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INFAILLIBILITÉ DU PAPE


la pierre je bâtirai mon Église et les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. On cite d’Eusèbe de Césarce, De laudibns Conslantini, xai, P. G., t. xx, col. 1433 ; Præpar. evangel., i, 3, P. G., i. xxi, col. 35 ; Comment, in ps. XVII, 15 sq. ; LIX, 11 ; LXVII, 34 sq., P. G., t. xxiii, col. 173, 572, 720 ; Comment, in Is., xxNin, 16 ; xxxiii, 20 ; xlix, 16, P. G., t. xxiv, col. 292, 329, 437. On cite également de saint Épipliane ces trois passages, Hær., y.KX, 24 ; lvi, 3 ; lxx, 11, P. G., t. xli, col. 445, 993 ; t. xlii, col. 773. — Réponse. — a. Il est certain que le texte, dans son intégrité, est cité par ces deux auteurs dans plusieurs passages où ils eurent à parler de saint Pierre lui-même, comme on peut le constater dans deux textes très explicites d’Eusèbe de Césarée, Deresvrrectione, ii, P. G., t. xxiv, col. 1111 ; Demonstr. evang., ni, 5, P. G., t. xxii, col. 216 sq. ; et dans deux passages non moins formels de saint Épiphane, J’/œr., Lix.7, P. G., t. xli, col. 1029 ; A/icorof/fs.ix, P. G., t. XLiii, col. 33. — b. Quant aux passages cités où une partie seulement du texte scripturaire est reproduite, on constatera facilement, en lisant le contexte, que la citation intégrale de la plirase scripturaire n’entrait point dans le plan de ces auteurs, qui oulaient parler seulement, d’une manière générale, de la perpétuité de l’Église, comme dans presque tous les textes cités d’Eusèbe et dans saint Épiphane, //a ?r., XXX, 24, P. G., t. xli, col. 445, ou delà perpétuité de la foi chrétienne ou de la doctrine prêchée par Jésus-Christ. Eusèbe de Césarée, Comment, in ps. LXVII, 34 sq., P. G., t. xxiii, col. 720 ; S. Épiphane, Har., Lvi, 3 ; lxx, 11, P. G., t. xli, col. 993 ; t. xlii, col. 773. On conçoit dès lors qu’avec ce but déterminé, et très manifeste d’après le contexte, ces auteurs aient reproduit, dans ces passages, seulement la partie du texte scripturaire concernant immédiatement la perpétuité de l’Église ou celle de la foi chrétienne, en omettant pour le moment ce qui concernait particu1 ièrement saint Pierre, dont ils ont parlé explicitement ailleurs, mais dont rien ne suggérait ici une mention directe.

f) On objecte enfin qu’une traduction arménienne qui nous reste du commentaire de saint Éphrem sur le Diatessaron de Tatien donne, comme réponse de Notre-Seigneur à saint Pierre, ces seules paroles : Beatus es Simon. El portée injeri te non Vincent. Evangelii coneordantis exposilio facla a S. Ephrem, Venise, 1876, p. 153. Ce texte reproduisant, il y a tout lieu de le croire, le texte même de Tatien, on est autorisé à conclure que l’ouvrage de Tatien contenait les mêmes omissions ; conséquemment que, vers 170, à l’époque où il fut composé, les paroles omises par saint Éplirem ne se lisaient pas encore dans le récit évangélique. — Réponse. — a. On doit tout d’abord noter que, dans d’autres ouvrages certainement authentiques où saint Éphrem a eu l’occasion de parler directement de saint Pierre, il y a des allusions très évidentes à Matth., xvi, 18, qui montrent qu’à cette époque l’auteur lisait le même texte scripturaire que nous lisons aujourd’hui. Nous citerons comme très explicites les quatre passages suivants : Serm., iv, in hebdomad. sanctam, 1, Hijmni et sermones, édit. Lamy, Malines, 1882-1902, t. i, col. 412 ; Comment, in Is., LXii, 2, t. ii, col. 186 ; Ilijmni dispcrsi, ii, 7, 12, t. iv, col. 686, 088. Or, il est certain que saint Éphrem n’a pas connu les Évangiles séparés et n’a jamais cité que le Diatessaron de Tatien. J. Schiifer, Evangeliencitalc in Ephnims des Syrers Kommentar zu den Paulinischen Scluiften, Fribourg-en-Brisgau, 1917. Si donc il a cité les parties du texte de saint Matthieu, xvi, 17-19, qui manquent dans son Exposilio, c’est qu’il les trouvait dans le Diatessaron de Tatien. Ainsi le texte complet de ce passage se lisait dans l’ouvrage de Tatien et par suite nous pouvons conclure à son existence au

ii<e siècle et à son authenticité. Cf. J. Sickenberger, Eine neueDeulungder Primatstelle ( M ait., x vi, 18), dans Theologisehe Revue, 1920, col. 2-4. — b. Quant au passage cité de’Exposilio, il contient, outre les phrases indiquées, deux allusions très manifestes aux paroles Tu es Pelrus et super liane petram ; vdifîcaho Ecclesiam meam. Dans la phrase qui suit presque immédiatement la citation Beatus es Simon. El porUv injeri te non vinrent, Éphrem parle de l’Église bâtie par Notre-Seigneur sur un fondement solide : Dominas cum Ecclesiam suam œdificaret, œdificavil turrim cujus fundamenla omnia qux erant supera^di ficanda portare posscnt. Et un peu plus loin il s’adresse à Pierre en ces termes : Tu es petra, illa petra quam erexit, ut Salanas in cam ofjendcret. Lac. cit. — c. On sait d’ailleurs que le but de saint Éphrem, dans cette Exposilio, n’est point de rapporter intégralement tous les textes scripluraircs, mais seulement de donner un bref commentaire de l’Évangile considéré dans son ensemble, en harmonisant les récits des quatre évangélistes selon l’ordre de Tatien. Op. cil., préface du traducteur, viii.

g) Conclusion. — Puisque les arguments critiques par lesquels on a voulu combattre l’authenticité de la promesse de Notre-Seigneur, Matth., xvi, 18, n’ont aucun fondement, et que d’ailleurs ce texte, ainsi que nous le montrerons bientôt, a toujours été reconnu par la tradition catholique comme contenant l’enseignement de Notre-Seigneur, on peut, en toute sécurité, conclure à sa parfaite authenticité.

2. Enseignement contenu dans ce texte relativement Cl la primauté perpétuelle de Pierre, considérée d’une memière générale. — Les critiques non catholiques qui admettent l’authenticité du Tu es Pelrus se sont toujours efforcés de combattre l’interprétation donnée par les théologiens catholiques. Au xvi » siècle, l’on soutenait habituellement que le super hanc petram devait s’entendre de Notre-Seigneur, fondement unique auquel il n’est point permis d’en substituer un autre ; ou de la foi chrétienne symbolisée par la confession de Pierre. Calvin, Inslilution de la religion chrétienne, t. IV, c. vi, 6, Genève, 1561, p. 373 ; voir aussi les citations de Luther et des centuriateurs de Magdebourg faites par Bellarmin, De romano pontifice, t. I, c. X.

Ces positions ayant été depuis lors à peu près universellement reconnues comme intenables, ceux qui veulent maintenir l’authenticité du texte, ont recours à une autre int< rprélation. C’est vraiment à Pierre que Notre-Seigneur a adressé ces paroles. Mais par là il a seulement voulu lui conférer un privilège personnel et temporaire, celui de symboliser en quelque sorte l’unité de l’Église, bien qu’en réalité il fût, en tout, égal aux autres apôtres. Pierre exerça notamment ce privilège en prêchant le premier la foi aux juifs et aux gentils et en admettant le premier les gentils dans l’Église. Voir particulièrement Gore, Roman catholic daims, Londres, 1909, p. 83 sq. ; Hall, Authorily ecclesiaslical and biblical, New York, 1908, p. 161 sq. ; Haslings Dictionarg o/ llie Bible, Edimbourg, 1900, t. iii, col. 759.

Contre ces interprétations si opposées au texte évangélique nous avons à montrer que renseignement contenu dans le texte comprend ces deux assertions : Pierre est le seul bénéficiaire immédiat de la promesse de Notre-Seigneur ; l^ierre en vertu de cette promesse doit avoir, sur toute l’Église, une véritable et perpétuelle primauté de juridiction comportant la plénitude du pauvoir.

a) Pierre est le seul bénéficiaire immédiat de la promesse de Notrr-Seigneur. — Car c’est lui qui est sl’uI désigné par toutes les expressions qui peuvent le mettre en évidence. Il est désigné sous le nom qu’il