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INDEX

malités la publication des livres. Prohibition et censure préalable sont, en effet, les deux mesures auxquelles se ramènent l’Index et sa législation. L’impression de ses livres officiels, tels que : Écriture sainte, missel, bréviaire, rituel, actes du saint-siège, est en outre de la part de l’Église l’objet d’un contrôle spécial ; des règles particulières les concernant ont donc aussi leur place dans l’Index. A moins d’être imbu d’un faux libéralisme, on ne peut dénier à l’Église le droit de se protéger, elle et ses membres. — On connaît les objections souvent ressassées : que des auteurs catholiques, plutôt que des incroyants sont en butte aux rigueurs de l’Index, qu’on les condamne sans les entendre, malgré d’éminents et nombreux services rendus, sans souci de leur honorabilité ; que, par des mesures étroites, d’un autre âge, on entrave le progrès de la science, on décourage la libre recherche, etc. Le cadre de cet article ne comporte pas une apologie en règle de l’Index et de ses condamnations. Notons cependant que l’Église, contente d’arrêter la contagion de l’erreur ou du mal, accorde prudemment des permissions de lire et de garder les ouvrages proscrits, et qu’ainsi tout ce qui, dans ces livres est forme littéraire, vérité scientifique, contribution à l’histoire, demeure accessible. Notons encore que la constitution Sollicita ac provida de Benoît XIV, 1753, qui détermine la procédure des S. S. C. C. de l’Index et du Saint-Office pour la condamnation des livres est toujours en vigueur, sauf les modifications apportées par le droit postérieur, que les règles à suivre vis-à-vis des auteurs catholiques formulées par elle, constituent un ensemble de précautions, telles qu’elles empêchent une décision hâtive ou peu mesurée, qu’elles sauvegardent le bon renom des personnes, qu’elles facilitent une condamnation avec la clause restrictive donec corrigatur. Notons enfin que le saint-siège dans la législation de l’Index s’est toujours inspiré des nécessités de chaque époque, et que tout récemment Léon XIII par sa constitution Officiorum ac munerum, 1897, a cru devoir la modifier dans le sens d’une mise au point et d’un adoucissement.

Il oblige partout et gravement. — Les décrets de l’Index, prohibitions générales et défenses particulières, obligent tous les fidèles et en tous lieux. La prétention des gallicans, soutenant que la France n’y était pas soumise, n’était fondée au regard ni de la théologie ni du droit : aussi depuis longtemps déjà est-elle entièrement passée de mode. Non seulement les souverains pontifes peuvent faire que ces décrets soient universellement obligatoires, mais telle est en fait leur intention déclarée. Naguère Léon XIII l’a formellement affirmé dans la constitution Officiorum ac munerum : « les livres condamnés par le siège apostolique seront tenus pour prohibés dans le monde entier et en quelque langue qu’ils soient traduits, » c. iv, a. 45. Une exception toutefois est formulée par le nouveau Code en faveur des cardinaux, des évêques, même titulaires, et des autres ordinaires : ils peuvent, sans se départir des précautions nécessaires, se regarder comme exempts des prohibitions de l’index. Codex juris canonici, can. 1401.

Les condamnations qui émanent du saint-siège ne sont pas restreintes à un territoire quelconque comme sont les prohibitions procédant de l’autorité épiscopale. Car les évêques aussi ont le droit, chacun dans leurs diocèses respectifs, d’imposer un index particulier proscrivant les livres et publications périodiques qu’ils estiment funestes. L’article 29 des décrets généraux leur en fait même un devoir et le pape, afin d’accroître vis-à-vis d’esprits rebelles leur autorité suffisante en soi, déclare qu’ils pourront agir au besoin « comme délégués apostoliques. »

L’obligation de respecter les prohibitions de l’Index est grave de sa nature, ex genere suo. Car la fin que le législateur s’est proposée d’écarter des fidèles un danger imminent, et l’urgence des mesures qu’il a prises en vue de ce résultat à obtenir, sont d’une réelle gravité. Néanmoins, la matière d’une infraction à la défense de lire et de conserver pourra n’être parfois que légère. C’est aux casuistes qu’il appartiendra de décider en ceci, soit qu’ils distinguent entre les publications proscrites en raison de leur objet et celles qui le sont par défaut d’approbation préalable, soit qu’ils déterminent ce qu’en fait de lecture ou de rétention on doit estimer chose notable.

II. Législation actuelle. — La législation de l’Index comprend deux parties distinctes : les décrets généraux et les défenses particulières ou le catalogue des livres nommément interdits. Ces deux parties ont été modifiées par la récente constitution Officiorum et munerum du 25 janvier 1897, pour ce qui concerne les lois, et par la dernière édition officielle de l’Index librorum prohibitorum, en 1900, pour ce qui regarde la liste des ouvrages. Le catalogue a été minutieusement revisé dans l’esprit et avec les tempéraments qu’on avait apportés à la rédaction des nouveaux décrets généraux. Quant à ceux-ci, ils suppriment et abrogent du droit ancien tout ce qu’ils ne maintiennent pas expressément en vigueur. Le nouveau Code, malgré quelques condensations et retouches opérées, ne les a pas modifiées profondément. Prohibition et Censure, tels sont les deux titres qui en partagent la matière. La prohibition est la défense qui interdit aux fidèles l’usage des livres condamnés ; la censure est le jugement porté sur l’orthodoxie et la moralité des ouvrages ou du moins sur la régularité de leur publication au point de vue des prescriptions ecclésiastiques. La prohibition est la conséquence d’une censure défavorable.

Nous ne nous occupons dans cet article que de la prohibition, encore laissons-nous de côté ce qui a trait aux défenses individuelles, comme serait un historique des livres condamnés. Mais avant que nous procédions à une revue sommaire des prohibitions générales, il ne sera pas sans intérêt de rappeler à quoi s’étend la prohibition d’un livre. Pour en déterminer exactement la portée, il importe de consulter d’abord le texte de l’interdiction. Cependant, la prohibition vise en premier lieu et directement la lecture comme étant essentiellement funeste ; et lorsqu’elle est totale et absolue, elle vise en outre tout ce qui se fait en vue de la lecture : la garde, la publication, la défense, la vente ou la communication à d’autres des livres prohibés.

Prohibitions générales. — C. i. Des livres prohibés des apostats, hérétiques, schismatiques et autres écrivains. — N. 1. « Demeurent condamnés comme jadis tous les livres condamnés avant l’année 1600 par les souverains pontifes ou les conciles œcuméniques, sauf ceux qu’autorisent les présents décrets généraux. » Les ouvrages d’hérétiques des premiers temps, tels que ceux de Tertullien, Origène, Pelage, qu’on regardait généralement, même avant la constitution, comme permis ou tolérés, semblent encore pouvoir être exceptés de la défense, soit parce qu’ils renferment des hérésies ou erreurs qui n’ont plus aujourd’hui d’adeptes et sans danger pour personne, soit parce qu’ils apportent à l’histoire des usages ecclésiastiques d’autrefois et des dogmes véritables une précieuse contribution. Le doute, possible encore après 1897, ne l’est plus depuis que le Code de droit canonique a laissé tomber tout l’article 1er. Can. 1399. — N. 2. « Sont absolument prohibés les livres des apostats, des hérétiques, des schismatiques et de tous autres écrivains qui propagent l’hérésie ou le schisme