrui » signifie