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INDEX

ou s’attaquent de quelque façon aux fondements de la religion. » Il importe peu de définir les termes d’apostats, d’hérétiques ou de schismatiques ; la prohibition atteint les livres dont les auteurs, quels qu’ils soient, exposent et soutiennent des idées et opinions contraires à la foi, à l’unité de l’Église ou aux vérités fondamentales de la religion, dans le but avoué de les faire partager aux autres. Que faut-il entendre ici par les fondements de la religion ? Très certainement les vérités d’ordre naturel sans lesquelles la religion catholique manquerait de base ; peut-être aussi les vérités d’ordre positif et surnaturel qui servent à étayer le traité De vera religione. — N. 3. « Sont prohibés de même les livres des auteurs non catholiques traitant directement de la religion, à moins qu’il ne soit certain qu’ils ne contiennent rien contre la foi catholique. » Il semble que l’expression « non catholique » doive s’entendre au sens le plus large, non seulement d’hérétiques et de schismatiques, mais encore de juifs et d’infidèles. Il s’agit de livres qui traitent expressément, au moins pour une partie notable, de matières religieuses, telles que Écriture sainte, droit canon, histoire ecclésiastique, questions dogmatiques et morales, ascétique chrétienne, etc. Ces ouvrages, en raison de leur provenance, sont présumés dangereux et mauvais. La présomption est générale, mais non pourtant absolue ; elle cesse dès qu’il est prouvé qu’ils ne renferment rien contre la foi catholique. Qui administre cette preuve ? Des lecteurs compétents, par des comptes rendus bibliographiques exacts, des livres qu’ils avaient lus, se croyant ou non autorisés. — N. 4. « Ne sont pas prohibés les livres de ces auteurs non catholiques, mais qui ne traitent pas ex professo de la religion et ne touchent qu’en passant aux vérités de la foi, à moins qu’un décret spécial ne les proscrive. » Contrairement aux précédents, ils ne sont pas interdits par le droit positif, même s’ils contiennent des erreurs éparses contre la foi catholique, ces erreurs étant considérées connue accidentelles par rapport à l’objet principal de l’ouvrage.

C. ii. Des éditions du texte original de la sainte Écriture et des versions en langue non vulgaire. — N.5.

« Les éditions du texte original de la sainte Écriture

et des anciennes versions catholiques, même celles de l’Église orientale, publiées par des écrivains non catholiques quels qu’ils soient, bien qu’elles paraissent fidèles et intègres, sont permises à ceux-là seulement qui s’occupent d’études théologiques ou bibliques, pourvu toutefois qu’elles n’attaquent, ni dans les préfaces, ni dans les notes, les dogmes de la foi catholique. » Les éditions, aujourd’hui, se recommandent par une correction scientifique qu’on ignorait au début de la Réforme. Cependant, on n’est autorisé à faire usage de celles qu’ont publiées des auteurs non catholiques, que si les deux conditions déterminées sont réunies. Par ceux qui s’occupent d’études théologiques ou scripturaires, entendons ceux qui professent ou étudient ces matières dans les facultés, collèges, séminaires ; ceux qui, clercs ou laïques, y vaquent en vue d’un examen à passer, d’une thèse à produire, ou même des prêtres qui, le cycle de leurs études achevé, s’y adonnent en quelque manière. Ils pourront employer les éditions de la Bible hébraïque, des Septante, du Nouveau Testament en grec, publiées par les Sociétés bibliques ou d’autres auteurs non catholiques. — N. 6. « De la même manière et aux mêmes conditions sont permises les autres versions des saints Livres publiées par des auteurs non catholiques, soit en latin soit dans une autre langue non vulgaire. »

C. iii. Des versions de la sainte Écriture en langue vulgaire. — N. 7. « Sont absolument prohibées toutes les versions en langue vulgaire, même faites par des catholiques, si elles n’ont pas été approuvées par le siège apostolique ou éditées sous la surveillance des évêques avec des annotations tirées des Pères de l’Église et de savants auteurs catholiques. » Donc, pour une traduction en langue vulgaire de la Bible, sans notes, il faut l’autorisation du Saint-Siège ; avec notes, l’approbation de l’évêque suffit. Ces notes seront empruntées, sinon textuellement, au moins pour la doctrine, aux Pères et aux savants auteurs catholiques. Rien n’empêche que les annotations d’ordre purement profane, géographiques, archéologiques, ethnographiques, soient tirées d’ouvrages non catholiques, pourvu que l’évoque les approuve. Tous, même les laïques, peuvent, en droit ecclésiastique, lire et garder les traductions approuvées de la sainte Écriture. Les livres de prières contenant les épîtres et évangiles de l’office divin, sans notes, n’ont pas besoin d’une autorisation spéciale du saint-siège, mais seulement de l’approbation épiscopale. — N. 8. « Sont interdites toutes les versions des saints Livres en une langue vulgaire quelconque, faites par des écrivains non catholiques, quels qu’ils soient, et notamment celles publiées par les Sociétés bibliques. Néanmoins, l’usage de ces versions est permis à ceux qui s’occupent d’études théologiques et scripturaires, aux conditions établies ci-dessus (n. 5). »

C. iv. Des livres obscènes. — N. 9. « Sont absolument prohibés les livres qui traitent ex professo de sujets lascifs ou obscènes, qui contiennent des récits ou des enseignements de ce genre. » La prohibition de droit ecclésiastique est moins étendue que la défense de droit naturel. Elle n’englobe pas les ouvrages simplement immoraux, dangereux ou légers, mais seulement ceux dont l’objet principal ou du moins notable est d’exposer et de décrire des choses obscènes, ou même d’en instruire pratiquement, en vue évidemment d’exciter les passions honteuses et de corrompre. Dans cette littérature, dite pornographique, on ne doit pas ranger les ouvrages spéciaux d’anatomie, de médecine, de science morale où ce genre de matières est traité dans un but purement scientifique. — N. 10. « Les livres classiques, soit anciens, soit modernes, s’ils sont obscènes, sont permis à cause de l’élégance et de la propriété du style, à ceux-là seulement qu’excusent les devoirs de leur charge ou de leur enseignement ; mais on ne devra, pour aucun motif, les remettre ou les lire aux enfants et aux jeunes gens, s’ils n’ont été soigneusement expurgés. » Les classiques, en toutes les littératures, sont les ouvrages que la beauté de la forme a fait ranger parmi les modèles. Que faut-il entendre par ceux que les devoirs de leur charge ou de leur enseignement excusent ? Certainement tous les professionnels des belles-lettres, critiques, professeurs. On y joindra vraisemblablement les directeurs des études dans les collèges, que leur fonction oblige à veiller sur les cours de littérature. Entendons de même les candidats aux grades littéraires supérieurs, relativement aux ouvrages qui figurent au programme, ceux qui étudient dans les universités en vue du professorat, ceux qui préparent une thèse qui n’est pas étrangère aux livres visés. Il peut arriver que la défense de remettre ou de lire à des enfants et à des jeunes gens les classiques obscènes, s’ils ne sont expurgés, concerne encore, vu leur âge peu avancé, des étudiants de facultés. Si les lois du pays prescrivent l’emploi d’éditions complètes, ils peuvent, usant d’épikie, s’en servir ; mais il n’est pas permis de lire à des enfants les passages obscènes, sinon peut-être afin d’éviter un plus grand mal, c’est-à-dire dans le cas où ces enfants, dûment avertis, les liraient quand même. Notons encore que les concessions de l’article 10 ne suppriment pas la loi naturelle