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IMMACULEE CONCEPTION

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IMôme attitude, en Italie, de la part des canon>stes. Gommentfint le Décret de Gratien, De consecratione, list. III, c. I, Proniintiandum, Huguccio de Pisc emarquc, à propos du mot Nativitns, qu’il n’est pas ait mention de la conception, et qu’il ne faut pas la cter : la raison en est, que Marie fut conçue dans le péché, comme les autres saints, sauf Jésus-Christ seul : et hœc est ratio, quia in pcccatis conccpta fuit, sicut et ceteri sancti, excepta iinica persona Christi. Sicard († 1215), évêque de Crémone en 1185, fait la même remarque que Jean Belelh sur la célébration (le la fête par un certain nombre dans le passé, et peut-être encore dans le présent, ob revelationcm ntidam abbati in naufragio faclam ; il déclare également que la fête manque d’autorité, non est aiiihenlica, puis, faisant plutôt l’office de rapporteur que celui de juge, il ajoute : « Bien plus, certains estiment qu’il faudrait la prohiber, Marie ayant été, disent-ils, conçue dans le péché : imo videtnr aliquibus prohibenda, dicenlibns quod juerit in prccato concepta. » Mitralc, t. IX, c. XLm, P. L., t. ccxiii, col. 421.

Cetle opposition, motivée uniquement sur ce que Marie fut conçue dans le péché, amena sans doute le changement de position qu’on peut remarquer dès lors chez les défenseurs de la fête. Deux méritent d’être indiqués. L’un est l’auleur pseudo-anselmien du Sermo ou Epistola de conceplione beatee Mariæ, pièce signalée col. 1002. Une distinction notable apparaît dans la partie apologétique qui suit le récit des miracles : autre est la conception humaine, autre la conception spirituelle. L’une répond immédiatement à l’acte générateur, una qua camalis copula viri et muUeris agitur ; l’autre se rapporte à l’âme créée pure et unie au corps par Dieu, alia qua spiritualis onima nova et para Deo opérante corpori divinitus’idjungitur. Si l’on se refuse à célébrer la première conception, comme ayant été charnelle, idcirco quod earnalis exstilit, qu’on consente du moins (surtout dans l’ignorance où beaucoup sont du moment précis où elle s’est faite) à célébrer en ce jour la seconde, saUem placent celebrare efus animée spiritualem creationem corporisque cum anima copukitionem, P. L., t. CLrx, col. ; 522. La distinction était sérieuse et d’une réelle importance ; elle pouvait faire tomber certaines objections, tout en maintenant le sens immaculiste de la fête, puisque la vénération s’adressait à Marie déclarée sainte au premier instant de son existence, comme personne humaine. Mais, dans la pensée de l’auteur, ce n’était là qu’un moyen terme, énoncé par esprit de conciliation ; car lui-même, dans sa conclusion finale, proposait l’une et l’autre conception à la vénération des fidèles en la solennité du 8 décembre : Celebremus igitur (dileclissimi) hodie dignia offîciis utramque ejus conceptionem nenerabilem, spiritualem vidrlicel et humanam. La distinction introduite n’empêchait donc pas l’auteur anonyme de maintenir, en substance, la position d’Eadmer et d’Osberl. On pouvait aller plus loin, en ai)pliquant le terme de conception spirituelle à une sanctification de Marie dès le sein de sa mère, mais postérieure à la conception même humaine ou conception consommée, et fêtée cependant le huit décembre par anticipation, Ainsi comprise, la solennité se distinguerait encore de celle de la nativité, puisqu’elle aurait un objet différent, mais ce ne serait plus, à proprement parler, une fêle de la Conception ; ce serait une fête de la Sanctiftcation de Marie.

Cette manière de voir apparaît, sur la fin du XII'e siècle ou au début du xiii « , dans un ouvrage inédit d’.lcxandrcNeckam(parfoisNcquam). Néau territoire deSaint-Albancn 11 57, ce personnage vint à Paris pour M-s études ; passé maître, il y débuta dans l’enseignement vers 1180. Rentré dans sa patrie, il fut successi’vement professeur à Dunstable, à Saint-Alban et a Oxford. Il se fit, ou ne précise pas à quelle époque, chanoine régulier de Saint-Augustin, devint en 1215 abbé de Cirencester et mourut en 1217. Il est l’auleur de douze hymnes De beata Maria Virgine, dont la seconde contient cette strophe singulièrement expressive :

Salve gemma virginum,

Vera salus hominum,

Semper vcrnans rosa.

Inter spinas liliiiiii,

Supernorum civium

Laus, lux gratios ;.

G. Dreves, Analecta hymnica, t. XLvm, n. 276.

Cependant, c’est ailleurs qu’il faut chercher la pensée expresse de Neckam. Après avoir cessé d’enseigner, il composa un commentaire sur le Cantique des cantiques, conservé manuscrit à Oxford, Bodlcian et Balliol Collège, et à Londres, biblioth. de Lambeth : Alexandri Neckam expositio super Cantica canticorum in laudem gloriose et perpétue virginis et matris et de mijsferio incarnationis Domini. Voir A. Noyon, Note^ bibliograph., mai 1914, p. 213. Guillaume de Ware paraît se référer à cet écrit, lorsque, dans sa Quæstio sur la Conception de Marie, il dit de Neckam : « Sur la fin de sa vie, il expliqua de la bienheureuse Vierge ces paroles du Cantique : l’ula pulebra es, arnica mea, et macula non est in te, neque actualis neque originalis. » Les mots in ultime vitæ suæ contiennent une allusion à un changement d’opinion de la part du docteur anglais ; changement qu’on attribua plus tard A une intervention directe de Notre-Dame, comme on peut le voir dans un récit publié par le P. Thurston, Eadmeri tractatns. Append. H, p. 99. La chose fut beaucoup plus simple, d’après Neckam lui-même. Il nous apprend dans le iv « chapitre de son commentaire, qu’étant maître à Oxford, il posait en adversaire de la fête de la Conception, en particulier il prétendait faire son cours le huit décembre comme tout autre jour ; mais il advint que, chaque année, il fut pris d’un malaise subit et dut renoncer à sa classe. Cette coïncidence, jointe aux remontrances de sages amis, le fit réfléchir et il changea complètement d’attitude. Il semble même que le souci de justifier ce revirement ne soit pas absent des trois chapitres où il traite la question : m. Quod béate Virgo sancti flcata juerit in utero matris ; iv. De conceptione beata Virginis et eiusdem nativilale ; v. Item de conceptione bcale uirginis.

Neckam affirme d’abord, comme le titre du i"’cha)iitre l’indique, « que la bienheureuse Vierge fut sanctifiée dans le sein de sa mère. » A l’objection tirée de VEcce in iniquitatibus concepius sum, etc., il réjiond, un peu plus loin, que ce lexle et d’autres semblables énoncent une loi générale, mais sans préjudice des cas spéciaux où l’exception peut se produire ; nullum générant priejudicium spccialibus casibus, maxime cum sœpissime ei quod generaliter proponitur per spcciem derogetur. Sans compter, ajoutc-t-il, Tappui que fournit l’affirmation de saint Augustin : Volo, ut qnocicns de pcccatis agitur, nulla de beata Virgine mentio fiat. P.éponse qui, prise en soi, ne vaut pas moins pour une conception sainte que pour une naissance sainte. En fait cependant, le commentateur n’affirme, au chapitre m", qu’une sanctification de Marie dans le sein de sa mère aprâs infusion de l’âmr, post anime infusioncm. Quelle peut être la portée exacte de ces derniers mots, nous le chercherons plus loin ; mais une objection en sortait naturellement contre la fête : Si Marie ne fut sanctifiée qu’après infusion de l’ûme, comment jicut-on snlenniscr sa conception ? Undn qncrrlr quorundnm admirantium quel fronte inslauretur snllrmnitcr a nonnullis feslum d>' conceptione Virginis. Il faut, répond-il, distln^T