Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 7.2.djvu/178

Cette page n’a pas encore été corrigée
1605
1606
INDULGENCES


roger sur les fautes et quelle pénitence imposer. » Can. 32. Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. IV, p. 65. Les canons qu’invoque le concile de Paris sont ceux des anciens conciles qui réglementent la pénitence publique plénière, ainsi que le prouve son décret sur les péchés contre nature : < Les clercs qui ne punissent pas les péchés contre nature par les peines prescrites dans les canons (c’est-à-dire par le canon 16 » du concile d’Ancyre) doivent être mieux instruits. On les obligera à se défaire de leurs codices pœnilentiales. » Ibid., p. 66.

La faveur de ces codices était trop grande pour qu’on pût les évincer. Aussi bien furent-ils plus abondants que jamais dans le seconde moitié du ix"e siècle et en même temps de plus en plus accueillants aux rédemptions, comme nous l’avons vu. A la fin du siècle la législation canonique dut en tenir officiellement compte, dans une mesure d’ailleurs assez restreinte. Le concile de Tribur prit en effet en 895 les dispositions suivantes : « Le meurtrier volontaire devrait être soumis à la pénitence perpétuelle édictée par le concile d’Ancyre (can. 22), mais par égard pour la faiblesse humaine on ne lui imposera qu’une pénitence à temps : après 40 jours d’excommunication rigoureuse, il sera exclu de l'Église pendant une année où il s’abstiendra de viande, de viii, d’hydromel et de miel, sauf les dimanches et les jours de fêtes, et avec la faculté en cas de voyage ou de maladie de racheter sa pénitence les mardi, jeudi et samedi au prix d’un denier ou de la nourriture de trois pauvres. »… Nisi vcl in hosle aut in aliquo magno sit itinere, vel longe aat dia ad dominicam ciirlem, vel si in infirmilate detentus sit, lune licitum sit ci terliam feriam et qaintam atque sabbatuni redimere uno denario, vel prelio denarii, sivc très pauperes pro nomine Domini pascendo. Les deux années suivantes le coupable pourra racheter les trois jours mentionnés même chez lui. Les 4<^, 5'^, 6 « et 7° années, il devra faire trois carêmes par an. Can. 56, 57 et 58, voir le texte dans Mansi, Concil., t. xviii, col. 156, 157 ; le résumé dans Hefele, op. cit., trad. Leclercq, t. iv, p. 704-705. Voici donc l’aveu officiel que l’ancienne discipline, à laquelle on renvoj’ait encore au début du siècle, celle du concile d’Ancyre, n’est plus applicable, et du même coup valeur canonique est donnée aux redemptioncs, dont les pénitentiels privés avaient depuis longtemps pris l’initiative.

En 923 ou 924, le concile de Reims accorde à certains pénitents une possibilité générale de rachat. Il s’agit de ceux qui ont pris part à la guerre de Soissons entre Robert, comte de Paris, et Charles le Simple, on décide : ul tribus quadragesimis per 1res annos agant pœnilentiam, ita ut prima quadrugesima sint extra ecclesiiini et cœna Domini reconcilientur. Omriibus liis tribus quadragesimis sccunda, quarta et sexta [cria, in pane, sale et aqua abstineant aut redimant. Simililcr quindecim diebus iinte nalivitatem suncti Joannis Baptistæ, et quindecim diebus (mie nalivitatem Domini Sulvatoris, omni quaquc sexta feria per tolum annum, nisi redimerint aut festivitas celebris ipsa die acciderit. vel cum infirmilate sive militia detentum esse contigcrit. Mansi, op. cit., t. xviii, col. 345-346. Ici la rédemption est toujours praticable et on la distingue nettement des cas d’impossibilité comme la maladie ou le service militaire. L’institution est donc nettement en progrès dans la législation elle-même ; de privée qu’elle a été pendant longtemps, elle est devenue tout à fait officielle.

Exception faite des premiers temps de l’expiation pour les crimes les plus graves, tel l’homicide volontaire frappé par le concile de Tribur, on avait ainsi abouti à la situation si nettement décrite par MgrBoudinhon : « Suivant les prescriptions des livres pénitentiels, on n’impose plus au pécheur l’exclusion

de la société ecclésiastique : par conséquent l’indulgence ne pourra plus avoir pour objet l’anticipation de la réconciUation. La pénitence consiste surtout dans l’assignation et l’accompUssement d’une certaine quantité d' œuvres satisfactoires. L’ensemble du rite, de l’aveu, des prières liturgiques et des œuvres réconcilie le pécheur avec l'Éghse, et par suite avec Dieu, sans qu’il y ait encore une distinction bien marquée entre le pardon de la coulpe et la réparation par les peines, et sans qu’on ait assigné à chaque partie de la pénitence ses effets propres de pardon ou de satisfaction. Dans cet état de choses l’indulgence aura nécessairement pour objet l’adoucissement et la rémission des exercices pénitentiels imposés à chaque pécheur, Cette rémission ne sera pas pure et simple ; elle impliquera un élément de compensation et de commutation, d’où résultera cependant un allégement pour le pénitent. » Sur l’histoire des indulgences, dans la Revue d’histoire et de littérature religieuses, 1898, t. iii, p. 442.

En somme, la rédemption est plus proche de notre indulgence que la réconciliation anticipée des premiers siècles, mais elle s’en distingue encore.

Elle s’achemine vers l’indulgence : a. parce qu’elle est postérieure au pardon, accordé dorénavant au début des exercices pénitentiels ; b. parce que si elle revêt d’abord plutôt la forme d’une commutation que celle d’une remise de peines, elle prend progressivement ce dernier caractère, le « rachat » devenant de moins en moins difficile.

La rédemption diffère de l’indulgence, parce que les conditions en sont déterminées par une intervention spéciale du prêtre dans chaque cas.

30 Les rémissions générales. — Mais au miheu du xie siècle, nous voyons apparaître des rémissions générales, valables pour tous les fidèles, applicables sans que le prêtre ait à intervenir dans chaque cas pour déterminer les conditions du rachat de la peine, et qui, transformées ainsi en des sortes de valeurs fiduciaires de l’ordre spirituel, au cours réglé universellement par l’autorité ecclésiastique, sont de véritables indulgences au sens moderne du mot.

A cette époque, en efl’et, des usages s'étabhssent qui rendent les remises pénitentielles indépendantes des considérations individuelles. Ce sont des exemptions bien déterminées d’exercices de pénitence, accordées à tous ceux, quels qu’ils soient et coupables de n’importe quelles fautes, qui auront satisfait à la condition générale d’accomplir une œuvre pie, pèlerinage, aumône ou assistance à une consécration d'église.

Car il semble « prouvé que parmi les concessions attribuées (pour le milieu du xie siècle) surtout aux évêques du sud de la France et du nord de l’Espagne quekques-unes doivent être regardées comme authenticqucs. Cf. N. Paulus, dans la Zeilschrift jiir katholische Théologie, 1909, t. xxxiii, p. 1. Et ces indulgences peuvent être gagnées par tous les pénitents qui visitent certains sanctuaires, en donnant des aumônes à telle église ou tel monastère. » « .'u cours du xi « et du xji<e siècles elles semultipUent ; les papes les accordent cependant avec une grande parcimonie, la consécration d’une église fut souvent l’occasion de nouvelles concessions. Ces premières indulgences étaient partielles ; d’abord on accorda la rémission d’une fraction de la pénitence imposée au confessional : du quart on alla jusqu'à la moitié, bientôt les faveurs papales remettent un nombre déterminé de jours de pénitence : de 8 jours on monta à 40, et à la fin du xiie siècle se rencontre l’indulgence d’un an et 40 jours. Les premières indulgences remettent tantôt la pénitence publique, tantôt la pénitence privée, imposée au confessional (entendre ce mot au sens large, le confessional, meuble pourvu de grilles, ne