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INDULGENCES

IGOO

que tristes et contraints : I, es évêques auront le pouvoir, après avoir éprouvé la conduite de chacun, de mitiger les peines ou d'étendre le temps de la pénitenci", mais il faut exaniincr ce qui s’est passé avant et après la chute et se régler d’après le résultat de ces recherches. » Ibid., p. 307. < Quant à ceux qui lors des fêtes païennes se sont contentés d’apporter et de manger de leurs mets dans le local consacré aux faux (lieux, l'évéque aura encore plus de liberté pour fixer le temps où ils seront de nouveau admis à l’olïrande, en tenant compte de la vie entière de cliacun. « Ibid., can. 7, p. 310. Le canon 22* : du concile de Nicce règle la situation des chrétiens qui, après avoir quitté l’armée, s’y étaient fait réintégrer à prix d’argent pour servir sous les ordres de Licinius, le champion du paganisme. Il donne à l'évéque le droit de faire varier le temps et les rigueurs de la pénitence, suivant les dispositions des intéressés :.Pour ces pénitents, il faut avoir soin d'étudier leurs sentiments et leur genre de vie. En elïet. ceux d’entre eux qui, par leur crainte et leurs larmes, accompagnées de patience et de lionnes œuvres, montrent dans les faits, la sincérité d’un retour réel, après avoir accompli le temps de leur pénitence parmi les « auditeurs », pourront être admis parmi les « priants » et il dépend même de l'évéque de les traiter avec encore plus d’indulgence, quXav6pcù7TÔTepôv xi TTepi, aù-tôv pouXeûaatrOai. Quant à ceux qui supportent avec indifférence (leur exclusion de l'Église) et qui pensent que cette pénitence est suffisante pour e.xpier leurs fautes, ceux-là seront tenus à faire tout le temps prescrit. » Hefele, Histoire des conciles, trad. Leclercq, t. i, p. 591. Ce dernier canon, ainsi d’ailleurs qu’une incise du 2= canon d’Ancyre « s’ils veulent les humilier davantage, » prouve que les pasteurs restaient également libres de prolonger le temps de l’expiation ou du moins de refuser d’en rien retrancher.

Ces décisions conciliaires ne furent pas, par la suite, considérées comme des mesures tout à fait exceptionnelles, uniquement destinées à liquider la situation 1 rès spéciale créée par les persécutions. Dans la pensée des Pères elles répondaient au caractère même de la pénitence qui n'était pas seulement pour eux, même sous sa forme publique, le moyen d’assurer le bon ordre de la société chrétienne par de salutaires exemples et d’opportunes amnisties, mais encore un secours destiné à chaque âme en particulier, une sorte de médication spirituelle dont la sollicitude des pasteurs devait user avec plus ou moins de rigueur suivant les dispositions des pécheurs.^ Et souvent ils estimaient l’indulgence plus secourable que la sévérité. Tel est bien le rôle que saint Basile et saint Grégoire de Nysse donnent au sage médecin des consciences.

Le premier de ces Pères, éditant, dans son épîtrc canonique ccxvii, les règles relatives au temps à passer dans les diverses classes de pénitents (pleurants, auditeurs, prosternés, consistants : classification spéciale aux Églises du Ponl et de la Cappadoce), envisage la possibilité pour l'évéque d’abréger l'épreuve ou chacune des épreuves, eu égard aux mérites des pénitents : i< Si, dit-il, l’un de ceux qui vécurent dans les péchés dont nous venons de parler fait pénitence et revient au bien, celui qui lient de la miséricorde divine le pouvoir de lier cL de délier, au cas où il se montrerait clément en considération de la grandeur de la pénitence du pécheur et diminuerait le temps des pénitences imposées, ne serait pas à blâmer, car l’histoire sainte nous apprend que ceux ((ui font une pénitence plus onéreuse éprouvent plus tôt les effets de la bienveillance divine. » Toùç (xeTà [xstî^ovoç t : 6vo’j s^O[ioXoYO’j[xévO’jç za.yéoic, t/*)v toû Osoù cfii.XavOpo)Tti.av xaTaXaii-pâveiv. Epist., ccxvii, Amphilocliio, de cunnitibus, P. G., t. xxxiii, col. 803-801.

Saint Grégoire de Nysse veut également que le

directeur des exercices pénitentiels en restreigne la durée si l'état de santé d’une âme le permet. Parlant des fornicatcurs, il s’exprime comme il suit : « Quand il s’agit de pécheurs dont la conversion est fervente et la vie révèle un véritable retour au bien, il est permis à celui qui est chargé de pourvoir au bon gouvernement de l'église (le grec porte : à celui qui veille à la bonne économie de l'église) de réduire le temps à passer dans la classe des « auditeurs » et de hâter le moment de la réconciliation (ou conversion) ; l'économe spirituel ]ieut ensuite accorder encore une autre réduction et rendre plus tôt la communion, de telle sorte que celui qui bénéficie du remède de la pénitence montre que l'épreuve lui a rendu la santé de l'âme (mot à mot : que l'épreuve a permis de diagnostiquer la vigueur de son tempérament spirituel, de sa xaràcx(x.aiç). On agira de même à l'égard des adultères. En appliquant cette thérapeutique spirituelle, on tiendra compte de l’ensemble des dispositions du sujet. (En grec : de sa Siot.Qca'.( ;. expression technique qui désigne le tempérament physique chez Hippocrate et Aristote. On remarquera cette accumulation de termes médicaux.) De même dans le cas des fornicatcurs on s’inspirera de cette considération pour hâter ou retarder le moment de la participation aux biens de l'Église. » Epist. canon., c. iv, P. G., t. xlv, col. 229230.

Au v<e siècle, saint Innocent 1° et saint Léon laissent également à l'évéque le soin de proportionner la durée des exercices pénitentiels au zèle des coupables. « C’est à l'évoque, dit saint Innocent, de juger de la gravité des fautes. Qu’il tienne compte de la confession du pénitent, des pleurs et des larmes par lesquels il s’amende : il lui appartiendra alors d’ordonner sa libération quand il constatera une satisfaction sufRsante. » Epist. ad Decenlium Eu{iubiniirn. c. vii, P. L., t. Lvi, col. 517. Cf. S. Léon, Epist., x, n.8, eux, n. 0, P. L., t. Liv, col. 635, 1138.

La remise des peines canoniques fut donc un usage courant à l'époque patristique. Mais ce n'était pas l'équivalent exact de l’indulgeiice au sens moderne, parce que, 1° l’on supposait souvent que la peine due au péché était déjà remise devant Dieu, à cause des mérites du pénitent, quand l'évéque intervenait, et que : 2° cette intervention épiscopale précédait la réconciliation ou plutôt se confondait avec elle au lieu de la suivre. Le développement de la pénitence du V au vin<e siècle va amener avec la pratique des rédemptions un usage plus proche de notre discipline actuelle.

Les rédemptions.

1. Le système pénitentiel sur lequel elles se (jrejfent. — A partir due siècle, en elïet, nous entrons dans une période où la pénitence subit des transformations profondes (ce qui ne veut pas dire radicales, comme l’affirment Lœning et d’autres) : c’est l'âge barbare, l'âge des invasions.

Deux grands faits se produisent ou vont se produire : 1. le développement des éléments privés de la pénitence aux dépens de ses éléments publics ; 2. l’introduction par les missionnaires cettes dans l’Occident. l’Espagne exceptée, des tarifs des livres pénitentiels. Il faudra atteindre la fm du ix'e siècle pour que ces deux grands faits aient donné toutes leurs conséquences qui restent acciuises au x"' et pendant la première moitié du xi"^.

La penilence publique, normalement imposée pour les fautes les plus graves, obligeait les coupables à de longues années d’un ascétisme rigoureux et à des humiliations très pénibles : « Le pénitent, revelu du sac ou du ciliée, en présence de toute l’assemblée des fidèles, recevait l’imposition des mains de l'évéque et était séjiaré au moins moralement de la communauté chrétienne : il devait couper ses cheveux et porter pendanl tout le temps que durait son expiation