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INDIFFERENCE RELIGIEUSE


vaincant que le séculaire acharnement de tous ses ennemis à trouver de nouvelles objections, celles de la veille étant chaque fois classées comme sans valeur. Pour les reliyions non chrétiennes, il y a eu des coups de lumière sur elles dont elles ne se sont jamais relevées, et dont elles ne se relèvent pas chaque fois qu’elles doivent les subir : aucune ne résiste à l’esprit critique introduit chez leurs fidèles. Contre le christianisme, on n’a encore rien trouvé qui fasse l’unanimité désormais assurée de tous les rationalistes et qui pour les esprits les plus savants et les plus critiques n’ait pas trouvé une réfutation pleinement pacilianle. Sur les variations rationalistes, voir Déisme, t. iv, col. 234242 ; DiKu, col. 759-881, 912-918 ; Vigouroux, Les Livres saints et la crilique ralionalislc, t. n. - — d) Si le bien et le vrai ne sont que des instincts matérialistes ou des phénomènes subjectifs, en évolution d’ailleurs peu compatible avec la liberté, alors oui, tout est vrai et tout est bon suivant la simple convenance aux consciences subjectives. Mais en dehors de ces philosophies antihumaines, c’est une absurdité de dire que toutes les religions se valent, même pour les consciences individuelles, de traiter de fous les missionnaires, qui veulent, « convertir » les pauvres dégradés. Toute religion est bonne, dit-on, pour la conscience qui la croit bonne ; il faut distinguer avec soin cet aphorisme, bonne de bonté objective, absolue : non pas nécessairement ; bonne de bonté subjective, relative : dans un certain degré oui ; mais ce degré sera suflisant (religion qui peut être gardée et sauver l'àmc) si celleci contient la substance de la vraie religion surnaturelle et si la conscience est disposée à embrasser la religion intégralement vraie dès qu’elle en aura les moyens ; au cas contraire d’insuffisance substantielle, la conscience ne pourra s’y satisfaire que pour un temps seulement ; un jour ou l’autre si elle fait ce qu’elle doit, le ciel l’aidera et elle arrivera enfm à la vérité au moins substantiellement nécessaire.

e) Il ne nous reste plus à faire qu’une dernière considéralion posilivc. Laissons le matérialisme, qui met de la religion, et très élevée, dans les abeilles pour enlever toute sa valeur à celle qui est dans l’honune, voir Le Dantec, L’alhéismc, passim ; laissons le subjectivisme qui ruine toute raison pour mieux ruiner toute foi obligatoire héléronome, voir AgnosTiciSMF. ; il est clair que Dieu ne peut être inditïérent au vrai et au faux, à la vertu et au vice, inditïérent à être traité de Jupiter avec Junon et le reste comme cour, de Ahura-Mazda avec Ahriman en face de lui, de dieu totem, de Bouddha, de Vishnou. ou de Dieu très saint ; ne peut être indilïérent à être honoré par un culte de fétiches, le culte des honteux mystères gréco-romains, celui des sacrifices humains anthropophages, des processions hindoues, des pagodes chinoises ou des temiiles théosophes, etc. Il est impossible enfm d’admettre la vérité des contradictoires affirmées par les diverses religions du globe terrestre, sur Dieu et sa nature, et ses attributs et ses œuvres, et son influence sur le monde et ses lois essentielles et les tinalités imposées à l’humanité ; impossible d’admettre l'égalité morale de Baal ou Bélial et de Jahve ou du Christ. Voir les lielles considérations de Lamennais, op. cit., c. iv-v ; Weiss, op. cit., t. i, ]). 411432 ; Causselte, op. cit., t. i, p. 231-262.

Toutes les religions existantes ne sont pas vraies, et toutes ne sont pas fausses ; il y en a donc une et une seule de vraie, d’absolument vraie, les autres n’ayant que des dégradations et des parcelles de vérité et de bien en divers degrés.

2. Comment trouver cette unique vraie religion concrète ? — a) Il faut d’abord préparer son âme à la recevoir par l’ensemble de ces dispositions morales qui écartent les obstacles et ouvrent l’esprit et le

cœur à la vérité qu’ils seront heureux de reconnaître enfin et d’embrasser. Ces dispositions morales n’ont pas d’autre rôle à remplir, rôle cependant, en pratique, capital et le plus souvent décisif. Voir Grâce, t. vi, col. 1630 sq. ; Foi, t. vi, col. 237-sq. ; Expérience RELIGIEUSE, t. V, col. 1847 sq.

b) Et puis il faut étudier la vraie religion ; étude qui a toutes les modalités des esprits qui cherchent où Dieu se donne aux àines.

Il y a l'étude du philosophe qui part du matérialisme ou du positivisme (par exemple, Brunetière), de l’esprit anxieux qui arrive à travers le sulijectivisme et le crilicisme (par exemple. Miss Baker), celle du révolté qui remonte du nihilisme (par exemple, A. Hetté) et celle de l’esprit sans culture qui doit secouer, avec le joug de ses passions, le voile de préjugés grossiers ou même de cjuelque fausse religion, sauvage ou civilisée, l'étude de l’Esquimau qui observe le missionnaire et l'écoute pendant des années dans ses iglous de glace, et l'étude du Cafre qui pense nonchalamment près de son kraal. Il y a l'étude de l’artiste qu’attire quelque secrète beauté supérieure, la beauté qui satisferait l'âme, là, dans cette religion et non ailleurs. Voir Th. Mainage, La psychologie de la conversion, Paris, 1914, iii^ leçon, p. 38-81 (l’enquête intellectuelle des convertis).

c) Enfin il faut prier, plus que jamais, pour obtenir la dernière décision qui plie la volonté orgueilleusement indépendante ou le cœur captif ou l’esjji’it enivré de sa propre lumière, enfin qui captive l'âme in obsequium Christi. II Cor., x, 5. Cf. Expérience RELIGIEUSE, t. V, col. 1814 Sq., 1825-1826.

3. Quelle est celle unique vraie religion ? — Le christianisme évidemment ; sa transcendance au-dessus de toutes les autres religions éclate lumineuse à ((uiconque regarde celles-ci avec attention. Cette transcendance peut être envisagée dans la force critique des jireuves historiques ou dans l’excellence intrinsè((ue unique du christianisme. Toutes les grandes religions présentent des titres à une origine divine, surnaturelle. Mais que valent les titres qui concernent la mission divine du Bouddha, de Zoroastre. de Confucius, de Manès, d’Apollonius de Thyane ou de Mahomet, en comparaison surtout de ceux qui concernent Jésus-Christ ? voir Jksus-Chkist ; les apologétiques modernes, par exemple, Tanquerey, op. cit., p. 192260 ; L. Picard, La transcendance de Jésus-Christ, 2 vol., Paris, 1905 ; les références plus haut sur l’histoire des religions ; les conférenciers apologistes : Lacordaire, Freppel, Monsabré.

Toutes les grandes religions se donnent comme la voie parfaite à la fin suprême. Mais, ici encore, que valurent ou que valent, comme dogmatique, comme morale, comme institutions, comme bienfaisance et pouvoir d’action à travers les siècles et les espaces, toutes les religions païennes, mortes ou vivantes, sans excepter le bouddhisme philosophique ou populaire ? que vaut le mahométisme ? que vaut le judaïsme rabbinique nu mystico-matérialiste actuel ? Parmi les âmes d'élite en marche vers l’idéal religieux et moral, qui a jamais songé à se « convertir >, à ces religions, au moins après avoir connu le christianisme ? En comjiaraison en elîet avec ces pauvres créations huniano-diaboliques, où le divin cependant n’est pas tout détruit, quelle splendeur dans tout ce qui constitue le christianisme ! Voir Jésus-Christ ; Apologétique, t. i, col. 1527 sq. ; Religion ; de Broglie. Problèmes et conclusions de l’histoire des religions. c. viii-xi ; Lacordaire, Conférences, xjv-xxxvii ; Monsabré, Carême, 1890 ; les manuels comme Tanquerey, op. cit., p. 144-162 et 319-3.32 ; Expérience religieuse, t. v, col. 1856-1861 ; Caussette, op. cit., t. i, p. 202-519.