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INFAILLIBILITE DU PAPE


magistère de l'Église considéré d’une manière générale. Il suffit que le pape manifeste formellement sa volonté de réprouver ou de condamner une erreur comme directement ou indirectement opposée à la foi, ou de déclarer une doctrine comme strictement obligatoire pour tous les fidèles, soit en l’imposant sous peine d’anatheme, soit en la proposant comme vérité de foi, ou comme ne pouvant être rejetée sans porter atteinte à la foi. Bien que, pour signifier cette volonté, aucune expression ne soit, en principe rigoureusement requise, il y a des expressions qui sont, d’après l’appréciation universelle, des signes certains d’une définition proprement dite. Nous citerons comme exemples les cas où une vérité est déclarée vérité de foi ou vérité révélée, surtout avec les expressions defmimus, auctoritate apostolica definimus, ou les cas dans lesquels une proposition est condamnée comme hérétique ou comme contraire à la foi, surtout avec les expressions définitive damnamus et rcprobamus, auctoritate Dei et beatnrum apostolorum Pétri et Pauli damnamus et reprobamus. Voir Collectio Laccnsis, t. vii, col. 285 ; cardinal Billot, op. cit., p. 657 sq.

Nous citerons, à titre d’exemples, quelques documents pontificaux qui, d’après les principes que nous venons de rappeler, sont habituellement, ou assez habituellement, considérés comme contenant une définition infaillible :

a) La lettre déjà mentionnée du pape saint Léon 1°=' à l'évêque Flavien de Constantinople, où est exposée, avec une souveraine autorité, la foi que tous doivent suivre relativement à l’incarnation, Epist., xxviii, P. L., t. Liv, col. 755 sq., et qui fut, comme nous l’avons précédemment montré, considérée par le concile de Chalcédoine comme un jugement doctrinal définitif et obligatoire pour tous, et mentionnée comme telle dans toute la tradition catholique, particulièrement dans le formulaire de foi du pape saint Hormisdas. Denzinger-Bannwart, n. 171.

b) La lettre dogmatique du pape saint Agathon relative à la question de deux volontés en Jésus-Christ, indiquant avec une pleine autorité, avant la célébration du concile, la doctrine que tous doivent suivre, sous peine d'être en dehors de la foi orthodoxe. EpisL, I, P. L., t. Lxxxvii, col. 1168 sq., 1205, 1208, 1212. Voir Agathon, t. i, col. 559 sq. Nous avons montré que la souveraine autorité doctrinale de ce document fut pleinement reconnue par les Pères du VI « concile dans leur lettre au pape Agathon. Epist., IV, parmi les lettres de saint Agathon, P. L., t. Lxxxvii, col. 1247 sq. Cf. col. 1608.

c) La bulle Unam sanctam de Boniface "VIII, du 18 novembre 1302, du moins pour sa déclaration finale, concernant la soumission nécessaire de toute créature humaine au pontife romain. Denzinger-Bannwart, n. 469. Voir Boniface VIII, t.ii, col. 1001.

dj La constitution Benedictus Deus de Benoît XII, du 29 janvier 1336, concernant la vision béatifique accordée, immédiatement après la mort corporelle, aux âmes complètement purifiées. Voir Benoit XII, t. ii, col. 657 sq. ; Denzinger-Bannwart, n. 530 sq.

e) La bulle Exsurge Domine de Léon X, du 15 juin 1520, condamnant 41 propositions de Luther comme hérétiques et erronées et exigeant de tous les fidèles une absolue réprobation. Denzinger-Bannwart, n. 741 s.

/^ La constitution apostolique C « m occasione d’Innocent X, du 31 mai 1053, condamnant cinq propositions extraites de VAui/uslinus de Jansénius et interdisant à tous les fidèles de les admettre, sous peine des censures portées contre les hérétiques et contre leurs fauteurs. Denzinger-Bannwart, n. 1092 sq.

g) La constitution apostolique Cwlestis pastor

d’Innocent XI, du 19 novembre 1687, réprouvant d’une manière définitive 68 propositions de Michel de Molinos en faveur du quiétisme. Denzinger-Bannwart, n. 1221 sq.

h) La constitution d’Innocent XI Cum alias, du 12 mars 1699, condamnant avec la plénitude du pouvoir apostolique 23 propositions du livre de Fénelon. Denzinger-Bannwart, n. 1237 sq. Voir t. v, col. 21552156.

i) La constitution Unigenitus de Clément XI, du 8 septembre 1713, condamnant 101 propositions de Quesnel comme hérétiques ou erronées et commandant à tous les fidèles de ne pas avoir en cette matière d’autre sentiment que celui qui est exprimé dans cette constitution, Denzinger-Bannwart, n. 793 sq.

/ ; La constitution Auctorem fidei de Pie VI, du 28 août 1794, condamnant les propositions hérétiques ou erronées du conciliabule de Pistoie et enjoignant expressément à tous les fidèles de conformer leur sentiment à la doctrine enseignée dans cette constitution. Denzinger-Bannwart, n. 1501 sq.

k) La bulle Inefjabilis Deus de Pie IX, du 8 décembre 1854, pour la partie qui contient la définition du dogme de l’immaculée conception. Voir plus haut, col. 845 sq.

l) « Beaucoup de théologiens et de cahonistes y ajouteraient volontiers la célèbre encyclique Quanta cura de Pie IX. » Choupin, Valeur des décisions doctrinales et disciplinaires du saint-siège, p. 23. L’infaillibilité du Syllabus qui eut ses partisans est aujourd’hui à peu près abandonnée. Ibid., p. 105-124.

m) L’encyclique Pascendi du 7 septembre 1907 et le décret Lamentabili du 3 juillet 1907 furent dès le temps de leur apparition l’objet de jugements contradictoires. Plusieurs théologiens y virent des actes du magistère infaillible, dans celle-là à cause de son importance doctrinale, dans celui-ci à raison du Motu proprio Priestaniia du 18 novembre 1907, où Pie X fait sien )e décret et l’accompagne de censures. D’autres furent d’un avis différent. Pour le P. Choupin, l’encyclique est seulement « le plus haut acte du magistère pontifical après la définition ex cathedra. » Quant au décret qui n'était primitivement qu’un acte du Saint-Office, le même auteur estime que le Motu proprio ne lui ajoute pas « ce qui lui manquait pour être une décision strictement et formellement papale. » Voir Choupin. dans Éludes du 5 janvier 1908, t. cxiv, p. 119-123 ; Revue du clergé français, 15 janvier 1908, t. lui, p. 247248 ; Vermeersch, S. J., dans Revue pratique d’apologétique, 15 juillet 1908, p. 622-623. Ces scrupules des spécialistes, en présence des actes pontificaux les plus graves, montrent quel souci de précision et de rigueur il faut apporter dans l’application des principes posés par le texte du concile du Vatican.

n) Aucune encyclique de Léon XIII n’est mentionnée comme contenant une définition ex cathedra au sens précédemment indiqué, bien qu’il puisse y avoir, comme nous le montrerons bientôt, plusieurs enseignements infaillibles concernant des vérités précédemment définies, ou toujours enseignées par le magîstère ordinaire, et qui sont rappelées par le pape et proposées comme vérités certaines.

4. De tout ce qui précède il résulte qu’il peut y avoir parfois quelque incertitude pratique relativement au jugement particulier à porter sur un document pontifical. Dans ces cas on devra tenir compte des observations suivantes :

a) La difficulté n’est pas plus grande que dans le cas d’incertitude du même genre relativement aux définitions portées par les conciles généraux. Les observations habituellement faites par les théologiens relativement à ce cas doivent trouver encore ici leur application. Collectio Laccnsis, t. vii, col. 285. — b) En