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IMMACULEE CONCEPTION


s-eu ordo rccilandi officium, provenant du monastère de Sainte-Marie de Albancta, près du Mont-Cassin : ce bréviaire, côté xiie siècle, n*a pas la fête, mais au début on f cousu au xive siècle, sinon au xiii*, deux feuilles qui contiennent la légende de l’abbé Elsin distribuée en huit leçons pour usage liturgique. Voir, pour additions semblables, dom Suitbcrt Bâunier, Histoire du bréviaire, trad. Biron, Paris, 1905, t. ii, p. Cl, note 3.

g. Cour pontificale. - - Plusieurs des documents liturgiques qui viennent d’être cités, en particulier le Breriarium romano-lranciscamim de Padoue et le Missfile secandum usum romane curie de Farfa, contenant l’un un office et l’autre une messe de la Conception, semblent prouver indirectement l’existence de la fête à la cour romaine dans la seconde moitié du xiv<e siècle. Mais, à supposer qu’elle soit légitime, cette conséquence ne suffit pas pour nous apprendre à quelle époque précise ni dans quelles conditions la solennité s’y était introduite. Les recherches du P. Doncœur, art. cit., ont jeté beaucoup de lumière sur ce point, mais il reste encore des ombres. Il ne semble pas qu’on puisse attribuer au pape Jean XXI (1276) l’insertion de la fête au calendrier, ni à son successeur Nicolas III (1277-1280) une acceptation implicite par adoption du bréviaire franciscain qui, dès lors, aurait contenu cette solennité. L’hypothèse n’est pas conciliable avec l’attitude des adversaires ni avec celle des défenseurs. Vers 1320,.lean de Naples affirme aussi nettement que saint Thomas, un demi-siècle plus tôt : L’Église romaine ne célèbre pas la fête de la Conception. » Quodl., VI, q. xiii. De même, une dizaine d’années plus tard, Alvare Pelage : « L’Église romaine ne célèbre pas la fête de la Conception, bien qu’elle pennette de la célébrer ailleurs ; elle ne l’approuve pas, parce que l’idée de permission exclut celle d’approbation. » De planctu Eclesiæ, loc cit., col. 1098. En face de dénégations si expresses, que font les partisans de la fête ? Ils ne s’inscrivent pas en faux contre l’assertion : ou ils ne la relèvent pas, comme Auriol dans son Traclatus, ou ils se contentent de ramener le fait à ses justes proportions, comme le même auteur dans son Repercussorium, concl. viii, Quaracchi, p. 150 : « Si l’Église romaine ne célèbre pas la fête de la Conception, elle ne l’a pourtant pas en abomination et elle ne la méprise pas, non tamen uboniinaliir uel contemnit. » Elle fait même davantage ; elle la permet, comme on le voit, en beaucoup d’endroits : Licet non jaciat Ecclesia romana, tamen permitlit, ut apparet in ecclesiis sokmnibus et calhedralibus, ut Lugduni, et in Anglia, et in mullis aliis lacis. In IV Sent., t. IV, dist. III, q. i, a. 5. L’auteur anon> me du sermon Audite somnium meum, écrit vers 1330 ou peu après, se contentait également de faire appel à la tolérance de l’Église romaine : Ipsa sustinet celebrari festum Conceptionis. Pierre de Alva, loc. cit., p. 243.

Bientôt le ton change. Thomas de Strasbourg rencontrant sur son passage l’objection tirée de la glose Pronunliandum, voir col. 1 ; j07. répond : « A supposer que ces paroles se trouvent réellement dans cette glose, en fait elles sont maintenant abrogées, puisque I a sainte Église romaine a coutume de célébrer solennellement la fête de la glorieuse Vierge. In IV Sent., t. III, dist. III, q. I, a. 1. A la même époque, entre 1340 et 1345, Jean Bacon est encore plus explicite : il invoque, en faveur du culte attaqué, un usage de la cour romaine public et de longue durée, publica et diuturna consuetudine celebratum est hoc festum in caria romana. Chaque année la fête se célèbre dans le couvent des carmes ; il y a messe solennelle et sermon, auxquels assiste la cour romaine, y compris

la vénérable congrégation des seigneurs cardinaux ; et cet état de choses a existé sous plusieurs pontilicats, et hœc duraverunt Icmpore multorum romanorum pontificum, au vu et au su des papes et du siège apostolique, d’où l’on peut conclure que c’est l ; une dévotion sainte et catholique. In IV Sent., t. IV, dist. II, q. IV, a. 3.

Quelque événement notable était-il survenu ? Beaucoup d’auteurs racontent qu’à la suite d’une discussion entre les frères prêcheurs et les frères mineurs, Jean X.KII se serait, en 1325, prononcé en faveur des derniers et qu’il aurait scellé son approbation par un rescrit enjoignant de célébrer la fête avec plus de solennité dans sa chapelle et dans la ville d’Avignon. Mgr Malou, t. i, p. 55, d’après T. Strozzi, Controv. délia concczione, t. V, c. iii, Palerme, 1703. D’autres prétendent qu’il aurait même approuvé la pieuse croyance en ces termes : Omnes fatemur cum Gubriele Mariam plénum gratta ; cum ergo graliæ sint ampliarulie secundum leges et canones, Mariam sine originali peccalo assero conceplam, et eius jestum conceptionis ludico esse celebrandum. Ainsi lisons-nous dans le Cronodrumus, petit traité en faveur de l’immaculée conception composé par un bénédictin anonyme, à une époque incertaine, mais probablement antérieure au corn ile de Bâle. n En conséquence, continue cet auteur, à partir de ce temps-là, comme le rapportent nos ancêtres, ut a maioribus traditur, la cour pontificale et, par suite, l’Église universelle célèbre pieusement la conception de la glorieuse Vierge. » Pierre de Alva, Monumenta anliqua ex variis authoribus, I. :, p. 555 sq. Malheureusement, tout ce récit se présente sans garanties suffisantes de véracité. Une affirmation doctrinale de l’immaculée conception par Jean XXII paraît d’ailleurs peu vraisemblable quand on songe à ses sentiments personnels sur la question. Voir col. 1080. En ce qui concerne la fête, si un acte aussi formel avait eu lieu, comment comprendre le silence de ses défenseurs, sous les pontificats de Benoit XII et de Clément VI, sur un point de telle importance ? Et comment comprendre, en particuUer, que dans le sermon qu’il prêcha le 8 décembre 1342 dans l’église des carmes, Richard Fitzralph se soit cru obligé à tant de réserve et tant de mmagements ? Ni Thomas de Strasbourg, ni Jean Bacon, ni aucun autre contemporain ne parlent d’une fête de la Conception qui aurait été célébrée alors dans le palais pontifical ; ils parlent seulement de l’assistance aux ccremonies dans l’église des carmes : A mullis temporibus consiieverunl in romana caria visitare conventum no.itrum in jesto Conceptionis gloriosæ Virginis, dit encore vers le milieu du siècle Jean de Hildesheim, De principiis ordinis carmelilurum, c. xiv. Reste donc que, s’il y a eu quelque intervention de la part de Jean XXII, elle n’a pas dû aller au delà d’un simple permission ou, tout au plus, d’une approbation d’ordre pratique, d’où serait résulté un essor plus grand du culte.

On est ainsi amené à distinguer deux phases dans l’attitude des souverains pontifes. D’abord il y eut tolérance ; tolérance non pas purement négative, comme celle dont les papes firent preuve en ne proscrivant pas le culte, mais tolérance déjà positive, parce que jointe à des actes. Cette phase avait nellement commencé quand la cour pontificale, se trouvant temporairement à Anagni, assistait à la fête du huit décembre dans la cathédrale. Bonifacc VIH (1294-1303) accentua encore cette attitude bienveillante en accordant à ses compatriotes des indulgences pour cette solennité : Eodem die Bonifacius P. P. octavus fecit reniissionem perpetuam 8 unnorani et 40 dierum. P. Doncœur, /oc. cit.. p. 25 (()9t)), d’après un recueil ms. de la bibliothèque d’Anagni. Quand