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INCARNATION


entre théologiens. Voir Salnianticenses, loc. cil., § G. Les thomistes tiennent généralement que le Christ n’a pu mériter la maternité divine de Marie ; mais toute une école, dont le plus illustre représentant est le cardinal De Lugo, disp. VIII, sect. vii, défend l’opinion opposée. On pourra, dans le sens thomiste, consulter avec fruit Gonet, disp. VII, a. 3, n. 36 ; Suarez, disp. X, sect. iv ; Théophile Raynaud, op. cit., t. III, scct. II, c. iii, n. 191 ; dans le sens lugonien, Bernai, disp. XVII, sect. iv, S 2, n. 76. Au point de vue de la piété et du jugement à porter sur la véritable grandeur de Marie, l’une et l’autre opinion peuvent être regardées comme équivalentes. Dans l’une et dans l’autre, Marie reste toujours indissolublement unie au Fils de Dieu, prédestinée à cause de lui, et n’ayant d’autre raison d’exister que l'œuvre de la réparation du genre humain à laquelle elle est attachée, comme son fils. S. Augustin tient nettement pour l’opinion que soutiendra plus tard l'école thomiste, De prædeslinalione sanctoriim, c. XV, n. 30, 31, P. L., t. xliv, col. 982. — 7. Le Christ, enfin, a mérite dans l' incarnation, les circoÊistances qui ont suiiii Cunion hijposlatique. — Cf. S. Thomas, Siim. Iheol., 111% q. XIX, a. 3 ; In IV Sent., t. III, dist. XVIII, a. 2-5. Il s’agit ici des circonstances qui ne sont pas hées nécessairement au mystère lui-même et regardent non seulement la glorification du Christ lui-même, mais encore l’avantage des personnes qui ont eu contact avec l’incarnation ; par exemple, être annoncé par l'étoile, célébré par les anges au berceau, adoré par les mages, etc. Dès le premier instant de sa conception, en effet, le Christ a mérité, et, toutes choses égales d’ailleurs, il était mieux et plus convenable que le Christ obtint par mérite, que sans mérite, ces manifestations particulières de sa gloire accidentelle et particuliôrcnient la gloire de son corps et l’exaltation de son nom. Luc, xxiv, 16 ; Phil., ii, 8 sq. Voir JÉsusChkist. Quant aux circonstances concomitantes, la jilupart des théologiens sont d’avis que le Christ n’a pu les mériter, tout au moins n’a pu mériter ce qui, en elles, le concernait personnellement et ne fait qu’un seul tout avec l’incarnation elle-même, être conçu du Saint-Esprit, naître d’une vierge, par exemple. Cf. Suarez, disp. X, sect. iv. L’opinion contraire est soutenue par Vasquez, disp. XXI, c. viii. Cf. Salnianticenses, disp. ^'II, 11.51. Eiiliii, des circonstances qui précédèrent l’incarnation, le (Mnisl n’a pu mériter, comme il a mérité d’une façon anticipée la grâce des saints de l’Ancien Testament, voir Salut, que celles qui ne sont pas essentielles ù l’incarnation : aiïirmer un tel mérite serait indirectement contredire à l’axiome déjà atririné que le principe du mérite ne peut être objet du mérite. Ibid., n. 52 ; Suarez, loc. cit.

Les saints de l’Ancien Testament.

Ces saints personnages ont-ils pu mériter en quelque manière l’incarnation ? A cette question, les théologiens répondent en procédant par distinction et par degré. — 1. // est certiiin que les saints personnages de l’Ancien Testament n’ont pas mérité d’un mérite de condiijnité V incarnation, considérée dans sa substance. — Affirmer un pareil mérite serait en eiïet rapportera ce mérite la source même du salut des hommes. Il semble même, quoique en pense Médina. //( Sum. llieol. S. Tiwmn', III" q. II, a. 11, qu’une telle conception répugnerait ù la puissance absolue de Dieu. - 2. // n’est pas contradictoire que les saints de l’Ancien Testament aient pu mériter d’un mérite de congruité F incarnation, considérée dans sa substance. — Cf. S. Thomas, Sum. theol., I^-ILi-, q. cxiv, a. 6. Mais, en réalité, font-ils méritée de cette façon ? Les uns affirment, et il semble que saint Thomas, III", q. II, a. 11, soit de cet avis ; les autres nient. Avec saint Thomas, nous retrouvons la plupart de ses disciples, Cajétan, Médina, .lean de Saint-Thomas, Godoy, Gonet, les Salmanticenses, et, en dehors de

l'école thomiste, Suarez, disp. X, sect. vi ; Grégoire de Valencia, In Ill'^m Sum. S. Thomee, - q. n. A f encontre, Vasquez, disp. XXII, c. m ; De Lugo, disp. VIII, sect. iv. — 3. // est certain que les saints de l’Ancien Testament ont mérité certaines circonstances de l’incarnation. — Les promesses faites par Dieu à Abraham, Gen., xxii, 17-18, semblent findiquer. La prière de Daniel semble avoir abrégé le temps de f attente. Dan., ix, 23 sq. Toutefois, les auteurs, d’accord quant à f affirmation générale, se séparent souvent entre eux sur des applications particulières à telle ou telle circonstance. Cf. Suarez, disp. X, sect. vi, n. Il ; De Lugo, disp. VIII, sect. iv, n. 34.

3° La sainte Vierge, en particulier, a-t-elle mérité f incarnation ? Les prières liturgiques sembleraient parfois le laisser supposer : Ut dignum filii lui Imbitaculum effici meicretur, Spiritu Sancto coopérante, præparasti… ; et encore : Regina cxli lœlare, alléluia ; quia quem meruisti portare… Conséquemment aux principes posés plus haut, il n’est pas douteux que Marie ait mérité de congruo certaines circonstances de fincarnation ; dans f opinion thomiste, on peut même affirmer qu’elle a mérité de cette façon l’incarnation considérée dans sa substance. Tout le problème se réduit donc à expliquer comment elle a mérité sa maternité divine. Saint Thomas en donne l’explication en quelques mots : qaia meruit ex gratia sibi data illum puritatis et sanrtitatis gradum, ut congrue posset esse mater Dei. In IV Sent., t. III, dist. IV, q. iii, a. 1, ad 6°"<. Sur ces textes, les commentateurs exercent leur sagacité non moins que leur piété. Lin autre problème concerne l’influence sur la réalisation de l’incarnation, du fiat de Marie à l’annonciation Cf. Terrien, La mère des hommes. Paris, s. d. (1900), t. i, p. 152-167. Salmanticenses, disp. VII, dub. m ; De Lugo, disp. V, VI, VII ; Suarez, disp. X, sect. viii. On étudiera ces questions à l’article Marie.

Sur la question des mérites qui précédèrent l’incarnation, voir : S. Thomas, Sum. theol.. III^. q. ii. a. 11 ; cf. I » Ift', q. xviii, a. 4 ; In IV Sent., t. III, dist. IV, q. iii, a. 1 ; et spécialement sur les mérites du Christ et leur objet, III », q. XIX, a. 3 ; In IV Sent., t. III, dist. XVIII, a 2-5 ; De verilate, q. xxix, a. 7, ad Omn ; Suarez, De incarnatione, dis]). X ; Vasquez, De incarnatione, disp. XXI, XXII, XXIII ; De Lugo, i(ii(Ldisp. VIII ; ("ionet, Chjpewi.de incarnatione, disp. VII ; Billuart, De incarnatione, diss. V ; Jean de Saint-Thomas, De incarnatione, q. ii, disp. V, a. 1-2 ; Salmanticenses, De incarnatione, disp. VII, où l’on trouvera une ample moisson de références aux auteurs ; Lcgrand, De incarnatione X’crbi divini, disp. VII, c. ii ; Ysamliert, De ni.iLslcrio incarnationis, q. vi, disp. IIIV, etc. Les manuels récents de théologie sont, sur ce point, ou muets, ou insulfisants. On trouvera quelques bonnes indications dans Ilugon, op. cit., p. 98-105, et dans Grimai, S. S., Jésiis-Clirisl étudié et médifé, Paris, 1910, t. I, c..LVI.

Principaux écrits des Pères et des théologiens

SUR LE mystère DE L’INCARNATION. //e siècle. —

S. Justin, au cours des deux.4po/o( ; i<'S et du l^ia/ogtic avec le juif Trjiplion, spécialement Apologia i*, n. 30-60 ; Dialogus, 48-108, P. G., t. VI, col..375-420, 580-728 ; S. Irénée, dans le Contra harese.'i, I. III, IV, et plus particulièrement, t. V, P, G., t. VII, col. 119-1223 ; Mèliton de Sardes, Iragnwnts, P. G., t. v, col. 1819-1822.

llle siècle. — Tertullien, Adversus Marcionem, P. L., t. M, col. 259-524 ; De carne CItrisli, col. 751-792 ; Adversus Pra.reaiu, col. 153-196 ; S. Ilippolyte, De Christo et Antichristo, P. G., t. x, col. 725-788 ; Contra Iiœresim Nocti, col. 803-830 ; ou édit. Lagarde, Leipzig, 1858 ; Pliilosoplioumena, spécialement t. X, P. G., t. xvi, col. 3414-3454 ; ou édit. Cruicc, Paris, 1860 ; Contra Beronem (fragm. apocryphes). P. G., t. X, col. 829-840 ; Clément d’Alexandrie, en différents passages des.Slroiuates et de l'£xhor(a(ion aux gentils, P. G., t. viii-ix ; Origène, dans le Contra Celsum et le I. II du De priiicipiis, P. fi., t. xi ; S. Grégoire le Thaumaturge, A Théopoinpe sur l’impassibilité et la passibilité divine, dans Pitra, Analecta sacra, t. iv, p. 103-120, 363-376 ;