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INFIDÈLES


plus touchantes, qui portent à l’aimer, et même au premier rang ; et comme l’acte de charité parfaite aime Dieu pour sa perfection et par-dessus toutes choses, cet acte naturel d’amour de Dieu est analogue à l’acte de charité théologale, qui est surnaturel ; analogue seulement, d’après ces théologiens. Mais Ripalda en fait ua acte véritable de charité parfaite, en le supposant produit par un principe surnaturel, par une grâce élevante, suivant sa théorie que nous venons d’exposer. Il se flatte donc d’avoir ainsi, à la portée des infidèles négatifs, un acte de charité parfaite et surnaturelle, acte qui contient le voeu d’accomplir toutes ses graves obligations, et auquel on reconnaît la propriété de justifier, de réconcilier l’âme avec Oieu. Ibid., n. 115, p. 264 et ailleurs.

c. En Un nous devons noter l’hésitation par laquelle Ripalda termin rexp38( : de son système et l’accablante supériorité que malgré tout il reconnaît à la thèse commune. « Il y en aura peut-être, dit-il, qui oseront librement souscrire à la doctrine que je viens de développer. Pour moi, en matière si grave je ne l’ose p s du tout… Puisque le consentement commun des thé’jlogiens, paraît-il, voit dans les textes de saint Paul et du concile de Trente cités au n. 116 la nécessité absolue, in re, de l’acte de foi stricte pour parvenir à la justification, il faut dire que, par une divine loi positive et libre, jamais la grâce, du moins efïica’C, n’est donnée pour faire un acte d’amour ds Dieu et de conversion surnaturelle, sans qu’ait précédé l’instruction (qui transmet la révélation proprement dite, élément absolument nécessaire) de la foi stricte… En conséquence, toutes les choses que nous venons de dire en faveur d’un secours qui sans l’acte de foi stricte suffirait au salut, nous ne les avons proposées que par manière de doute, et non pas d’assentiment, afin que les docteurs ou les confirment par leu suffrage ou les corrigent par leur jugement, et p ir leur> recherches éclaircissent tout ce qui précède. . Ibid., n. r23, p. 268.

Dernière pensée de Ripalda. — On la trouve dans son trait De flde diuina, composé vers la fin de sa vie (et publié après sa mort, en 1652), disp. XVII, sect. xxiii. Son système a été critiqué dans l’intervalle par plusieurs célèbres théologiens ; le cardinal de Lugo, surtout, l’a fait d’une manière très détaillée et approfondie, dans son traité De fide, disp. XII. Quelle est alors l’altitude de Ripalda ?

(* « a) Il profite de quelques critiques de détail. Ainsi Lugo lui reprochait avec raison d’avoir, dans son De ente supern., disp. XX, n. 78, 1. 1, p. 248 ; disp. LXIII, n. 21, 22, t. II, p. 256 ; n. 26, p. 259, défini la foi stricte et théologale un assentiment donné à la révélation divine proposée par l’Église, et utilisé cette définition pour la défense de son système. Ripalda, tout en cherchant à s’expliquer, reconnaît que la proposition de la révélation par le ministère de l’Église n’est pas nécessaire pour taire un acte de foi théologale ; si, en décrivant la foi stricte, il a mentionné le fait de la proposition par l’Église, c’était afin d’opposer à la foi la gi’la foi stricte par un contraste plus frappant, en prenant le cas le plus c nnu et le iilus régulier. De fide, édit, Vives, Paris, 1873, disp. XVII, n. 146. t. vii, p. 383. (Cette édition est pleine de fautes, mais surtout dans cette fin du t. vii, grâce ù un correcteur malhabile qui a inventé de mettre le mot cffcctus partout où l’auteur, dans son livre devenu introuva ! )le, avait mis aff dus ; ce qui rend quantité de phrases inintelligibles, car Ripalda parle à tout moment de rinfiuence de la foi, stricte ou large, sur les autres actes salutaires qui à sa lumière disposent à la j istification, lesquels sont des affctus, ou actes de la par.ie aff.-ctiue d ; l’âme, tels que l’espérance, la charité, la contrition parfaite ou imparfaite). Sur

cette vérité moralement certaine et incontestable, que la proposition de la révélation par l’Église n’est pas indispensable à l’acte de foi théologale et justifiante, et sur les conséquences consolantes de celle vérité pour le salut possible des âmes de bonne foi placées en dehors du corps de l’ÉgUse, voir Foi, t. VI, col. 163 sq.

bj II emploie son habileté subtile à maintenir théologiqucment son système par divers procédés. — a. Il prend plus que jamais l’ofiensive contre les principales preuves scripturaires et traditionnelles de la thèse commune, que Lugo avait données et défendues contre ses attaques. Aux réponses de Lugo il réplique, ibid., disp. XVII, n. 147-162, p. 384-388. Nous tiendrons compte de ses répliques, en exposant et défendant les preuves de la thèse, ainsi que des textes qu’il allègue à son tour par manière d’arguments, n. 163171. — b. Du reste, il invoque surtout, comme arguments, des « raisons théologiques », n. 172-189. Elles sont fondées sur un principe dont il fait un continuel usage, et qu’il a posé dès le commencement de la discussion, ibid., n. 144 : « La foi, dit-il, est nécessaire à la justification dans la mesure où elle est nécessaire aux affections surnaturelles qui disposent à cette justification, et particulièrement à ce qu’on appelle la dernière disposition, comme l’amour de Dieu et la contrition parfaite, en dehors du sacrement, ou l’attrition, avec le sacrement. Toute la controverse revient donc à examiner si la dernière disposition ne peut être produite sans la foi stricte, appuyée à la révélation divine, si cette foi ne peut être remplacée par toute autre illustration surnaturelle pour le même résultat. » Ce prétendu principe, affirmé sans aucune preuve, nous paraît faux, ainsi que sa conséquence. La foi, comme disposition à la justification, ne tire pas toute sa valeur de ce qu’elle est une « illustration surnaturelle », ni de ce qu’elle prépare la voie aux autres actes salutaires, spécialement à la dernière disposition, la plus Importante de toutes (parce que la justification la suit immédiatement et immanquablement). La foi « stricte, appuyée à la révélation divine », vaut par elle-même, et non pas seulement par ses suites. Comme « fondement de la justification », concile de Trente, sess. vi, c. viii, Denzinger-Bannwarl, n. 801, elle vaut par sa solidité, sa fermeté spéciale qui lui vient de ce qu’elle s’appuye sur l’autorité incomparable du témoignage divin, avantage qui manque aux autres « illustrations surnaturelles dont parle Ripalda, la science infuse par exemple, et qui manque particulièrement à la " foi large ». Elle vaut par l’hommage spécial qu’elle rend à Dieu, en croyant celui-ci sur parole et avec une certitude suprême ; par le mérite qui lui vient de ce qu’elle n’est pas une « illustration surnaturelle » de l’intelligence sans aucune liberté, comme, par exemple, les « illustrations » ou « illuminations » de la grâce prévenante : non, la foi stricte est libre, parce qu’elle doit venir d’un acte libre et surnaturel de la volonté, ex impcrio voluntatis, ex pio crrdulitatis afj^ctu. Con.-édons à Ripalda que la foi stricte n’est pas absolument requise par la nature des choses pour arriver à la justification, ou ii la production d’un acte de contrition parfaite, ou d’altrilion avec le sacrement ; Dieu a pu toutefois, â cause de sa valeur spéciale, l’exiger pour arriver là, de manière à lui donner une nécessité de moyen absolue. Qu’il l’ait /ait, les preuves de la thèse le feront voir. — c. Par la dernière « raison théologique » de Ripalda, le problème du salut des infidèles est directement mis en cause, ce qui nous intéresse donc spécialement. Son système, dll-il en substance, donne à ce problème une solution bien plus simple et plus facile que n’est la solution qu’il appelle t commune », c’est-à-dire « celle de Suarez, Valentia,