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INFAILLIBILITE DU PAPE

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inexactes données à certaines difficultés liistoriqucs dont il sera question dans d’autres articles du Dictionnaire. Malgré ces quelques défauts, d’ordre plutôt secondaire, cette démonstration garde sa valeur substantielle et méritait d'être traitée plus équitablement par J. Turmel, qui, après avoir cité les critiques peu fondées dirigées par Launoi contre la démonstration patristique de Bellarmin, n’y oppose qu’une bien faible résistance. Histoire de la théologie positive du concile de Trente au concile du Vatican, Paris, 1906, p. 293 sq.

3. Certitude dogmatique de V injaillibilité pontificale. -- Cette question se pose comme conséquence de la démonstration scripturaire et patristique. Au xvi" et au xviie siècle, on affirme encore assez fréquemment que l’infaillibilité pontificale, bien qu’elle soit une vérité certaine, n’est cependant pas expressément de foi, soit parce que l'Église n’avait point encore porté de définition expresse sur ce point, soit à cause des assertions opposées de plusieurs théologiens ou canonistes jouissant de quelque considération. Stapleton (j- 1598), Controversia III cupitalis, De primario subjecto potestatis ecclesiasticæ, q. iv, dans Rocaberti, t. xx, p. 84 sq. ; Bannez, Commentaria in II^'-^ 11^, q. i, a. 10, dub. II, Venise, 1602, p. 113, 119 ; Bellarmin, De romano pontifice, t. IV, c. ii ; Tanner († 1632), In Summam S. Thomse, t. iii, disp. I, q. iv, dub. vi, dans Rocaberti, op. cit., t. i, p. 39 ; Duval, op. cit., p. 105 ; Platel, op. cit., t. iii, p. 80.

Cependant dès le xv ! » siècle, Pighi, op. cit., fol. 129 ; Cano, De locis theologicis, t. VI, c. vii, Opéra, Venise, 1759, p. 161, et Grégoire de Valence, op. cit., p. 309, 311, affirment explicitement que l’infaillibilité pontificale est une vérité de foi catholique. Au xvii<e siècle, cette même affirmation se rencontre plus fréquemment, notamment chez Suarez, De fide, tr. I, disp. V, sect. viii, n. 4 ; Nugno († 1614), Commentarii ac dispulationes in IIl^'" S. Thonia', q. xx, a. 3, dans Rocaberti, op. cit., t. viii, p. 257 ; Oregi († 1635), Summa theologica, tr. II, c. v, dans Rocaberti, t. iv, p. 633 ; Perez († 1637), Pentateuchum ftdei, t. V, dub. vi, c. i, dans Rocaberti, t.iv, p. 806 ; Gravina († 1643), Catholicæ præscriptiones adversus Iiœreticos, q. ii, a. 1, dans Rocaberti, t. viii, p. 425 ; Sylvius, Controversiæ, t. IV, q. II, a. 8, Opéra, Anvers, 1598, t. v, p. 313 ; Lao († 1663), Tractatus de summo pontifice, dub. iii, dans Rocaberti, t. iii, p. 604 sq. ; Chiroli, Lumina fidei divinæ, disp. III, diff. vi, dans Rocaberti, t. iii, p. 340 ; Macédo († 1681), De auctoritate papæ, q. v, a. 1, dans Rocaberti, t. xii, p. 213 ; Brancati de Lauria († 1693), In III Sent., De virtutibus theologicis, disp. V, a. 1, dans Rocaberti, t. xv, p. 25.

Au xviiie siècle, beaucoup de théologiens reproduisent encore la formule de Bannez et de Bellarmin. Nous citerons particulièrement : Viva († 1710), Damnaleet heses, quae>t. prodr., n. 7, Pavie, 1715, t. i, p. 3 ; Gotti († 1742), Theologia scholastico-dogmatica, tr. I, q. i, dub. VI, Venise, 1750, 1. 1, p. 60 ; Billuart († 1757), De fide, diss. IV, a. 5, p. i ; Pierre Ballerini (j 1769), De vi ac ratione primatus romanorum pontificum, c. XV, p. XI, Munster, 1845, p. 326 ; Kilbcr († 1783), De principiis theologicis, disp. I, c. ni, a. 4, dans la Theologia Wirceburgensis, Paris, 1852, 1. 1, p. 349, 380 ; S. Alphonse de Liguori, Theologia moralis, 1. 1, n. 110. Au xixe siècle, les positions théologiques restent à peu près les mêmes jusqu'à la définition portée par le concile du Vatican.

2° Négation pour le magistère pontifical de toute dépendance nécessaire soit d’un concile soit d’une approbation ultérieure donnée par l'Église universelle. —

1. Au xve siècle, quelques auteurs comme Tudeschi et Angelo de Clavasio sont encore dominés par les idées de Pierre d’Ailly et de Gerson, et soutiennent

en quelque manière la supcriorite du concile sur le pape en matière de foi.

Au commencement du xvii ? siècle, ces théories sont combattues par Cajétan dans deux opuscules publiés en 15Il et 1512. Cajétan montre, d’une manière générale, que le pape est super potestatem Ecclesiæ universalis et concilii generalis, ut disiinguitur contra papam, . d’après l’institution de Jésus-Christ. De comparatione auctoritalis papæ et concilii, c. vu. Opuscula omnia, Turin, 1582, p. 12 sq. Démonstration complétée dans le reste de cet opuscule, c. xi sq., p. 20 sq., et dans un deuxième opuscule publié en 1512, Apologia de compurala auctoritate papæ et concilii, p. 44-66. Le pouvoir de déterminer avec infaillibilité ce qui est de foi, , réside principalement dans le souverain pontife ; et même, selon saint Thomas, l’autorité de l'Église universelle, comme on l’appelle, n’est autre que celle du pape. De comparatione auctoritatis papæ et concilii, . c. IX, p. 17.

Quelques années plus tard, en 1510, Sylvestre de Priério († 1523) combat aussi les assertions de Tudeschi, mais sans se dégager entièrement de ce que celles-ci avaient de faux. Sylvestre admet, avec la tradition catholique, que le pape n’erre point tant qu’il parle comme chef de l'Église, c’est-à-dire quand il se sert du secours des membres de l'Église, per concilia et orationes et hujusmodi, ou quand il donne une décision comme chef de l'Église, au sujet de doutes pour lesquels il est consulté. Summa Sijlvestrina, art. Concilium, n. 3 ; art. Fides, n. 10 sq., Lyon, 1594, t. I, p. 151, 441. En même temps, la dépendance visà-vis du concile est admise, en ce que le pape est soumis au concile pour ce qui est manifestement defoi, et si le pape erre en cela avec obstination, il sedépose lui-même et n’est plus chef de l'Église, p. 151. Toutefois, en cas de dissentiment en matière de foi entre le pape et le concile, on est tenu de donner la préférence au pape, non point parce que ses raisons sont jugées meilleures, car un tel jugement ne peut être porté avec autorité, mais parce que le pape, comme chef de l'Église, a plein pouvoir pour résoudre les doutes en matière de foi, p. 151, 441.

Cette opinion attardée de Tudeschi est encore soutenue par Thomas Illyricus († 1528). Après avoir prouvé que toutes les causes majeures, dans l'Église, appartiennent au pape, Thomas excepte la cause de la foi, où le pape ne peut rien décider sans un concile : exception qu’il essaye d’appuyer sur le Décret de Gratien, Prima pars, dist. XIX, c. ix. Thomas ajoute que le pape peut errer dans la foi, mais non toute l'Église. Comme preuve de cette dernière assertion, l’auteur cite Gratien, Prima pars, dist. XL, c. vi, dont nous avons parlé précédemment. Une autre conclusion d' Illyricus est que les textes affirmant, comme la lettre de saint Jérôme au pape Damase, que l'Église romaine ne peut errer, doivent s’entendre de l'Église universelle, justement appelée l'Église romaine. Tractatus de summa potestate, Turin, 1523, sans pagination.

Une opinion assez semblable est défendue par Alphonse de Castro († 1558), dans un ouvrage pulslié en 1 534. Le jjape peut errer dans la foi, comme il advint, de fait, pour Libère et Anastase II. L'Église universelle est seule à l’abri de toute erreur, parce qu’elle est enseignée par le Saint-t-^sprit. Adversus hærcsesy t. I, c. IV, Cologne, 1543, fol. a. Le siège apostolique qui ne peut errer dans la foi n’est point le pape seul. Sed sedes apostolica quæ nunquam erravit, comprehendit iam collegium cujus concilio juvatur poniifex quam ipsum pontificcm, t. I, c. viii, fol. xv. Castra est cependant très exiilicite sur la primauté de Pierre et sur son privilège de confirmer ses frères, 1. XII> fol. CLXxiv sq.