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INFIDÈLES

’Après avoir montré que, dans leur énumération des dispositions pour être justifié, les Pères du concile ont eu raison de mettre Vacle de foi en premier lieu, cf. Denzinger-Bannwart, n. 798, Véga réduit leur doctrine sur cet acte à quatre points : i" point : " l’acte de foi (ainsi que les dispositions suivantes) procède de la grâce divine qui excite et aide à le faire. » Jbid., et n. 813. Il ajoute que cette définition conciliaire ôte toute valeur à l’opinion de quelques scolasliques, disant que nos forces naturelles suffisent à l’acte de foi. » Véga, Trideniini decrcli de jusfificatione cxpositio et defensio, édition in-4°, Venise, 1548, t. VI, c. XII, fol. 60 ; édit. de Cologne, p. 89. 2’point : « la foi est conçue (se reçoit) par l’audition. » Ibid. Le concile a en vue les mots fides ex auditii, Rom., x, 17, où saint Paul affirme la nécessité de la prédication pour transmettre la parole du Christ. Ce texte et d’autres seront plus loin commentés par Véga, et il en conclura que la grâce intérieure, comme « la vertu infuse de foi, reçue par l’enfant au baptême, » demande à se compléter par la prédication extérieure et sensible, l’instruction donnée par l’iiomme, » le catéchisme. De même pour l’adulte infidèle, à la grâce actuelle doit s’ajouter l’instruction qu’il entend. C’est là « le cas normal considéré par le concile, » bien qu’extraordinairement Dieu remplace l’homme par l’ange ou par la révélation directe. « Ainsi la proposition des mystères à croire, faite par l’homme avec des motifs de crédibilité, … et la foi humaine » que l’on donne à cet homme, n précèdent d’ordinaire l’acte de foi divine, mais non pas rigoureusement dans tous les cas. » Édit. de Venise, c. xiii, fol. 61. 3^ point : « nous avons un libre mouvement vers Dieu par la foi », libère moventur in Deum, crcdenles, etc. Denzinger-Bannwart, n. 798. Deux choses dans ce membre de phrase : le mouvement vers Dieu, et la liberté. Véga explique aussitôt la première : « le concile veut dire que la foi s’attache au témoignage de Dieu, à l’autorité de Dieu, comme à son motif propre et essentiel. : C’est à l’autorité divine que nous croj^ons, dit saint Léon… Et c’est principalement par là, que la foi théologale se distingue de la foi humaine : celle-ci croit sur l’autorité des hommes, celle-là en Dieu seul, parce que Dieu a induliitablement révélé tout ce qu’elle croit. Aussi notre foi divine est-elle infaillible comme Dieu lui-même. » C. xii. Il expliquera la liberté de la foi au c. xiv :  ! < Bien que la foi soit un acte de l’intelligence, faculté qui n’est pas libre, cependant cet acte présuppose une pieuse (et libre) affection de la volonté, affection qui le rend libre par une certaine participation. » Contre Luther, qui niait cette liberté, Véga’cite les textes sacrés d’où on doit la conclure, ainsi que de la tradition. A l’objection protestante, que les juifs endurcis « ne pouvaient pas croire, » Joa., XII, 39, il répond avec saint Augustin, autorité admise de Luther : « Ils ne pouvaient pas, parce qu’ils ne voulaient pas, » In Joa., P. L., t. xxxv, col. 1776 ; réponse donnée aussi par les autres commentateurs de cet Évangile, Chrysostome, Cyrille d’Alexandrie. 4’point : « Les Pères du concile, dit-il, font connaître ici l’acte de foi ( qui prépare à la justification) du côté de son objet, de sa matière, c’est-a-dire de ce que l’on croit par cet acte. On croit, disent-ils, comme vrai tout.e qui a été divinement révélé et promis, et en particulier ceci, que Dieu justifie l’impie par sa grâce, à cause de la rédemption accomplie par le Christ Jésus. » Jbid. Un double objet est indiqué dans cette phrase ; un objet général : « tout ce que Dieu a révélé et promis » ; un objet spécial : la promesse divine de justifier le pécheur par la grâce, à cause de la rédemption. Pourquoi cet objet spécial ? C’est que le concile ne parle pas ici d’un acte de foi quelconque, mais de celui qui doit disposer le pécheur ou l’infidèle

à la justification, et qui le disposera en montrant à sa lumière surnaturelle les motifs des autres vertus, et en excitant ainsi l’espérance et autres dispositions du cœur qui sont nécessaires ou utiles à la justification, comme le repentir, l’amour, le ferme propos pour l’avenir, etc., tout ce qui constitue une conversion sincère et peut obtenir le pardon divin. Or il n’est pas d’objet paiticulier de foi, pas d’article de la révélation, dont la pensée ait autant d’efficacité pour atteindre ce but, que l’article de la bonté de Dieu, et de sa promesse de pardon fondée sur l’œuvre rédemptrice du Christ.

Ce n’est ("onc pas sans raison, dit Véga en abordant une question difficile, que les Pères du concile ont fait ici mention de cet article. C’est celui qui, saisi, par la foi, est le plus capable d’exciter en nous l’espérance de notre justification, et de nous faire arriver à ce but. Et c’est à la foi en cet objet, que les livres sacrés et les saints docteurs attribuent notre justification, le plus souvent et principalement… Il nes’ensuit pas pourtant que la foi en cet article soit absolument nécessaire à tous pour arriver au pardon, et que la foi explicite en d’autres vérités, spéculatives ou morales, ne puisse la remplacer. Aussi saint Paul, Heb., XI, 6, cité aussitôt par le concile (Denzinger-Bannwart, n. 798), exige seulement, pour arriver à l’amitié divine, que l’on croie l’existence du vrai Dieu, ^et la récompense qu’il donnera un jour, » vérités de foi qui ne manquent pas d’aptitude à exciter l’espérance. « Et c’est une opinion commune parmi les théologiens qui ont commenté le 111’= livre des Sentences, dist. XXV, que pour être justifié il suffit d’avoir explicitement ou implicitement la foi au Christ, unique médiateur. Et tous ceux-là sont censés l’avoir eue implicitement, qui ont cru que Dieu est véridique dans toutes ses paroles et promesses, et qu’il offrira avec bonté tout ce qui est nécessaire au salut. Les Pères du concile n’ont pas exigé davantage dans le membre de phrase que nous expliquons. » S’ils y parlent explicitement de la rédemption par le Christ, ce n’est que « pour indiquer la voie commune (normale), par laquelle nous devons préparer les autres, ainsi que nous-mêmes, à la justification. » C. xv. « Ce que nous avons dit jusqu’à présent sur la foi, ajoutet-il, peut éclaircir et contirmer ce passage du concile. Mais il reste à approfondir un peu plus cette question, si la foi est une disposition nécessaire à la justification. Qu’elle le soit en un certain sens, c’est très clair, .-., par exemple, quand nous voyons saint Paul si souvent attribuer la justification à la foi… Mais, y a-t-il eu des hommes justifiés sans la foi, ou peut-il y en avoir ? Voilà la question délicate ; hic opus, hic labor est Sans donner à cette question une réponse aussi expresse que possible, les Pères du concile semblent bien se prononcer pour la négative, en leur chapitre suivant c. VII, et plus clairement encore au c. viii. » Véga, c. XVI.

Sur la question complexe et difficile qu’il vient de poser très nettement : Y a-t-il des exceptions possibles à la nécessité de l’acte de foi pour la justification et le salut, Véga déclare que malgré les études et les consultations faites par lui depuis de longues années, il n’est arrivé qu’à des probabilités assez grandes, qu’il soumet à un meilleur jugement. Il va les développer dans une série de chapitres, après un bref sommaire, c. xvii. Sa marche est à peu près celle-ci. Il prend d’abord la foi explicite au Christ : a-t-elle cette nécessité absolue, c’est-à-dire sans aucune exception ? Viendra ensuite la foi explicite en Dieu, telle qu’elle est présentée dans l’Épître aux Hébreux, xi, : a-t-elle cette nécessité absolue ?

Foi explicite au Christ. — Nous venons de voir par son c. XV, que pour de bonnes raisons il ne la croit