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INFAILLIBILITE DU PAPE


3 « conclusion. — L’infaillibilité pontificale appartenant aux seuls actes dans lesquels le pape agit avec la plénitude de son pouvoir apostolique, se rencontre seulement dans les actes émanant efïectivement du pape et manifestés comme tels, et possédant d’ailleurs les conditions requises pour un enseignement infaillible.

1. C’est ce que montre l’enseignement traditionnel tel que nous l’avons exposé. Selon cet enseignement, l’infaillibilité doctrinale appartient au pape définissant, en vertu de sa suprême autorité apostolique et en tant que docteur et pasteur de l’Église universelle, la doctrine qui doit être tenue par tous les fidèles. C’est aussi l’enseignement formel du concile du Vatican dans la définition de foi. Sess. IV, c. iv.

2. D’où il suit, comme on l’a montré précédemment, que les décrets doctrinaux des Congrégations romaines, même munis de l’approbation commune du pape, tant qu’ils restent tels et sont publiés comme tels, ne jouissent point du privilège de l’infaillibilité. Voir Congrégations, t. III, col. 1108 sq. Il arrive parfois que le pape les fasse siens et les publie en son nom. C’est par exemple le cas du décret Lamenlabili, du Saint-Office, du 3 juillet 1907. Car Pie X l’a véritablement fait sien par le Molli proprio Præslanlia du 18 novembre 1907. Voir d’autres exemples plus anciens dans L. Choupin, S. J., Valeur des décisions dvclrinales et disciplinaires du saint-siè(/e, Paris, 1907, p. 52-56. Contre Bouix, l’auteur établit d’ailleurs que cette approbation in forma specifica ne transforme pas toujours et nécessairement la décision antérieure en une définition ex cathedra. Elle le ferait seulement « si le pape manifestait suffisamment son intention, sa volonté de porter une sentence définitive, absolue sur la question. » P. 55.

4<= conclusion. — Quand le magistère infaillible est exercé conjointement par le pape et les évêques, dispersés ou réunis en concile, on doit affirmer au moins comme une conclusion bien probable de l’enseignement scripturaire, de l’enseignement traditionnel, et de l’enseignement du concile du Vatican, que l’infaillibilité pontificale réside premièrement et principalement dans le pape, de telle sorte qu’elle est dans les évêques seulement par participation et d’une manière dépendante.

1. C’est ce que montre l’enseignement scripturaire de Mattb., xvi, 18, et de Luc, xxii, 32, affirmant que Pierre et ses successeurs possèdent seuls l’infaillibilité d’une manière immédiate et principale, tandis que les apôtres et leurs successeurs jusqu’à la consommation des siècles, confirmés eux-mêmes dans la foi par Pierre, ont l’indéfectibilité dans la foi ou rinfaillibilité seulement par l’intermédiaire de Pierre et sous sa dépendance.

Les paroles subséquentes adressées conjointement à Pierre et à ses collègues, Matth., xxviii, 20, ne pouvant modifier la promesse absolue précédemment faite à Pierre, Matth., xvi, 18 ; Luc, xxii, 32, doivent s’entendre de telle sorte que Pierre est toujours le fondement de l’Église et que, par lui, la foi des autres apôtres est affermie et rendue indéfectible.

2. C’est aussi le témoignage formel de la tradition catholique, du moins depuis le ve siècle. Cet enseignement se rencontre explicitement dans les paroles précédemment citées de saint Léon le Cirand, déclarant expressément que, selon la prière infaillible de Jésus, la fermeté dans la foi est accordée à Pierre par Jésus, pour que Pierre lui-même la confère aux apôtres, Serm., lxxxiii, c. iii, P. L., t. liv, col. 431 ; que tout dans l’Église repose sur la foi de Pierre et que cette foi a été munie, par Jésus-Christ, d’une telle solidité que la perversion hérétique et l’infidélité n’ont jamais pu la corrompre. Serm., iii, c. iii, col. 140 sq. Nous

DICT. DE THÉOL, CATHOL.

avons constaté, en étudiant les témoignages de la tradition, que cet enseignement de saint Léon, depuis le v » siècle jusqu’à notre époque, est très souvent reproduit, soit comme interprétation des textes scripturaires, soit en dehors de toute citation scripturaire, et que, surtout depuis le xvie siècle, cette doctrine s’est particulièrement affirmée à rencontre de l’erreur théologique subordonnant les décisions doctrinales du pape à la prétendue autorité supérieure d’un concile ou à l’approbation ou ratification finale de l’Église universelle.

3. Cet enseignement a d’ailleurs un fondement solide dans le dogme de la primauté pontificale, tel qu’il est enseigné par le concile du Vatican. Sess. IV, c. m. Puisque, la plénitude de toute autorité réside premièrement et principalement dans le pape, comme on est autorisé à le conclure de l’enseignement du concile, il est permis d’affirmer aussi que la plénitude de l’autorité doctrinale, c’est-à-dire l’infaillibilité doctrinale, réside dans le pape premièrement, principalement et immédiatement, voir CoUectio Lacensis, t. VII, col. 357 sq., de telle sorte que les évêques enseignant avec le pape possèdent cette infaillibilité seulement par participation et avec dépendance dans la mesure où leur enseignement est uni à celui du pape.

4. Quant à la fonction de juges de la foi qui, selon la tradition catholique, appartient certainement aux évêques enseignant conjointement avec le pape, elle peut s’exercer en toute vérité, soit avant soit après une définition pontificale, a) Ayan/ la définition pontificale, les évêques réunis en concile ou dispersés, peuvent, en s’appuyant sur les enseignements ou les documents connus jusque-là, porter un jugement doctrinal sur la matière qui leur est soumise. Dans la suite, ce jugement est connu comme participant à l’infaillibilité doctrinale par le fait qu’il est ratifié ou confirmé par le pape, avec l’autorité qu’il tient de Jésus-Christ, b) Apres la définition pontificale, les évêques dispersés ou réunis en concile peuvent, avant de s’unir à la décision du pape, examiner la question, en vertu de l’autorité qui leur appartient, pour porter, à la lumière des arguments scripturaires ou traditionnels qu’ils ont examinés, un jugement doctrinal conforme à celui du pape et participant conséquemment à son infaillibilité. Ce jugement doctrinal des évêques ne peut avoir pour but de consolider l’autorité doctrinale du pape, puisqu’elle est consolidée par Jésus-Christ lui-même, mais seulement de donner, à la décision doctrinale du pape, plus d’éclat extérieur par la cohésion très manifeste de tout l’épiscopat uni à l’enseignement du pape. Nous avons précédemment montré, dans l’étude de la tradition catholique, que, de fait, ce fut la pratique suivie aux conciles d’Éphèse et de Chalcédoine et au VP concile général (IIP de Constantinople), où les évêques, après avoir déclaré leur devoir et leur volonté formelle de se soumettre aux décisions doctrinales déjà portées par le pape, examinèrent cependant, en vertu de leur autorité épiscopale, à la lumière des enseignements de l’Écriture et de la tradition, la matière déjà définie et donnèrent leur pleine adhésion à la décision pontificale par un jugement doctrinal motivé. C’est en ce sens qu’ils apposèrent leurs signatures aux actes du concile avec cette formule, ego definiens subscripsi. C’est ce que les conciles eux-mêmes ont souvent fait relativement aux décisions infaillibles déjà portées par des conciles précédents. Voir CoUectio Lacensis, t. VII, col. 397 sq. ; Conciles, t. iii, col. 665. Il est d’ailleurs manifeste que la qualité de juges de la foi est attribuée aux évêques par le concile du Vatican : sedenlihus Nobiscum et judicaniibus universi orbis episcopis. Dcnzinger-Bannwart, n. 1781.

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