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INDULGENCES


indulgences authentiquées d’ailleurs par le secrétaire de la S. G. des Indulgences et des Reliques. Décret de la S. C. en date du 28 janvier 1756, renouvelé par Pie IX, le 14 avril 1856.

b) Concessions. — Mais en même temps qu’il réglementait la discipline des indulgences le Saint-Siège continuait ses concessions de telle sorte que, de nos jours, il n’existe aucune dévotion, aucune œuvre de quelque importance qui ne soit indulgenciée.

Depuis Paul II, les jubilés se sont succédés régulièrement tous les 25 ans. A propos de celui de 1750, Benoît XIV donna des instructions détaillées qui étaient si sages qu’elles sont encore presque toutes en vigueur de nos jours..A l’occasion d’anniversaires ou d’événements notables, les souverains pontifes accordent des jubilés extraordinaires, ainsi Léon XIII en 1881 et 1886, Pie X en 1904, Benoît XV en 1921 (Paray-le-Monial), etc.

Le pèlerinage de Palestine a toujours été encourage par les papes. Pie IV, le 17 juillet 1561, concéda à nouveau toutes les indulgences accordées par ses prédécesseurs aux pèlerins visitant le Saint-Sépulcre, les églises, monastères et hôpitaux de Terre sainte, en suppléant à tous les défauts le droit et de fait des anciens privilèges. Mais encore faut-il que ces anciens privilèges aient réellement existe. Cf. Canonisle contemporain, 1914, p. 650, traduction d’un article de Mgr N. Paulus. En tout cas, Sixte V, en 1588, concéda une indulgence plénière pour la visite du Saint-Sépulcre et une autre pour celle du Calvaire, la première fut renouvelée en 1681 par Innocent X. Bien plus, le même Innocent X, en 1686, accorda aux franciscains de l’observance et aux membres des confréries érigées dans leurs églises la faveur de gagner, en y faisant le chemin de la croix, les indulgences attachées aux parcours de la Via crucis à lérusalem. Cette faveur fut étendue par Benoît XIII, en 1726, à tous les fidèles faisant le chemin de la croix dans une église franciscaine, puis, en 1731, attachée par Clément XII à tout chemin de croix érigé par les franciscains dans n’importe quelle église. Des avertissements de la S. C. des Indulgences, parus la même année 1731, fixèrent définitivement sur ce point la discipline ecclésiastique, puisqu’ils sont encore en vigueur.

Ajoutons à ces indulgences celles du rosaire, des scapulaires, de l’autel privilégié, de la bénédiction apostolique et tant d’autres qu’il serait fastidieux d’énumérer et dont on trouvera la liste dans Beringer-Hilgers, Les indulgences, trad. franc., par l’abbé Mazoyer.

rV. Théorie et pratique actuelles. — 1° Théorie. — 1. Certitudes. — Deux vérités ont été définies par l’Église en fait d’indulgences : a) son pouvoir de les accorder, b) leur utilité pour les fidèles. C’est un canon dogmatique du concile de Trente qui leur a donné cette certitude defmitive : Sacrosancta synodus indulçjentiarum usuni clirisdano populo maxime salutarem et sacrorum conciliorum auctoritate probatum in Ecclesia retinenduni esse docet et pnccipit, eosque anathemate damnât qui aut inutiles esse asserunt, vel eas concedendi in Ecclesia potestatem es.se nei/anI. Sess. XX, Decrelum de indulgentiis.

Le principe du pouvoir de rémission de l’Église en matière pénitentielle a toujours été affirmé : l’historique qui précède en est la preuve surabondante. Sur la doctrine de Bellariuin, voir t. ii, col. 578 579, et J. de la Servière, La théologie de Bellarmin, Paris, 1909, p. 472-491.

Quant à l’utilité des indulgences, elle résulte de ce que les apôtres et leurs successeurs ont été établis par N.-S. inlermédiaires entre Dieu et les pécheurs par la collation du pouvoir de lier et de délier, que cette médiation étant affirmée en termes très généraux doit

s’étendre du pardon à la réparation elle-même et qu’en résumé Dieu ne peut pas ne pas ratifier dans une certaine mesure les actes de l’autorité établie par lui. Par conséquent, l’indulgence n’est pas une nuda rcmissio pœnæ canonial comme le prétendaient les jansénistes du concile de Pistoie, condamnés par Pie VI en 1794. Cf. Donzinger-Bannwart, Enchiridion, n. 1540-1543 ; F. Cavallera, Thésaurus doctrinx catholiar, 1920, n. 1272.

2. Incertitudes. — Voilà ce qui est certain, mais quand on veut déterminer la valeur précise des indulgences, on entre dans le domaine de l’inconnu. Le tarif pénitentiel, d’après lequel on les concède, n’est plus qu’un souvenir historique : en fait, les personnes qui gagnent aujourd’hui le plus d’indulgences sont celles qui autrefois auraient eu le moins de pénitences canoniques à accompUr, si même on avait pu leur en imposer. Puis, même au temps où il était en vigueur, ce tarif était-il adopté tel quel par Dieu ? que pouvait-il même signifier exactement en passant de ce monde à l’au-delà, du temps à l’éternel ? Correspondait-il à des satisfactions, toujours égales quand elles avaient eu des durées semblables, ou la réparation n’était-elle pas proportionnelle au zèle de chacun ? les œuvres qu’on accomplissait en remplacement des peines imposées avaient-elles toujours la même efficacité réparatrice, même quand elles étaient accomplies par des pénitents de ferveurs très dissemblables ?

Examinons en particulier le cas des âmes pieuses qui gagnent des centaines et à la longue des miUiers d’années d’indulgence, comptées d’après des années de pénitence canonique qu’on n’aurait pas pu leur imposer jadis. Il y a là un surplus énorme : que représente-t-U au juste ? Une réserve où l’on pourrait puiser pour réparer les fautes à venir, pensent un assez grand nombre de fidèles. Cette conception est inadmissible, parce que l’indulgence est la remise de la peine du péché déjà pardonné et non pas du péché qui sera à pardonner.

Mais, insistent les manuels de dévotion, le gain d’une indulgence est si difficile que, pour être sûr de la gagner, il faut s’efforcer d’acquérir beaucoup plus, viser bien au-delà du but étant ici le meilleur moyen de l’atteindre. Nous demandons sur quels documents officiels se base cette doctrine ? L’Église n’a jamais entendu dans sa sollicitude maternelle imposer ou même recommander des œuvres qui ne seraient pas humainement réalisables. Par ailleurs les théologiens enseignent que par la contrition parfaite on peut arriver normalement, en dehors de tout moyen extraordinaire, au pardon des fautes mortelles, la contrition imparfaite, encore plus facilement réaUsable, eflaçant les fautes vénielles. Pourquoi serait-il beaucoup plus onéreux d’obtenir la remise de la peine que celle de la coulpe ?

Enfin, quand on gagne des indulgences par voie de suffrage pour les morts, l’incertitude augmente et devient en quelque sorte du second degré. On n’est plus ici sur le domaine de la justice pure et simple comme, lorsqu’acquérant une indulgence en faveur des vivants, on satisfait pour soi-même et parce qu’on le doit ; on agit sur d’autres âmes que la sienne par le « suffrage » qu’on offre à Dieu à leur intention. Déjà incertain en ce qui nous concerne, le tarif pénitentiel est appliqué à la réalité d’outre-tombe qui est pour nous le mystère presqu’absolu.

C’est pourquoi l’Éghse et beaucoup de ses docteurs ont été très réservés sur la valeur aux yeux de Dieu des indulgences ou des anciennes remises de pénitence : cette valeur est loin d’être nulle, car la vie tout entière de la société fondée par lui vaut aux yeux de ce Dieu, mais elle n’est pas humainement déterminable. On peut même dire qu’une telle réserve est vraiment tra-