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INFAILLIBILITE DU PAPE


des moyens de perfection recommandés par ces règles.

V. RÉPONSE A QUELQUES OBJECTIONS. 1° objCC lion. — On ne peut admettre comme un dogme révélé une proposition dont le concept théologique explicite ne se rencontre pas avant le xv<e siècle, et qui, depuis cette époque, a été, même dans l’Église catholique, l’objet de nombreuses et persévérantes attaques. — Réponse. — 1° Pour qu’une vérité puisse être explicitement définie comme vérité de foi ou comme vérité révélée, à une époque quelconque de l’histoire de l’Église, il suffit qu’elle ait été implicitement révélée au sens précédemment expliqué, voir Dogme, t. iv, col. 1642, et que, dans la tradition catholique, elle ait toujours été crue comme implicitement révélée, soit que cette croj’ance doive être considérée comme contenue dans la croyance à une vérité connexe où elle était manifestement comprise, soit que cette croyance ait pu seule dicter une pratique constante et universelle dans l’Église.

Or, selon les explications données au cours de cet article, il est manifeste, au moins après le progrès dogmatique accompli, en cette matière, au cours des siècles chrétiens, que l’infaillibilité pontificale, n’étant autre que la plénitude de l’autorité doctrinale dans l’Église, est manifestement comprise dans la plénitude de toute autorité conférée à Pierre et à ses successeurs dans l’Église ; plénitude qui est certainement une vérité révélée d’après Matth., xvi, 18, et Joa., xxi, 16 sq., et d’après l’enseignement constant de la tradition catholique.

Il est également certain que, selon la démonstration faite au commencement de cet article, l’infaillibilité pontificale, même dans les quatre premiers siècles, était efïectivement contenue, d’une manière assez évidente, dans la croyance formelle à la souveraine autorité doctrinale du pape, et dans la constante et universelle pratique de recourir à l’Église ou au siège de Rome et de s’en tenir à son enseignement ou à sa décision quand la foi était en danger. Cette croyance a d’aifieurs reçu, dans les siècles suivants, un développement considérable, que nous avons analysé en détail, jusqu’au moment où s’est manifesté, au xv siècle, le concept explicite du dogme de l’infaillibilité pontificale, à l’occasion des négations ouvertement formulées pour la première fois à cette époque par les partisans de la supériorité du concile sur le pape.

2° Les négations anti-infaifiibilistes, telles qu’elles se sont manifestées depuis le xve siècle jusqu’au concile du Vatican, n’ont pas, très particulièrement pour la France, l’importance efïective qu’on leur attribue.

Elles portaient principalement, non sur l’existence, mais plutôt sur la nature de l’infaillibilité pontificale et sur son mode d’exercice, comme le montre l’article 4 « de la Déclaration du clergé de France de 1682, voir t. IV, col. 197 sq., exigeant l’approbation ou la ratification subséquente, au moins tacite, de l’Église, pour que les définitions pontificales dussent être considérées comme vraiment infaillibles. Ainsi la controverse portait principalement sur ce point : la ratification ou approbation subséquente de l’Église est-elle nécessaire et dans quelle mesure l’est-elle ? Voir Gallicanisme, t. VI, col. 1103 sq.

C’est d’ailleurs un fait bien constaté que, ces doctrines gafiicanes étaient souvent assez mitigées chez beaucoup d’individus ; on était habituellement assez soumis de fait aux enseignements du souverain pontife, dans les milieux simplement gallicans, en dehors du parti janséniste ou de ceux qui se laissaient guider par lui. Le plus souvent on se soumettait pratiquement, même avant que la ratification ou approbation de l’Église universelle eût pu devenir manifeste. Nous en avons vu plusieurs preuves assez évidentes.

On peut donc conclure qu’en face d’une erreur ainsi restreinte dans sa durée, dans son objet et dans ses applications pratiques, le témoignage de la tradition’catholique constante, tel qu’il a été exposé, garde toute sa force.

2’^ objection. — On ne peut admettre qu’à une époque tardive de l’histoire de l’Église, une définition de foi soit portée en faveur d’une nouvelle prérogative pontificale, produisant à l’intérieur de l’Église de profonds changements organiques, et rendant, à l’extérieur, , toute entente efïective avec les pouvoirs civils, sinon impossible, du moins très difficile. — Réponse. —

1° D’après toute notre démonstration, il n’est point vrai que l’on ait défini une nouvelle prérogative pontificale produisant à l’intérieur de l’Église, des changements profonds. Il y eut simplement manifestation plus explicite d’une croyance constamment admise antérieurement, sous les formes multiples indiquées dans l’étude des preuves traditionnelles.

2° Toutefois on doit reconnaître que, surtout dans certains milieux où régnait auparavant un gallicanisme plus ou moins nuancé, il se produisit, par suite de l’abandon des vieilles opinions et du rayonnement nouveau de l’autorité pontificale, un changement qui, sans être pratiquement très profond, put donner, à certains esprits peu réfléchis ou mal informés, l’illusion, plus ou moins volontaire d’un profond changement dans la doctrine et dans la constitution de l’ÉgUse. C’est ce que faisait observer Newman, en 1874, relativement s la fausse attitude prise par les cvêques anglais et irlandais sur la question de l’infaillibilité et de l’autorité du pape, en 1826, au moment du projet de loi sur l’émancipation des catholiques. Ce fait put donner quelque occasion, après 1870, à la méprise et aux attaques passionnées d’hommes politiques comme Gladstone, ainsi que le faisait remarquer Newman dans dans sa réponse à Pusey, A leller to the diike o/ Norfolk, 1874, dans Certain ditjîcultics fcll bij anglicans in catholic teaching considered, Londres, réimpression, 1910, p. 187, sq.

Cette remarque peut également s’appliquer à la lettre du 30 juillet 1870, dans laquelle le chancelier autrichien Beust affirmait que les doctrines promulguées par le concile plaçaient les relations de l’État avec l’Église sur une base toute nouvelle, puisque celleci étendait le cercle de sa compétence, et concentrait en même temps dans la personne du pape tous les pouvoirs qu’elle prétend exercer. Collectio Lacensis, t. vii, col. 1722 ; Granderath, Histoire du concile du Vatican, trad. Conrad Kirch, Bruxelles, 1913, t. iii, pars ii, p. 341 sq.

3° Il n’est point vrai que la définition de l’infaillibifité pontificale, en augmentant considérablement les droits de l’Église, ait rendu désormais toute entente efïective avec les pouvoirs civils, sinon impossible, du moins très difficile. — 1. A ceux qui voudraient raisonner au point de vue catholique, nous avons le droit de répondre, d’après tout ce qui précède, que la définition vaticane n’a fait que donner une forme plus complète à ce qui avait toujours été cru jusque-là au moins pratiquement, soit relativement à l’infaillibilité pontificale, soit relativement à la nature de la primauté pontificale. Les relations de l’Église avec les pouvoirs civils, surtout quand ceux-ci reconnaissent et observent leurs devoirs envers l’Église, ne peuvent donc être aucunement modifiées. Elles restent telles que Léon XIII les a déclarées dans son encyclique Immortale Dei, telles que la tradition catholique les avait affirmées dans les siècles précédents.

2. Quant aux hommes politiques qui ne se soumettent point à l’enseignement catholique et qui professent vouloir laisser à l’Église la liberté en ce qui concerne son organisation purement interne, on a le droit