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INFAILLIBILITÉ DU PAPE


de la foi. Le mot définit ne doit pas être pris dans son sens juridique, de mettre fin à une controverse portant sur une hérésie ou sur une doctrine de foi. Ce mot signifie un jugement direct et final porté par le pape relativement à la toi et aux mœurs, de telle manière que tous les fidèles puissent être certains de l’intention du souverain pontife, et qu’ils sachent que telle doctrine est jugée par lui hérétique, proche de l’hérésie, certaine ou erronée. Collectio Lacensis, t. vii, col. 474 sq.

c) On doit conclure avec le cardinal Billot, op. cit., p. 655, que la condition exigée par les mots définit lenendam peut faire défaut de deux manières : ou parce que les expressions dont le pape se sert ne contiennent point de jugement doctrinal, ou parce que ce jugement n’est point un jugement final, certainement manifesté comme exigeant l’assentiment de la foi ou une ferme adhésion, n. Il y a manifestement absence de jugement doctrinal, quand le pape se contente d’interdire de rien innover, comme le fit le pape saint Etienne I’"' dans la question des rebaptisants, Denzinger-Bannwart, Enchiridion, n.46, ou à plus forte raison quand le pape demande simplement que l’on s’abstienne de toute controverse sur une matière déterminée, jusqu’à ce que le saint-siège définisse ce que l’on doit croire ou admettre, comme le fit Pie II relativement à la discussion sur l’union de la personne du Verbe aux gouttes de sang répandues par Notre-Seigneur pendant la passion, Denzinger-Bannwart, n. 251. Il y a également absence de jugement doctrinal quand, toute question de doctrine étant d’ailleurs pleinement sauvegardée, il s’agit uniquement de l’opportunité ou de l’inopportunité d’un jugement à porter sur une simple question de fait, par exemple si telle personne ou tel ouvrage mérite condamnation à cause d’erreurs réelles, ou s’il est préférable de s’abstenir d’une condamnation formelle, à cause d’inconvénients graves pouvant résulter de cette condamnation et parce que le danger immédiat n’existe plus. On peut, comme exemple, citer le cas du pape Vigile dans l’affaire des Trois Chapitres. Voir CoNSTANTiNOPLE f/PconcHc de), t. III, col. 1231 sq. et ViGii/E.

Il y a aussi absence de jugement doctrinal quand il s’agit uniquement de l’inopportunité d’une expression considérée, à tort et d’après des récits faux et insuffisamment contrôlés, comme doimant lieu à des conséquences fâcheuses. Plusieurs auteurs appliquent ceci au cas du pape Honorius I’""’. Voir en sens contraire HoNonius l", col. 110-111.

Enfin il y a absence de jugement doctrinal explicite dans tous les cas où il s’agit d’un enseignement pontifical effectivement contenu dans les lois portées par le pape pour l’Église universelle, ou dans les décrets pontificaux concernant l’approbation du culte des saints ou l’approbation des ordres religieux. Cet enseignement pontifical est infaillible dans le sens et aux conditions précédemment expliqués pour le magistère de l’Église, t. iv, col. 2197 sq. Mais il n’y a point l’acte requis pour une définition au sens du décret conciliaire.

6. Il y a certainement absence de jugement final au sens indiqué, toutes les fois qu’il y a simple affirmation d’une doctrine proposée ou recommandée comme meilleure pour la défense de la vérité révélée, comme cela arrive fréquemment dans les actes du magistère ordinaire des souverains pontifes. Nous parlerons bientôt de cet enseignement pontifical non infaillible qui se rencontre souvent dans les encycliques de Léon XIII et de Pie X.

2. Puisque seul le jugement direct et final porté par le pape relativement à la foi et aux mœurs constitue la délniition infaillible au sens du décret conciliaire.

il est donc certain que l’autorité infaillible doit être strictement limitée à ce que le pape veut y définir, d’après le but qu’il se propose, d’après les expressions qu’il emploie ou les erreurs qu’il veut formellement condamner, a) On ne doit donc point comprendre dans une telle définition les raisons ou les arguments sur lesquels elle est appuyée, à moins que ces arguments ne soient en eux-mêmes expressément définis, comme les textes de Matth., xvi, 18 ; et de Luc, xx, 32, dont le sens a été défini par le concile du Vatican. Sess. IV,

c. I, IV.

Ainsi, dans la bulle Ineffabilis Deus de Pie IX du 8 décembre 1854 définissant le dogme de l’immaculée conception de Marie et unanimement acceptée comme acte ex cathedra, les preuves ou indications bibliques déduites par le document pontifical de Gen., iii, 15, ou des figures de la pureté parfaite de Marie dans l’Ancien Testament, selon l’interprétation des Pères, ne sont ni d’après la déclaration du pape, ni d’après le but qu’il se propose, l’objet d’un jugement doctrinal voulu comme positivement obligatoire pour tous les fidèles. Voir col. 1207.

La même affirmation doit, à plus forte raison, s’appliquer à des textes cités, dans les documents pontificaux, d’une manière simplement accommodatice, comme les deux textes. Eccc duo cjladii hic, Luc, xxii, 38 ; Converte gladium iuum in vaç/inant, Matth., xxvi, 52 ; Joa., xviii, 11, dans la bulle Unam sanctam de Boniface VIII.

b) On ne doit pas non plus comprendre dans la définition pontificale ce qui est affirmé incidemment, à l’occasion de la définition, sans que le pape veuille aucunement le définir ou l’imposer à la croj’ance ou à l’assentiment des fidèles. Ainsi, dans la bulle précitée Ineffabilis Deus, on ne considérera point comme comprises dans la définition, plusieurs assertions concernant la médiation universelle de la très sainte vierge Marie et la toute-puissance effective de son intercession ; assertions faites incidemment et sans qu’il y ait aucun indice que le pape les impose obligatoirement à l’adhésion des catholiques.

C’est encore ce que l’on doit penser de cette affirmation incidente, à la fin de la même bulle, que quiconque aura la présomption de penser, dans son cœur, secus ac a nobis definilum est, sache qu’il est condamné par son propre jugement, qu’il a fait naufrage en ce qui concerne la foi et qu’il s’est séparé de l’unité de l’Église. Il est manifeste que, par cette affirmation incidente, le pape n’a pas voulu dirimer la controverse théologique concernant les hérétiques occultes, rangés par plusieurs théologiens parmi les membres de l’Église visible, tant que leur hérésie n’est pas exprimée extérieurement, ou, selon d’autres théologiens, entièrement séparés de l’Église visible parce que leur foi purement extérieure ne peut constituer un lien réellement suffisant.

c) Pour la même raison, on ne doit pas non plus comprendre, dans la définition pontificale, les conclusions qui en sont légitimement déduites à l’aide du contexte. Car ces conclusions, bien qu’elles puissent être certaines et bien qu’elles ne puissent le plus souvent être niées sans mettre en péril la vérité révélée ou l’infaillibilité même du pape, ne sont cependant point directement proposées à la foi ou à l’acceptation des fidèles comme il est requis pour une définition proprement dite. C’est d’ailleurs ce qu’admettent tous les théologiens catholiques pour ce qui concerne les définitions portées par les conciles.

3. Quant aux signes auxquels on peut reconnaître les définitions pontificales infaillibles, on doit, d’après la remarque précédemment faite, appliquer les signes qui étaient communément donnes par les anciens théologiens pour reconnaître les définitions infaillibles du