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INDEX — INDIFFÉRENCE RELIGIEUSE

les manuscrits, les simples brochures, les journaux et probablement les numéros isolés d’une revue ; et fussent-ils prohibés par les décrets généraux, fussent-ils même hérétiques, ils ne font pas encourir l’excommunication. Il est indispensable, en outre, que ces livres défendent l’hérésie, c’est-à-dire que leurs auteurs, non contents de la faire connaître, s’évertuent à l’accréditer par divers raisonnements, quelle que soit d’ailleurs la valeur apodictique des preuves, pourvu que la défense soit une des fins poursuivies. Voir Hérésie, t. vi, col. 2249-2250. Par apostats, entendons ceux qui ont renoncé à tout christianisme, qu’ils aient ensuite embrassé ou non quelque religion non chrétienne, et par hérétiques, ceux qui nient obstinément tel ou tel dogme catholique, qu’ils appartiennent ou non à une secte connue. Apostats ou hérétiques, il est nécessaire qu’ils soient notoirement tels. Voir Apostasie, t. i, col. 1609. Encourent en second lieu la peine de l’excommunication réservée au pape, les lecteurs des livres condamnés nommément par lettres apostoliques. Sous ce nom sont comprises les lettres où le souverain pontife en personne prend la parole, tels les bulles, les encycliques, les brefs ou les lettres proprement dites, et non les autres documents émanés des Congrégations romaines. Quelle que soit la forme des lettres, il faut que le titre au moins du livre y soit expressément désigné, avec interdiction de le lire sous peine d’excommunication. Ces livres de l’une et l’autre catégorie, quiconque sciemment les lit, les garde, les imprime et les défend, est passible de la censure. Le terme sciemment affecte chacune des quatre actions proscrites. Il est donc nécessaire de connaître la peine édictée, de savoir pertinemment qu’elle s’applique dans un cas concret. Par conséquent, la bonne foi et l’ignorance, probablement même affectée, en excusent. La lecture est l’acte principal interdit. Lire, qu’est-ce, sinon parcourir un livre des yeux en en comprenant le sens. Cette simple notion suffit à éliminer certains actes que n’atteint pas le texte du décret, telles seraient, par exemple, la lecture d’un livre écrit dans une langue ignorée, ou la récitation de mémoire d’un passage. Quelle somme de lecture fait encourir l’excommunication ? Il faut et il suffît qu’elle soit assez notable pour constituer une faute mortelle. Sont estimés retenir un livre : ceux qui l’ont en propre, qu’ils le possèdent ou non par devers eux, ceux qui le gardent en leurs maisons, comme leur ayant été confié ou prêté. Ils encourent régulièrement, s’il y a de leur part faute grave, l’excommunication ; il est juste d’excepter le cas, où quelqu’un, dûment autorisé à lire et à conserver les ouvrages prohibés, retiendrait chez soi le livre d’un autre, durant le temps qu’il faut à ce dernier pour obtenir la permission de l’Index. Sont excusés de la censure le serviteur ou le bibliothécaire préposés à la garde et à l’entretien de livres prohibés : ils ne peuvent être dits les avoir en propre ni les conserver chez eux. A parler absolument, le relieur est censé être retinens ; en pratique, à défaut d’autres raisons, l’ignorance le plus souvent l’excuse. Quant aux personnes visées par le terme imprimentes, il est sage d’admettre, avec Mgr Boudinhon, « que l’excommunication atteint : 1° « l’auteur, s’il fait imprimer son ouvrage ; 2° l’imprimeur, c’est-à-dire le patron de l’imprimerie qui prend en charge l’impression du livre ; 3° l’éditeur qui fait imprimer et se charge de la vente », et « que les employés inférieurs de l’imprimerie ne sont pas excommuniés, sauf les compositeurs et les correcteurs, en tant qu’ils lisent sciemment. » Est passible de la censure, en dernier lieu, quiconque défend les livres en question et de n’importe quelle manière, soit que par force, menaces, ordre ou conseil il empêche qu’ils soient livrés aux autorités ecclésiastiques ou détruits, soit que de vive voix ou par écrit, en public ou en particulier, il en patronne la doctrine hérétique.

Un peu différente est la rédaction du canon 2318 du nouveau Code, renouvelant l’excommunication portée par la bulle Apostolicæ sedis. Il y est parlé de livres non seulement d’apostats et d’hérétiques, mais encore de schismatiques, soutenant l’apostasie, l’hérésie ou le schisme.

Des sanctions destinées à faire respecter les autres prescriptions contenues dans les décrets généraux sont en outre prévues : monition ou peines canoniques, les évoques veilleront à les établir et à les graduer avec une prudente discrétion. N. 49.

H. Reusch, Der Index der verbotenen Bücher, 2 in-8°, Bonn, 1883, 1885 ; Petit, L’Index, son histoire, ses lois, sa force obligatoire, Paris, 1888 ; Grimaldi, Les Congrégations romaines, Sienne. 1890 (condamné par le Saint-Office et à consulter avec précaution) ; Arndt, De libris prohibitis commentarii. Ratisbonne, 1895 ; Hollweck, Das kirchtiche Bücherverbot, Mayence, 1897 ; Périès, L’Index, Paris, 1898 ; Genari, La costituzione « Officiorum », Naples, 1898 ; Pennachi, Commentarium in constitutionem « Officiorum ac munerum », Rome, 1898 ; A. Boudinhon, La nouvelle législation de l’Index, Paris, 1899 ; Wernz, Jus Decretalium, Rome, 1901, t. iii : De prohib. censura et divulgat. librorum, n. 95-131 : Hilgers, Der Index der verbotenen Bücher. Fribourg-en-Brisgau, 1904 ; Die Bücherverbote in Papstbriefen, ibid., 1907 ; A. Vermeersch, De prohibitione et censura librorum, Tournay, 1898 ; Rome, 1906 ; Noldin, Summu theologiæ moralis, Inspruck, 1911, t. ii. De præceptis, part. III, l. III. n. 723-739 ; Forget, Dictionnaire apologétique de la foi catholique, Paris, 1913, t. ii, col. 702-716 ; Choupin, Étude sur la râleur des décisions doctrinales et disciplinaires du saint-siège. Paris, 1913.

A. Thouvenin.

INDIFFÉRENCE RELIGIEUSE. ~


I. Notions. Indifférence pratique. Problèmes théoriques.
II. Apologétique progressive : indifférentisme irréligieux absolu ; indifférentisme religieux naturaliste ; indilTérentisme religieux surnaturel ; indifférentisme chrétien.

I. Notions. Indifférence pratique. Problèmes théoriques.

Notions. —

1. Indifférent, qui ne fait pas de distinction, de différence entre une chose et sa négation ou son contraire ; indifférence religiensc, attitude de celui que ne prend pas parti entre les diverses formes religieuses ou qui les proclame toutes de même valeur ; indiffércnlisme. le système érigeant cette attitude en doctrine ou en loi.

Ne pas prendre parti, c’est une indifférence négative ; attribuer une même valeur à toutes les religions, c’est de l’indifférence positive. Celle-ci peut tenir toutes les religions comme fausses, inutiles, ou mauvaises : c’est alors de l’irréligion ou de l’indiflérenlisme individuel absolu. Elle peut encore, réservant la question des consciences individuelles, ne vouloir expulser la religion que de la vie publique, sociale et politique : c’est de V indiffércnlisme absolu politico-social.

Mais supposé qu’on croie nécessaire quelque religion, on peut admettre que toutes les religions en définitive sont également bonnes, chacune pour ses adeptes, soit pour le salut dans l’autre monde, soit pour le lionheur temporel des consciences humaines : et c’est cela proprement l’indiffércnlisme religieux. —

2. A côté de ces mots et de ces idées, il y a d’autres mots employés parfois comme synoniimes, d’autres idées regardées comme équivalentes, qu’il vaut mieux séparer nettement.

Neutralité d’abord : c’est l’attitude externe de l’indifférence au milieu d’un conflit entre partis ennemis ; indifférence dit plutôt attitude intérieure de l’esprit et de la volonté.

Tolérance, c’est la non suppression d’un mal qu’on ne peut empêcher. Eriger la tolérance en système, par principe de liberté, de fraternité, etc., c’est le